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Critique de julien_le_naufrage


Présenté sous une couverture au dessin magnifique, signé Pascal Casolari, le Bélial nous offre ici un somptueux recueil de nouvelles. Mais si cette première page alléchante attirera un lectorat SF space opera, le livre ne devrait pas passer outre des mains de fans de fantastique. Car finalement, mis à part "Bernacle Bill le spatial" qui joue franchement la carte SF space opera, pour le reste on est plus proche du fantastique qu'autre chose.

La première chose qui m'a impressionnée, c'est la plume de Lucius Shepard. de longues phrases, peut-être alambiquées pour certains mais qui profitent d'un rythme et d'un poésie qui me plaît beaucoup. Une prose riche, belle et agréable qui, si l'on se prête au jeu, vous emportera dans un univers imaginaire des plus agréable.

Mais venons-en aux textes... le Bélial nous a concocté ici un bien beau recueil de 5 nouvelles chacune longue d'environ une centaine de pages. Presque 5 mini-romans sous la main et 5 occasions de rencontrer l'imaginaire SF et fantastique de l'auteur baroudeur. Malheureusement pour les fans ultimes de l'auteur, il ne découvriront dans ce recueil que trois textes inédits : "Dead money", "Limbo" et "Des étoiles entrevues dans la pierre". Les deux autres ayant déjà été publiées en français auparavant : "Bernacle Bill le spatial" (parue en 1994 dans l'anthologie "Futurs à Bascule") et "Radieuse étoile verte" (parue dans le Bifrost n°51). Néanmoins, pour un néophyte comme moi, j'avais de quoi me mettre sous la dent. Et avec bonheur en plus!

Mais commençons avec le premier texte : "Bernacle Bill le spatial". Ce premier texte profite, semble-t-il d'une nouvelle traduction. L'occasion d'améliorer un texte qui a reçu le Prix Hugo en 1993. "Bernacle Bill le spatial" nous emmène sur le sol martien , dans la station "Solitaire", où l'on rencontre le brave idiot du coin, Bernacle Bill, tête à claque patentée de la collectivité. C'est à peine s'il est juste toléré dans une station spatiale où les erreurs génétiques ne sont normalement pas admises, mais sa mère ayant falsifiés ses papiers a permis à Bill de voir le jour sur Mars. Reclus abonné aux plaisirs virtuels et passionnés des bernacle spatiaux, il se voit un jour sauvé d'une dérouillade en règle par John, un responsable de la sécurité, qui le prendra ensuite sous son aile. L'atmosphère est lourde durant toute la nouvelle, un huis clos dans une station spatiale qui permet de mettre en avant les relations humaines et la tension naissante imposée par un extrémisme religieux importée par l'Inconnue Magnificence. Shepard crée des personnages attachant dans un espace clos assez cruel. Il y distille une atmosphère pesante et enivrante qui vaut vraiment le détour! Un texte qui mérite amplement son Prix Hugo!

Le second texte est "Dead Money". Celui-ci tient plus du polar, ou du thriller sur fond de fantastique que de SF pure. L'étrange atmosphère fantastique dégagée par ce texte est vraiment prenante, et une fois de plus ce sont les relations entre les personnages qui donnent tout le sel de ce texte qui a un petit coté déjanté mais tragique en même temps. "Dead Money" est une nouvelle faisant suite au roman "Les yeux électriques" publié par Lucius Shepard en 1987 et 1992 pour ses éditions françaises. Bref une initiation à un univers étranges mais intéressant, ou une redécouverte pour qui aurait déjà lu ce livre.
Dans "Dead Money", Lucius Shepard joue sur la réanimation des morts et le culte vaudou. Zombies réanimés et animés par une nouvelle personnalité, ils ont tout de l'humain normal, avec le coté extra-ordinaire en plus. Notamment Josey Pellerin qui se retrouve champion de poker dans sa nouvelle vie. Materné par la belle Jocundra Verret au frais de sa société qui pratique ses expériences... douteuses? Mais voilà, qu'un jour, lors d'un poker particulier, Jack Lamb repère ce Josey... et en parle ensuite à son truand de patron. S'ensuit une relation étrange, entre amour et contrôle, sur fond d'atmosphère fantastique et de zombies déjantés.

Le troisième texte, "Radieuse étoile verte", n'est peut-être pas le meilleur à mon avis. Il démarre sur un fond de SF qui n'est pas sans me rappeler l'avenir sombre dépeint par Catherine Dufour dans son "Le goût de l'immortalité". Malheureusement, ici on est face à une banale histoire de vengeance. Un adolescent se voit visité en songe par sa mère, via une bio-puce pornographique, qui lui demande de tuer son père. Là c'est du complexe oedipien, non? Bref, pas de grande surprise dans cette histoire sur fond de manipulation et de vengeance. Rien de bien original si ce n'est le fond SF et le cirque du futur. Un bon moment de détente néanmoins.

On continue avec "Limbo" qui nous plonge lui en plein fantastique. Jack Shellane, ex-mafieux en cavale, vient prendre refuge dans un chalet forestier perdu des USA. Se noue une relation avec la belle Grace, qui entre amour et tentation, manipulera Shellane pour la venger de son mari. Jeu de cache cache, de non-dits et de désir, il se dépeint ici une histoire fantasmatique au réalisme intriguant. Encore une fois Lucius Shepard nous mène gentiment au travers de son phrasé là où il veut. Un bon texte, onirique et glauque, qui se lit avec plaisir malgré certaines parties sur la fin que j'ai trouvée mouais-bof.

Le cinquième et dernier texte nous emmène dans des aventures plus rock'n roll. "Des étoiles entrevues dans la pierre" est, une fois de plus, un texte fantastique lorgnant sur certains terrains SF. Avec ce texte Lucius Shepard nous montre qu'il peut rivaliser facilement avec des écrivains comme Stephen King.
Dans une ville sidérurgique sur le déclin, patelin qui n'est pas sans rappeler Liège, on se retrouve à suivre Vernon, un producteur de musique qui vient de trouver son nouveau poulain : un guitariste de blues rock aux moeurs plus que douteuses. Mais voilà qu'un jour, des étoiles apparaissent sur la bibliothèque du bled, et une effervescence particulière naît de la ville. Des gens dont on ne se doutait de rien se retrouvent affublés d'un talent incroyable, bref Black William découvre le bonheur de l'intelligence ultime. Mais à coté de cette étrangeté, d'autres meurent d'une manière inexpliquée, ce qui intrigue Vernon...

Au final, "Sous des cieux étrangers" est un bien sympathique recueil de nouvelles. "Bernacle bill le spatial" est sans doute mon préféré. "Radieuse étoile verte" est passable à mon avis même s'il reste distrayant. "Dead Money" était d'une lecture fort agréable et donne envie d'aller voir plus loin avec le roman sus-nommé. "Limbo" et Des étoiles entrevues dans la pierre" sont des excursions sympathiques dans le fantastiques, style dans lequel Lucius Shepard semble brillé autant que les auteurs mainstream de ce genre! de plus l'auteur profite d'une bien belle plume, sans doute bien rendue par la traduction de Jean-Daniel Brèque, style que j'ai beaucoup apprécié donc et qui m'a permis de lire ce recueil rapidement et avec plaisir! Un sympathique bouquin à conseiller donc et pour moi une belle porte d'entrée dans l'univers de Lucius Shepard, auteur malheureusement fort méconnu par ici.

Tiens, au fait, je suis fan de la couverture de Pascal Casolari.
Lien : http://naufragesvolontaires...
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