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Critique de CorinneCo


Bernhard Schlink est une mine d'or pour un cinéaste. Chacune de ces sept nouvelles pourraient être des petites pépites cinématographiques (comme les autres livres d'ailleurs) et cela n'enlève en rien la qualité littéraire. Au contraire, le matériau est si riche et la narration si fine que tout est déjà là. La richesse de l'écriture sera toujours plus dense que le film (il suffit de voir et de lire "Le Liseur", même si le film est tout à fait honorable). "Amours en fuite" s'ouvre sur une nouvelle intitulée "La petite fille au lézard", histoire d'un tableau familial dont le fils remonte le fil de l'acquisition par son père. Ce jeune homme a une véritable fascination pour ce tableau depuis son enfance, un véritable amour presque obsessionnel, il le chérit autant qu'il le hait car nous voici avec Schlink dans le labyrinthe des "objets volés" pendant la guerre. Je n'en dirais pas plus.
Puis c'est "l'infidélité", nouvelle ou le narrateur raconte son amitié avec un couple à Berlin Est, lui habitant Berlin Ouest, avant et après la chute du mur. Une histoire de trahison, d'illusion, de blessures, aussi bien politiques qu'intimes. Quand l'Histoire (comme souvent chez Schlink) s'invite dans les histoires intimes des protagonistes. La troisième nouvelle "L'autre" est plus convenue et "classique". Un homme découvre après la mort de sa femme que celle-ci a eu une liaison et il décide de rencontrer "l'autre". Cet homme timoré et peu aimable découvre une facette de sa femme qu'il ne soupçonnait pas et nous suivons son cheminement émotionnel et intellectuel pour en venir à accepter cet "autre" et à le comprendre et à comprendre sa femme. Puis vient une de mes nouvelles préférées de ce livre "les poids gourmands". Cette histoire rocambolesque d'un homme qui a tout et veut tout, plusieurs métiers, plusieurs femmes, plusieurs enfants, qui décide soudain de tout abandonner et qui se retrouve rattrapé par son histoire, son passé et sa "gourmandise". La fin est à la fois drôle, amère et cruelle.
"La circoncision" avant dernière histoire est une belle partition sur l'acception de l'autre, sur la culpabilité, la transmission, Sarah est juive new-yorkaise, Andi est catholique allemand. Ils sont jeunes, ils s'aiment et se sentent prêts à affronter toutes les difficultés liées à leur passé familial respectif. Mais ce passé ne les laisse pas en paix, Schlink par la voix d'Andi pose toutes les questions, ne répond à aucune ou si peu. Il nous interroge comme souvent dans ses livres. Andi se sent piégé par L Histoire, par son identité. Cet amour est-il voué d'emblée à l'échec ?
L'avant-dernière histoire est "Le fils", la toile de fond est un pays en guerre et un homme faisant partie d'une mission étrangère "d'observation". Cette petite nouvelle parle d'un homme qui a failli toute sa vie, du moins le pense-t-il et qui loin de son pays, de sa famille, dans un environnement hostile et face au danger pense qu'il n'est pas trop tard pour rattraper les choses, surtout son attitude vis-à-vis de son fils. le pourra-t-il ?
La dernière nouvelle s'intitule "la femme de la station service". C'est une rêverie. Un petit bijou désolé, mélancolique comme les côtes du Pacifique noyées dans la brume où l'histoire se termine.
L'alchimie d'humanisme et de beauté formelle qui se dégage de l'écriture de Bernhard Schlink n'a d'égale que la complexité de ses histoires ou nous sommes tous, représentés dans une vision humaine fragmentaire et globale, toujours juste et sensible. Un patchwork d'émotions et de réflexions.
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