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Critique de Jean-Daniel


Parmi les écrivains français contemporains, Pascal Quignard est un de ceux dont l'oeuvre se caractérise le plus par sa constante référence à la musique, ses livres sont souvent peuplés de musiciens. La Leçon de musique est un petit livre assez inhabituel dans la mesure où il ne relate pas un récit mais présente trois épisodes différents avec à chaque fois un nouveau personnage, dans un lieu et à une époque différente. La lecture de ce livre est intéressante mais complexe par son sujet et le style utilisé, et peut ainsi rebuter certains lecteurs.

Platon a écrit que la musique donne une âme à nos coeurs et des ailes à la pensée. Selon Quignard, dans « La Leçon de musique » et « La Haine de la musique », au contraire la musique « fait mal » et « dit le mal ».

L'auteur annonce son sujet dès l'ouverture : « Je traite de la mue de la voix ». Contrairement aux femmes dont la voix change peu, les garçons muent à la puberté, leur voix s'enrichit d'harmoniques graves, mais devient instable du point de vue sonore. Selon l'auteur, c'est un passage difficile pour les garçons qui sont profondément affectés par ce changement ; Quignard voit en la mue un véritable traumatisme. Il s'agit donc pour lui de composer avec la perte de la voix, de « domestiquer la mue » et d'en diminuer les effets. Seuls les hommes « composent avec la perte de la voix et ils composent avec le temps. Ce sont des compositeurs. La métamorphose du grave à l'aigu ne leur est pas possible, du moins corporellement : elle est instrumentalement possible. Elle a nom la musique ».

Face à ce changement, une des voies possibles est donc la composition musicale, domaine qui serait donc presque exclusivement réservé aux hommes…

Dans La Leçon de musique, Quignard indique que la mue a frappé douloureusement le musicien Marin Marais et que celui-ci a cherché à atteindre la maitrise de l'imitation de la voix humaine après avoir mué. Toutefois, on ne retrouve nul par ailleurs que chez Quignard ce tourment attribué à Marin Marais qui ne semblait en fait pas particulièrement gêné par la mue de sa voix. C'est Pascal Quignard lui-même qui a été traumatisé après avoir été rejeté de deux chorales qui, lorsque sa voix se brisa, « s'enseveli passionnément dans la musique instrumentale ».

La voix n'est pas un son comme les autres, elle est le principal support du langage et de la communication et joue un rôle important sur le plan social. La sensibilité de Quignard à la voix est manifeste tout au long de l'ouvrage. Dans celui-ci, Pascal Quignard, auteur d'une oeuvre considérable, mais parfois d'une approche difficile, mêle plusieurs genres : biographie, fiction, essai et légende. Les exemples donnés ici, mais également dans d'autres ouvrages, sont troublants mais non appuyés de preuves, et en contradiction avec ceux d'autres auteurs. Ses hypothèses sont surprenantes puisqu'il prétend que le génie de la composition est un art essentiellement masculin car celui-ci est dû au phénomène de la perte de la voix de l'enfance ; c'est pour cette raison que parmi les compositeurs il y a beaucoup plus d'hommes que de femmes…

Je ne partage pas cet avis et il serait intéressant d'approfondir ce sujet…
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