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Critique de Musa_aka_Cthulie


Emblématique du théâtre de Sartre, dont on lit d'ailleurs rarement la majorité des pièces, Huis clos fut écrite fin 1943, créée en 1944 et provoqua une sorte de scandale, en tout cas une incompréhension telle que Sartre prit la peine d'expliquer par la suite ce qu'il entendait par la fameuse réplique "L'enfer, c'est les autres" (j'ai pas trop l'impression de divulgâcher, là, hein).


Un procédé scénique très simple et dépouillé : une pièce, trois personnages (plus un personnage très secondaire), trois canapés. C'est L'Enfer, tout simplement, un enfer où Garcin, Inès et Estelle sont coincés pour le reste de leur mort. Tous trois viennent de milieux sociaux différents, tous trois sont dotés de caractères bien différents, et tous trois sont morts de façon bien différente. Que font-ils là ? Pourquoi l'Enfer a-t-il l'apparence d'une pièce avec trois canapés et un décor Second Empire ? Les voilà qui racontent chacun comment ils sont morts, comment ils ont vécu. Et très vite, les relations s'enveniment. Malgré le désir de Garcin de ne pas communiquer avec ses compagnes, il va falloir interagir, parler, être regardé par les deux autres.


La pièce est écrite de manière efficace. Interrogations, mensonges, tentatives de séduction, et montée en tension jusqu'à la dernière scène paroxystique, où les masques doivent finalement tomber, où les apparences qu'on maintenait tant bien que mal du temps de la vie ne peuvent plus tenir, où les relations biaisées avec les autres sont insupportables, où le regard des autres est inévitable, où on est obligé de se mettre à nu. Les dialogues tournent à l'hystérie dans ce décor étriqué : les trois personnages pourrissent en un rien de temps leurs relations, comme ils ont pourri leurs relations aux autres lorsqu'ils étaient en vie. Une vie qui est loin d'eux et qu'ils voient de plus s'écouler depuis leur enfer, sans eux, alors qu'ils continueront à se torturer à cause du regard que pose sur eux les deux autres.


C'est tellement sobre et bien construit que ça ne donne pas envie (en tout cas pas à moi) de s'étendre dessus. Il serait sans doute intéressant de replacer cette pièce dans l'oeuvre de Sartre, ce que je suis incapable de faire, n'étant pas du tout familière de l'auteur - c'est d'ailleurs curieux comme on peut avoir l'impression de connaître Sartre pour se rendre compte que finalement, on a rien lu, ou presque, de lui. Ce qui m'a moins convaincue que cette composition impeccable et qui tient toujours la route aujourd'hui, c'est le style des dialogues. Je comprends bien que la pièce remonte aux années quarante, mais les dialogues en question me semblent avoir mal vieilli ; que les personnages, censés se parler, se disputer, se déchirer de manière toute naturelle, le font de manière un chouïa artificielle ; bref, que les dialogues portent trop les stigmates de leur époque pour une pièce qui touche à une thématique, disons le mot, universelle. D'où une petite déception, sans doute également liée à la notoriété de la pièce ; on attend forcément énormément d'un tel classique, et ce d'autant qu'une de ses réplique est devenue carrément culte.
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