AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Patlancien


Il y a 104 ans, le 10 décembre 1919, le prix Goncourt couronnait Marcel Proust pour son roman « À l'ombre des jeunes filles en fleurs. L'auteur n'en était pas à sa première tentative pour obtenir le précieux prix et les critiques étaient déjà nombreuses à l'époque pour dénoncer la difficulté de son oeuvre…

Cet Everest du monde littéraire, je l'ai gravi en cordée avec des amis babelionautes et sur une durée d'un mois. Je n'étais pas le premier mais pas non plus le dernier. Je me suis accroché pour ne pas m'effondrer dans les premières pages. de plus, s'attaquer directement au tome 2 de la recherche du temps perdu pouvait paraître risquer pour le commun des lecteurs… l'auteur des 856 mots dans une seule phrase ne me faisait pas peur et je pouvais compter sur l'esprit d'équipe pour arriver à mes fins.

Le style et la personnalité de marcel Proust ne se limitent pas à la longueur de ses phrases bien que celles-ci restent sa marque de fabrique. Si elles sont interminables pour le quidam, ses phrases demeurent pourtant fluides et dynamiques à la manière d'un véritable tsunami littéraire. Si l'on peut se perdre les premières heures dans le style proustien, les idées qu'il énonce sont claires et bien ordonnées. Avec le temps - et dieu sait qu'il est important chez l'écrivain - on commence rapidement à accepter sa prose et voir même à l'apprécier. La monotonie du départ laisse vite la place à la curiosité pour ce foisonnement de sentiments et d'émotions naissantes. On finit par accepter sa marque de fabrique.

Mais on ne peut pas s'intéresser à Proust sans parler de ses personnages. le trait fondamental du personnage proustien réside dans sa description complexe mais aussi précise. Dans la recherche du temps perdu, il y a plus de 200 personnages. L'écrivain sait les faire évoluer sans les figer dans leurs traits de caractère. Comme dans la vraie vie, leurs attitudes évoluent au grès du temps ou de l'instant présent. Chez notre ami Marcel, l'individu change suivant qu'il est seul ou en compagnie. le lecteur peut se perdre dans cette multitude de « faux semblant » et de « paraître-être ». S'ils sont à la fois sincères et sympathiques, ils peuvent aussi devenir snobs voire cruels. On peut les croire artificiels mais ils sont souvent comme on les imagine être du moins comme on voudrait les voir, la question étant de savoir s'ils sont faits pour être aimés ou admirés.

Enfin on se doit aussi de parler de l'amour proustien et des filles qui émoustillent tant le jeune Proust dans ce roman. de la jeune paysanne portant une jarre de lait qu'il voudrait ne plus quitter à la belle Albertine au polo noir qu'il veut épouser, en passant par l'espiègle Gisèle ou la mature Andrée, son coeur (d'artichaut) ne sait ou ne peut choisir. L'impossibilité de les différencier va rendre la décision de l'auteur très compliquée. Pourtant, le désir chez Proust semble trouver son paroxysme dans le manque ou l'inachevé plutôt que dans l'atteinte ou la réalisation de ses amours. «J'aime ce que je n'ai pas et je n'aime plus ce que j'ai ». Gilberte qui vit à Paris en compagnie de ses parents les Swann, en fera également les frais dans la première partie du roman.

Avec Proust, nous restons dépaysés tout au long de notre lecture. le narrateur, héros principal, nous entraîne et nous bouscule dans une succession de souvenirs sans chronologie et sans fil conducteur au grès de ses pensées. La mémoire du temps passé et présent se mélange pour nous donner la représentation réelle du monde qui nous entoure ou plutôt du monde que nous percevons plus par l'esprit que par les yeux. Avec cet écrivain, nous rentrons pleinement dans la pensée du narrateur et nous ne faisons plus qu'un avec lui. le « je » de l'auteur devient notre propre « je ». C'est cette fusion d'esprit qui nous permet d'être transporter au sein même du récit en nous permettant de partager en parfaire osmose, tous les sentiments du héros.

C'est cette expérience incroyable et unique que je vous invite à expérimenter seul ou en groupe. Elle vous permettra d'assister à la représentation de la pièce de théâtre Phèdre jouée par Sarah Bernard (La Brema) ou de dîner dans le restaurant du Grand Hôtel de Cabourg (Balbec) comme visiter l'atelier du peintre Whistler (Elstir) ou de fréquenter la bourgeoisie parisienne durant l'affaire Dreyfus. Vous pourrez vous promenez sur le Champ de Mars avec Odette Swann et sa fille Gilberte ou vous baladez sur la côte normande avec Robert, marquis de Saint Loup. C'est tout ça aussi l'ombre des jeunes filles en fleur…

Je tiens encore une fois à remercier mes amis 4bis, AnnaCan, Berni_29, Cathe, Djdri25, gromit33, H-mb, HundredDreams, Isacom, MisssLaure, mylena, Nicolak pour leurs échanges constructifs et soutiens tout au long de notre ascension littéraire.

Commenter  J’apprécie          7590



Ont apprécié cette critique (73)voir plus




{* *}