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Critique de Fandol


Pascale Robert-Diard, chroniqueuse judiciaire au Monde depuis vingt ans, a eu le courage d'écrire un livre qui va à contre-courant de tout ce qui enflamme l'actualité depuis longtemps : La petite menteuse.
Avec une écriture simple et efficace, Pascale Robert-Diard m'emmène sur les pas d'Alice Keridreux, avocate déjà expérimentée. Elle a dû se faire une place dans un métier où les hommes avaient la part belle depuis toujours.
Dans ce livre, je vais suivre cette avocate, découvrir ses sentiments, partager ses réflexions, approuver ses observations sur un monde judiciaire qui doit statuer entre deux mots terribles : victime ou coupable et, éventuellement… innocent (voir le fiasco judiciaire d'Outreau).
C'est quand elle reçoit Lisa Charvet, jeune femme de vingt ans, que s'enclenche ce roman. Cette Lisa a accusé un homme de viol et elle lui demande d'emblée de la défendre pour le procès en appel qui approche : « Je veux être défendue par une femme. »
Au début, Alice n'est pas décidée à s'impliquer car elle n'est pas spécialiste des victimes. En effet, Lisa a fait condamner Marco Lange, un plâtrier, qu'elle accuse de viol alors qu'elle avait quinze ans. Cet homme a toujours tout nié, a toujours clamé son innocence mais sans jamais être entendu.
L'histoire des deux protagonistes se déroule alors avec, pour chacun, problème familiaux, détails de personnalité et peu ou pas d'éléments positifs. Après quarante-huit heures de garde à vue, Marco Lange a été mis en détention car des témoignages orientés, un procès-verbal de gendarmerie, sans autre option que la culpabilité, ont vite réglé son sort.
On oublie vite cet homme qui tente de survivre derrière les barreaux malgré son statut terrible de « pointeur » qui met sa sécurité en jeu à chaque instant vis-à-vis des autres personnes détenues, pour détailler l'adolescence de Lisa et ses rapports avec ses parents.
À quinze ans, Lisa attire les regards des garçons et certains n'hésitent pas à aller plus loin, à profiter de son mal-être, de son désir de reconnaissance pour abuser d'elle. D'ailleurs, c'est elle qui devient « la salope du collège ». C'est là que deux jeunes professeurs l'ayant prise en pitié n'ont pas hésité à la convoquer en salle des profs pour, dépassant leur rôle, jouer aux enquêteurs. Marion, une amie de Lisa, les avait alertés car, celle-ci, pour resserrer un peu plus leurs liens, lui avait raconté son histoire de viol.
Tout bascule donc lorsque Lisa avoue son mensonge à Alice. L'avocate est profondément choquée car, si Lisa dit vrai maintenant, un homme, innocent, est en prison depuis plus de trois ans !
Alors, Pascale Robert-Diard me conduit doucement jusqu'à la plaidoirie de l'avocate. C'est un chemin difficile, avec de nombreux obstacles dus particulièrement à la complexité du parcours judiciaire. Ces femmes et ces hommes censés juger leurs semblables ont une vie, des soucis, des ennuis, un vécu et il ne faudrait jamais faire abstraction de cela. D'ailleurs, l'autrice consacre quelques pages fort instructives à propos des jurés tirés au sort et sur l'attitude de la présidente de la cour d'assises.
La conduite de chaque protagoniste du procès joue un rôle très important et Pascale Robert-Diard note avec beaucoup d'à-propos les réactions, les comportements, s'attachant surtout aux témoins qui viennent et dont certains reviennent après le coup de théâtre que le titre du roman laisse présager.
Enfin, je ne dois pas oublier le rôle important de la presse, des médias qui ont vite réglé le sort d'une personne mise en cause, que cela lui soit favorable ou non. Seul l'avocat général est un peu délaissé vu la configuration des événements mais sa volonté d'accabler un ou une accusé(e), innocent(e) ou non, est souvent révoltante.
Pour équilibrer une tendance constatée depuis une trentaine d'années, il faut lire La petite menteuse. Ce n'est pas parce qu'un nombre incalculable d'agresseurs est resté impuni depuis que l'espèce humaine existe, qu'il faut faire payer la note aujourd'hui aux innocents injustement accusés et condamnés sans la moindre preuve. Pascale Robert-Diard, courageusement, le démontre admirablement dans La petite menteuse.

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