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Critique de Fleitour


En écrivant Mécaniques du Chaos, Daniel rondeau, signait non seulement un roman sur notre histoire contemporaine, mais aussi un panorama original et très fouillé du terrorisme d'origine principalement djihadiste, déjà un grand livre de référence.


J'imagine la masse des archives que Daniel Rondeau a dû explorer, pour ne pas se limiter à des événements récents, pour éviter les amalgames, pour ne pas tomber dans le spectaculaire, mais pour ancrer son récit dans l'histoire la plus ancienne de ces terres du proche et du Moyen-Orient.


L'ancrage de Mécanique du Chaos, passe aussi par le choix de certaines villes ou lieux particuliers où se sont déroulés des événements symboliques, ou prémonitoires. On découvre par exemple l'île de Malte mais aussi Sétif, Kobané, Carthage, des lieux et des villes où des peuples se sont croisés et recroisés, dans la haine, le partage ou l'indifférence.


La qualité du récit vient sans doute du choix des personnages qui vont devenir au fil des pages des acteurs attachants pour lesquels Daniel rondeau sera en total empathie. Je pense notamment au vieil homme de Sétif, Bouhadiba fasciné par les recherches archéologiques, et qui garde pour la France une profonde tendresse, je pense à Harry celui qui deviendra l'indic privilégié du grand patron Lambertin, je pense à cette jeune femme sauvée, après un naufrage sur une plage de Malte, Habiba, qui n'aura pas eu la chance d'épargner son frère.


Habiba ou Noelle à qui est dédié ce livre.

Il faut se rappeler dans le détail le déclenchement des événements de Sétif, quand pendant une manifestation populaire pour la paix, seuls les drapeaux français ou des pays alliés étaient autorisés, Saâl Bouzid, 26 ans, brandit un drapeau algérien, signe indépendantiste.
Il sera abattu.
Daniel rondeau nous parle des documents d'archive où les européens furent massacrés de façon insoutenable, et de la riposte sanglante qui a suivi dans les populations indigènes, à "l'effroi, l'incompréhension, la stupeur', page 298, suivent ces mots, "la France n'a pas lésiné non plus sur les atrocités," page 299.


Et pourtant sur ce même territoire des populations venues de multiples horizons ont cohabité avec d'autres populations, comme à Sétif en témoignent les fouilles ( des fresques du 6ème siècle mises à jour , page 101) , conduites par Grimoud, que suivait le grand homme émacié Bouhadiba.
Pourquoi le geste d'un extrémiste, en1945, justifie la guerre sainte et le djihad en 2018 ?

La lucidité de Daniel Rondeau est de poser ces jalons, de rappeler les faits, et de décrire la complexité de notre monde où classer, juger, condamner est aussi dérisoire que de vouloir faire passer un chameau, fut-il de Sétif, par le chas d'une aiguille.
L'autre grande leçon de l'ouvrage de Daniel Rondeau est d'avoir, bien démontré
que derrière le terrorisme, se cache la corruption, une lutte sans merci pour le pouvoir.


La mécanique du chaos, se développe, s'insinue, dans toutes les failles de nos sociétés, à travers toutes les dérives de dirigeants corrompus, animateurs de leur propres réseaux de corruption.
Aucun pays ne peut se croire à l'abri de ces trafics maffieux, ou la finance en col blanc, celle qui achète à bon compte les trésors du passé, flirte allègrement avec des chefs Djhadistes sans scrupules, ou de mouvances diverses.


Entre une France souvent déboussolée, et ses friches urbaines où règnent trafics et délinquance, et les états du Sud en déliquescence comme la Syrie ou la Libye, une mauvaise graine se propage.

Dans ce climat en jachère, à travers une fiction trépidante, menée par deux flics, Bruno et Lambertin, et leur fidèle compagnon chercheur Grimaud, Daniel Rondeau a bâti depuis une banlieue fictive, qui a pour nom Taurbeil-Tarte et son Patron mafieux M'Bilal, un fabuleux thriller, qui vous tient en haleine, et vous fait voyager d'Istanbul à Tanger d'Alexandrie à Tripoli en passant par Malte, et pour aboutir à la fameuse Villa fantôme.

Je suis sorti de ce livre groggy, comme d'un véritable combat, pour savoir qui allait sauver sa peau. Ce livre est un peu un sésame, un pass, une clé indiscutable, non pour tout comprendre, mais pour mieux se déplacer, dans ce labyrinthe aux multiples senteurs, souvent nauséabondes, aujourd'hui le terrorisme.

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