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Critique de dvall


Se nourrissant tout autant du concept de dialogisme de Mikhail Bakhtine que de celui du Tout-monde d'Edouard Glissant, Michael Roch signe avec « Tè Mawon » un roman SF d'une originalité ébouriffante, à défriser les locks d'un rastafari. Imaginant une mégalopole caribéenne futuriste rivalisant avec les nuages et baignée d'un niyaj nimérik où la réalité augmentée (vwè+) est omniprésente, l'auteur nous immerge dans un récit polyphonique, véritable maëlstrom linguistique et philosophique. Entre l'anba et l'anwo de cette nouvelle Babilòn, une poignée de personnages se démènent pour accomplir leur mission ou carrément leur destin, comme regagner la terre marron de leurs ancêtres.

Joe, métis exilé qui a traversé l'Atlantique pour retrouver sa copine disparue, le jeune Patson qui se plie en quatre pour l'aider à échapper aux condés, Pat le paternel amateur de sentzeb (mélange de ganja et de zèb à pic) et dont le passé de syndicaliste a laissé place aux magouilles mafieuses, et puis les soeurs ennemies Ézie et Lonia, qui se sont arrachées à leurs racines de l'anba pour devenir traductrices dans l'anwo. Leur rôle en tant que tradiktè, c'est « observer la friction du monde avec lui-même. » Chacun de ces personnages a un langage qui lui est propre : Joe a de l'argot occitan et du verlan en bouche, Pat parle un kréyol épicé, les soeurs Sézè maîtrisent un français soutenu. Ce roman, c'est konsidiré un plat exotique aux aromates de partout et d'ailleurs, un melting-pot de saveurs qui ravissent tout autant le bouden (le ventre) que le tétral (la tête).

Côté bouden, il faut admettre que les quarante premières pages sont un peu dures à digérer. Les cinq personnages principaux déboulent en un tour de main et il faut s'accrocher à la phonétique pour ne pas perdre le sens des mots, mais il faut se laisser porter par le slam, se laisser imprégner par cette oralité colorée. Côté tétral, il faut saluer la manière dont l'auteur brode sur le concept de diversalité, que l'on doit aux écrivains de la Caraïbe, et qui définit cette dynamique de l'Unité qui se fait en Divers, cette remise en dialogues des langues et des cultures. Un roman intelligent et polyglotte !
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