La propagande de nazification de l'Ukraine, qui avait débuté à bas bruit une vingtaine d'années plus tôt en Russie, n'avait cessé de monter en puissance jusqu'à atteindre son acmé peu avant le déclenchement de l'invasion.
Le 1er août 1938, Edouard Petrovitch Berzine est exécuté avec ses principaux collaborateurs dans la prison de la Loubianka. Il sera réhabilité en 1956, l'année de la fermeture des camps.
L'hôtel surchauffé grouille de jolies jeunes femmes aux yeux bridés, à la silhouette svelte et élancée, vêtues de robes noires étonnamment courtes vu la saison.
Les vallées encaissées aux cours d'eau givrés succèdent aux forêts de mélèzes. La réverbération rejette une multitude de teintes et de nuances rouges et bleues, qui viennent se nicher sur une plaine immaculée, sur la cime des arbres, sur la face ombragée d'une colline de glace.
A la fin des années 1920, Staline a fait table rase de toute opposition, réelle ou supposée.
Les mélèzes aux branches folles sont comme vitrifiés, prisonniers d'un cocon de glace.
Maria Mikkhaïlovna n'a connu qu'une personne passée par les camps :
-- Elle s'appelait Iraïda Nikolaevna Emilianovna. Elle s'est retrouvée ici parce qu'elle avait ramassé dix patates sur un champ. Ca lui a valu une peine de six ans.
-- Quel âge avait-elle?
-- Dix ans.
Magadan est une sacrée surprise! Devant nous, alors que nous roulons sur l'avenue Lénine qui descend vers le centre et la traverse d'est en ouest, s'étend une ville, avec des immeubles en pierre. Leurs façades, qu'on croirait du XIXe siècle, sont richement ornées et peintes dans des couleurs pastel et chatoyantes, tantôt ocre, tantôt verte, bleue, ou rose.
Nous longeons des barres d'immeubles brejnéviennes dont on ne sait trop si elles ont jamais reçu le moindre coup de peinture, des bâtiments datant de l'époque tsariste, des baraques de tôle et de bois à moitié ensevelies.
Les paysages désertiques s'enchaînent le long de la route de la Kolyma, que tout le monde ici appelle "route des ossements".