Dès mon arrivée au Borstal, ils ont fait de moi un coureur de fond en cross. Ca doit être parce qu'ils trouvaient que j'avais la découpure qu'il faut, parce que j'étais grand et musclé pour mon âge (et je le suis toujours). Au fond, pour vous dire le vrai, je ne m'en faisais guère pour ça, parce que, de courir, ç'a tout le temps été le fort dans notre famille, surtout quand il s'agit de se défiler de la police. Moi, j'ai toujours été bon à la course, avec à la fois du sprint et de la foulée, mais le seul ennui, c'est que malgré toute ma vitesse, et pour savoir jouer les flûtes, vous pouvez être sûr que je m'y connais, même si c'est moi qui vous le dis, c'est pas ça qui m'a empêché de me faire piger par les cognes le jour que j'ai fait la boulangerie.
Plus tard, il avait décidé d'aller les voir, mais s'en était finalement abstenu, parce que dans cette solitude même où il vivait, seule semblait en valoir la peine la volonté d'aller de l'avant en sachant en accepter davan-tage. Il sentait d'une façon confuse et inexprimée que de revenir en arrière et de retrouver les taudis et les événements marquants de sa jeunesse, les amis d'autrefois, les odeurs et les sons qui évoquaient de façon tangible des jours meilleurs, aurait été pour lui une sorte de mort. P15
Et pourquoi je regarde cet atlas sous mon pupitre à l’école au lieu de faire des additions […], parce que les additions, j’ai horreur d’en faire, surtout quand je me dis que j’en sais bien assez déjà pour compter tout l’argent que j’arriverai jamais à ratiboiser dans les compteurs à gaz des particuliers.
Je me rendis compte que le monde de Frankie était en réalité impénétrable, que de savants inquisiteurs scientifico-moralistes pouvaient sans doute l’atteindre, l’obliger à se dissimuler, tuer le corps physique qui lui donnait refuge, mais qu’au bout du compte, ils étaient impuissants à faire grand mal à de telles mentalités. Il existe des coins de jungle que le scalpel ne saurait atteindre…
─ Quelle nouille que ce gardien de but, fit Lennox avec un juron, sa casquette enfoncée jusqu’aux yeux. Il ne serait même pas capable d’attraper un bon rhume.
Le sentiment agréable d’avoir un but à sa vie l’apaisait au point que c’est à peine s’il se rappelait ses jours d’esseulement où pour lui la seule chance de communiquer avec quelqu’un se réduisait à aller s’enivrer dans un pub.
Mais, compte tenu de la cadence à laquelle sa vie se déroulait, la guerre ne dura pas longtemps et de nouveau plus rien n’eut d’importance.
Il sentait d’une façon confuse et inexprimée que de revenir en arrière et de retrouver les taudis et les événements marquants de sa jeunesse, les amis d’autrefois, les odeurs et les sons qui évoquaient de façon tangible des jours meilleurs, aurait été pour lui une sorte de mort. Il avait décidé qu’il valait mieux oublier tout cela parce qu’il lui semblait au demeurant probable qu’après la mort, quand celle-ci viendrait, il retrouverait toutes ces choses.