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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
"Une récente Fatwa a interdit aux femmes de toucher aux bananes et aux concombres ( Ah les C...combres! ) parce qu'ils ressemblent au sexe masculin."
- Mais la carotte, j'ai le droit?" Demande Leila Slimani l'auteure de "Dans le jardin de l'ogre."

Au Maroc en 2015, lors d'une dédicace, Leïla rencontre une lectrice qui lui parle de la pression sociale des Traditionalistes islamiques sur le Maroc et surtout sur les...Femmes!

"...Dans les premiers temps de l'Islam, le sexe était loin d'être condamnable". La sexualité était même considérée comme une source d'épanouissement.

"Mais aujourd'hui, chacun utilise la religion pour justifier tel ou tel interdit..."
-La femme est "Fitna: tentation.
-La femme est "Awra : illicite au regard
( Vous comprenez , la femme est un bijou, un joyau ou un...bonbon qu'il faut enrober pour le préserver des regards concupiscents!...)
On peut..l'enfermer, l'emprisonner, c'est toujours pour son bien."

Le film "Much Loved" sur des amies prostituées à Marrakech déclenche d'emblée une polémique violente ( beaucoup de femmes se prostituent pour pouvoir survivre, mais ça, personne ne veut l'entendre... Alors que le roi Mohammed VI a une fortune de 6 milliards selon le magazine Forbes, évaluation de 2015, et ce sans compter les rentrées occultes d'argent!)

Quelques semaines plus tard, c'est la tenue de Jennifer Lopez au festival Mawazine qui enflamme les gens. Certains marocains appellent à jeter dehors ce suppôt de Satan.
Et 2 femmes marocaines sont prises à partie par toute une foule, à cause de leur tenue jugée provocante... Et inculpées ( en plus! ) pour outrage public à la pudeur / article 483...

La société Marocaine ( refoulée et hypocrite) insiste sur le comportement vestimentaire, ou le corps.de la femme. Mais le Coran n'a jamais parlé de la femme de cette façon."
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Reportage de Leïla Slimani illustré par Laetitia Coryn sur tous les tabous qui entourent la sexualité et étouffent beaucoup de personnes au Maroc, en particulier les femmes.

Au-delà de la dimension purement informative de la BD, j'ai trouvé ces témoignages très poignant. Sans misérabilisme et sans propos malsains ou crus mal placés, l'auteure interroge plusieurs personnes qu'elles soient d'anciennes victimes, des femmes libres qui décident de vivre selon leurs convictions, prostituées, lesbienne, sociologues ou des hommes !
Ce qui est décrit est pour un lectorat occidental assez terrible et nous amène à relativiser un peu sur ce qui se passe chez nous. Toutefois, le fait de lire la problématique sous un autre angle et dans un pays où conservateurs et progressistes s'opposent met aussi en perspective certains discours rétrogrades qui peuvent se multiplier chez nous aussi.

Comme le répètent certaines associations (certes, elles aussi pour précher pour leur paroisse) : un objet utilisé comme instrument de soumission dans un pays ne saurait être un instrument de libération dans un autre.

De quoi donner matière à réfléchir en tout cas, c'est indéniable.
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L'émancipation est d'abord conscientisation.
-
Ce tome contient une histoire complète et indépendante de toute autre. le -premier tirage date de 2021. Il a été réalisé par Leïla Slimani pour le scénario, et Laetitia Coryn pour les dessins et les couleurs. L'ouvrage comporte 99 pages de bande dessinée.

En mai 2015 à Rabat, Leïla est en train de savourer un thé glacé dans une cafeteria, après avoir présenté son livre Dans le Jardin de l'Ogre (2014) en public. Elle est abordée par Nour qui lui demande si elle peut s'assoir à sa table, tout en s'excusant d'être arrivée en retard à sa présentation. Elle lui dit qu'elle a beaucoup aimé le livre, et lui demande si le débat s'est bien passé. L'autrice répond que femmes venues la voir lors de la dédicace ont fini par lui raconter leur vie intime, ce à quoi elle ne s'attendait pas du tout. Nour lui demande si les réactions sont les mêmes en France. Elle répond que non, que les lecteurs sont surtout étonnés qu'une maghrébine puisse aborder aussi crûment la thématique de l'addiction à la sexualité. de par ses origines, elle aurait dû faire preuve de plus de pudeur et se contenter d'écrire un livre érotique aux accents orientalistes. Nour ironise : en digne descendante de Shéhérazade. La discussion s'engage et Leïla lui demande si elle a des enfants. Elle lui répond que non, qu'elle est célibataire, et qu'elle ne voit pas beaucoup sa famille. Son frère s'est installé en France où il s'est marié. Elle rend visite à ses parents de temps en temps, mais ils sont un peu trop traditionnalistes pour elle. Par exemple, pour ses parents, elle sera vierge le jour de son mariage. À presque quarante ans, ils doivent se douter qu'elle a déjà eu des histoires, mais ils n'en parlent jamais.

La conversation se poursuit : Nour raconte son enfance, avec sa mère qui s'est mariée à 18 ans et a arrêté ses études pour faire femme au foyer, et son père assez souple quand elle était petite, mais restant marocain. Il prêtait une attention particulière au regard des gens, mais sa fille avait le droit de faire plus de choses que d'autres filles de la famille. Il n'y a que le sport dont il lui a interdit la pratique. Toute sa vie, Nour a vécu un combat intérieur entre la volonté de se libérer de la tyrannie du groupe, et la crainte que cela n'entraîne l'effondrement des structures traditionnelles à partir desquelles elle s'était construite. Comme la plupart des Marocains en fait. La Hchouma est un concept que l'on inculque dès l'enfance. Être bien élevé, être un bon citoyen, c'est aussi avoir honte. Rester vierge était une injonction très forte dans sa famille et elle a eu beaucoup de mal à s'en défaire. Hors de question de transgresser cette règle, même quand elle s'est sentie attirée par un autre garçon pour la première fois. Un jour elle flirtait avec un garçon dans sa voiture, et ils ont été surpris par un policier. Ça s'est réglé avec cent dirhams, mais elle en est restée bloquée pendant longtemps. Elle évoque la fois où un cousin lui avait des attouchements, la libération quand elle en a parlé à des copines, les cours de sexualité qui aborde la reproduction de manière froide et scientifique, sans parler de désir, les femmes mariées jeunes qui divorcent deux ans plus tard.

D'une certaine manière, cette bande dessinée est une adaptation de l'essai de l'autrice : Sexe et mensonges paru la même année en 2017, une transposition de manière plus vivante sous la forme de témoignages. Les autrices font donc oeuvre de reconstitution des échanges que Slimani a eu avec plusieurs femmes marocaines sur le sujet de leur sexualité, de leur rapport au corps, du regard de la société sur leurs pratiques sexuelles. le premier témoignage, celui de Nour, pose tout de suite la dialectique : une forme d'opposition entre une pensée traditionnaliste, et une volonté d'émancipation des femmes. La narration visuelle rend cette femme beaucoup plus proche du lecteur, beaucoup plus vivante. Elle permet également de montrer les émotions et les coutumes. Il voit ainsi les deux copines de Nour choquées et en colère par l'histoire des attouchements du cousin sur elle, ainsi que la mariée apprêtée avec la coiffe traditionnelle. Il sourit quand Nour prend une pose de sainte pour souligner sa décision d'être une fille bien qui n'aurait pas de relation charnelle avant le mariage. L'artiste sait donner vie à toutes les femmes qui témoignent, leur donnant une apparence normale, avec des vêtements en cohérence avec leur âge et leur statut social, le temps qu'il fait et leur occupation. Les tenues décontractées des jeunes avec des sweatshirts à capuche, les vêtements plus stricts des adultes, et bien sûr les foulards et les robes longues. Chaque femme qui témoigne présente une personnalité visuelle différente : détendue pour Nour, plus sérieuse pour la théologienne Asma Lambaret quand elle explique différentes interprétations d'une sourate, désenchantée pour la prostituée, accablée pour la jeune homosexuelle.

En surface, le lecteur peut avoir une première impression de dessins un peu simplifiés pour une apparence peut-être naïve, avec des couleurs un peu douce. Mais dès qu'il commence à lire, il se rend compte de l'expressivité naturelle des visages, des états d'esprit qui transparaissent au travers des postures et du langage corporel, de la justesse des représentations. Il voit bien l'âge de Jamila la maîtresse de maison en page 53 dans sa façon de se tenir, et la jeunesse de l'homosexuelle dans ses gestes. Effectivement les autrices mettent à profit les spécificités de la bande dessinée pour restituer les témoignages : à la fois en donnant corps aux femmes qui racontent, à la fois dans les différents lieux. La représentation de ces derniers est tout aussi soignée que celle des individus : l'hôtel de Rabat avec sa piscine dans un dessin en pleine page, la salle de classe avec une partie des élèves portant le foulard, le cabinet de consultation d'une docteure dans un hôpital à la campagne, la salle d'attente d'un médecin pratiquant des interruptions volontaires de grossesse, une rue piétonne en escalier, une bibliothèque municipale, des intérieurs banals d'appartement et de maison, la plage, l'esplanade de la tour Hassan à Rabat, une grande artère de Casablanca, le front de mer, un jardin public, etc. Laetitia Coryn ne représente pas ces lieux comme s'il s'agissait de tourisme, mais bien comme des lieux de vie, où évoluent des individus normaux dans leur quotidien. le lecteur peut ainsi se projeter dans chaque endroit, s'imaginer dans ces lieux de vie comme un habitant.

La narration visuelle prend une forme naturaliste, recréant ainsi les conversations comme si elles étaient prises sur le vif, avec l'environnement dans lequel elles se déroulent, et des êtres humains normaux pour lesquels il est possible de se faire une idée de leur état d'esprit en les regardant comme dans la vie de tous les jours avec un interlocuteur. Évidemment le lecteur a conscience qu'il ne s'agit pas de la retranscription exacte des conversations, que le récit est construit et qu'il y a une progression. Leïla Slimani commence par le témoignage d'une femme ayant pris ses distances avec la tradition, pouvant évoquer en quoi celle-ci pèse sur le quotidien des femmes marocaines, totalement intégrées à la société, puis comment elle pèse implicitement sur celles qui ne s'y conforme pas parfaitement. Par la suite, les témoignages vont évoquer les violences sexuelles faites aux femmes sous différents formes et la honte qui pèse sur elle (Hchouma), la question de la virginité pour le mariage, les articles de loi relatifs à l'avortement (449, 454, 455), les mariages arrangés de mineures, la réalité des textes du Coran et leurs interprétations, les événements du fol été 2015 (le film Much Loved du réalisateur Nabil Ayouch, le concert de Jennifer Lopez, le baiser de deux femens sur l'esplanade de la tour Hassan à Rabat, l'agression d'une femme portant une tenue jugée provocante), la réalité de la prostitution, l'impossibilité de vivre publiquement son homosexualité. de même, l'autrice ne fait aucun secret de sa prise de position.

Leïla Slimani met en lumière le poids de la tradition sur la condition féminine, l'impossibilité de la virginité des mariées, le poids du regard des autres et de la honte, une culture institutionnalisée du mensonge, de l'hypocrisie. Elle représente la position de la femme comme suit : Avant d'être un individu, une femme est une mère, une soeur, une épouse, une fille, garante de l'honneur familial, et, pire encore, de l'identité nationale. Sa vertu est un enjeu public. C'est donc un exposé à charge contre cette culture. de temps à autre, elle laisse la parole aux hommes, ceux qui estiment que cette place donnée aux femmes est nocive pour les femmes, mais aussi pour les hommes car les rapports entre les deux s'en trouvent faussés. Elle relaie également la position des hommes respectables qui perçoivent la remise en cause comme étant le fait d'occidentaux. L'un d'eux demande : Les philosophies permissives, nées en Europe, ont-elles amélioré les relations sociales et familiales sur ce continent ? Plus loin une femme constate que la misogynie est inhérente à l'humanité. Elle n'est pas spécifique à l'Islam. Elle s'étonne d'ailleurs qu'on ait encore ce type de lecture anthropologique. À ses yeux, toutes les religions se valent en matière de sexualité. En outre, ce ne sont que certains hommes qui ne comprennent pas la différence entre faire le choix d'avoir une sexualité et consentir à un acte sexuel. Il n'y a donc pas de diabolisation de la gent masculine, ni condamnation d'un bloc de la religion : la théologienne estime qu'il est possible d'enseigner la religion comme une éthique de libération, d'émancipation, plutôt que comme une morale rigoriste et sans nuances. Il faut parvenir à sortir d'une dichotomie manichéenne qui voudrait qu'il n'y ait pas d'intermédiaire entre la femme vertueuse et la prostituée. En fonction de sa sensibilité et de sa culture, le lecteur peut également s'interroger sur l'histoire personnelle de l'autrice, sa double nationalité, sa classe sociale, la manière dont cela a façonné son regard et ses positions.

Assurément, cette lecture interpelle. L'écrivaine propose une vision construite, intelligente et analytique de la sexualité féminine d'un point de vue sociale au Maroc. La narration visuelle est à la fois douce et dense, donnant l'impression au lecteur de se trouver aux côtés de Leïla écoutant ces confidences, dans chaque lieu correspondant. Même s'il ressent qu'il s'agit d'un récit composé à partir de témoignages recueillis et présentés de façon structurée, pas d'un reportage sur le vif, que l'autrice a un parti pris affiché, il n'en demeure pas moins une réflexion sur l'image à laquelle la femme doit se conformer dans la société marocaine, ou ce qu'elle doit se préparer à affronter si elle ne souhaite pas s'y conformer.
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Alors qu'elle présentait son dernier roman au Maroc, Leïla Slimani a rencontré de nombreuses femmes qui se sont confiées sur leur vie intime. Cela a donné l'essai Sexe et mensonge, ici adapté en bande dessinée. Sur la base de ces rencontres, de ces échanges et de ces témoignages, l'autrice fait émerger une parole vraie et brute. « J'ai découvert à quel point la législation sur la sexualité et, de manière générale, la pression sociale exercée sur le corps pouvaient rendre difficile l'émancipation des femmes dans mon pays. » (p. 5) La dessinatrice a donné des visages à des femmes anonymes et l'autrice a fait entendre leur voix. Dans un pays où la hchouma (la honte) pèse sur toute chose, ce sont des générations qui s'accommodent comme elles le peuvent des interdits et du désir de transgression. « Tout le monde baise. L'important, c'est de le faire discrètement. » (p. 24)

Outre l'homophobie explicite et l'obsession hypocrite pour la virginité féminine avant le mariage, Leïla Slimani pointe la façon dont le message premier du Coran a été dévoyé, à force de traductions et d'interprétations patriarcales. Exit la sensualité du texte, bonjour la condamnation violente et dogmatique de l'avortement, de l'adultère et de la prostitution. « Être bien élevé, être un bon citoyen, c'est aussi avoir honte. » (p. 13) La culture de viol est omniprésente : l'agresseur n'est jamais en tort tandis que la victime porte tout le blâme. le désir et le plaisir sont diabolisés, autant pour l'homme que pour la femme. « Je suis fatiguée d'entendre comparer la femme à un bijou, à un joyau ou à un bonbon qu'il faudrait enrober pour la préserver des regards concupiscents. On peut l'enfermer, l'emprisonner, c'est toujours pour son bien, toujours pour la protéger. » (p. 48)

Heureusement, Leïla Slimani note aussi que le Maroc change. Les jeunes générations se cachent moins, prennent ouvertement la parole et revendiquent des droits et des espaces nouveaux. « Si les femmes n'ont pas pris la pleine mesure de l'état d'infériorité dans lequel elles sont maintenues, malheureusement elles ne feront que le perpétuer, encore et encore. Alors il faut en parler. le plus possible. » (p. 57) L'évidence est martelée : l'honneur n'est pas dans la honte, mais dans le respect de soi et des autres. Avec cette bande dessinée reportage, l'autrice appelle à l'ouverture des esprits et à l'assouplissement de la morale. L'objectif est clair : la libération de la femme et, avec elle, celle de l'homme qui est contraint par un modèle patriarcal. « Il reste à inventer la femme qui ne serait à personne, qui n'aurait à répondre de ses actes qu'en tant que citoyen lambda et pas en fonction de son sexe. » (p. 101)

Cette lecture rejoint évidemment mon étagère de lectures féministes ! de l'autrice, je vous recommande le roman Chanson douce.
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Leïla Slimani nous livre les histoires confiées par de nombreuses femmes rencontrées au Maroc, sur leur vie amoureuse, sexuelle, dévoilant l'hypocrisie et la domination d'un système patriarcal qui les oppresse.
Un témoignage nécessaire , comme le dit si bien Mona Eltahawi dans la BD :"si les femmes n'ont pas pris le pleine mesure de l'état d'infériorité dans lequel elles sont maintenues, malheureusement elles ne feront que le perpétuer encore et encore. Alors il faut en parler".
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Elle s'était rendue au Maroc afin de présenter son livre "Dans le jardin de l'ogre"..., (que je dois lire), un livre abordant des questions de sexualité.
Là des femmes l'interpellent. Des femmes qui osent lui parler de cette question tabou, témoigner de leur condition de femmes, des conventions de cette société marocaine machiste. Parler du regard des hommes, de l'hypocrisie généralisée. Évoquer cette société qui exige la virginité de la jeune mariée, et qui punit donc, par son Code Pénal à la fois la prostitution, l'homosexualité, les relations hors mariage...Et bien sûr les IVG, quelles que soient les personnes qui les ont pratiquées, médecins, faiseuses d'anges ou IVG pratiquée sur elle-même par la femme enceinte..
La femme doit se présenter "pure" à son futur mari, futur mari, qui aura cherché par ailleurs toutes les occasions, toutes les possibilités pour assouvir ses désirs, ses pulsions sexuelles..."Sont punies d'un mois à un an d'emprisonnement toutes personnes de sexes différents qui n'étant pas unies par les liens du mariage, ont entre elles des relations sexuelles..."
Sujet tabou dans cette société machiste, sujet d'hypocrisie acceptée et clamée haut et fort par les hommes... "J'ai le droit de vouloir à la fois baiser et me marier avec une vierge" ....
Ah! cette sacro-sainte virginité protégée et imposée par les pères et les mères, voulue par les hommes, par ces conventions sociales qui imposent également aux femmes de tout âge, de plus en plus, ce voile sujet de débat sous nos cieux ! Autre débat...
Le livre aborde ainsi les viols, les violences faites aux femmes ayant fauté, violences pouvant aller jusqu'au lynchage, jusqu'à la mort de la femme impure. Il décortique toute l'hypocrisie de la société, des hommes marocains, des pères et également des mères, du Code Pénal marocain, et toutes les questions qu'affrontent ces jeunes femmes, étudiantes ou non, qui auront des relations sexuelles hors mariage avec un homme qu'elles aiment. Homme qui pourra les larguer.Heureusement qu'il y a la sodomie !
Dans ces concours d'hypocrisie, il ne faut pas oublier, celle de certains médecins masculins. Indigne ! Mensonges à tous les étages de la société !
Leila Slimani a ainsi rencontré des femmes de toutes conditions, des jeunes et moins jeunes, des prostituées, des étudiantes. Leila Slimani a sélectionné les entretiens les plus forts, traitant sans tabou et sans censure, toutes les questions, renvoyant la société marocaine à son hypocrisie. Laetitia Coryn a mis toutes ces rencontres en images...Une dessinatrice dont les autres titres m'attirent.
Livre lu en un peu plus d'une heure..J'ai éprouvé le besoin de le lire plusieurs fois...les dessins sont expressifs, et complètent utilement chacun des propos tenus...
Un bon moment de plaisir.. et de questionnement. Puisse-t-il être lu également au Maroc
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Ce « roman graphique », qui n'en est pas totalement un, me fait irrémédiablement penser à Persepolis de Marjane Satrapi. Si le dessin est moins noir, la situation décrite, elle, ne l'est pas moins.

Avec le rappel des événements de 2015 dont, pour la plupart, je dois avouer que je les avais oubliés, mais, surtout, avec la parole de ces femmes qui racontent leur quotidien, on découvre une société marocaine marquée par une incroyable misère sexuelle. Et, alors que certains marocains font preuve d'une redoutable hypocrisie – ils n'hésitent pas à braver l'interdit pour « coucher », mais attendent cependant de celle qu'ils épousent qu'elle arrive vierge au mariage -, ce n'est malgré tout pas à un procès des hommes. En effet, l'émotion, la colère, la révolte n'empêche pas Leïla Slimani de donner aussi la parole à ces hommes qui, eux-mêmes, souffrent de cette morale rigoriste qui empêche tous les marocains, hommes ou femmes, de vivre pleinement leur vie.

Le texte est brut, parfois brutal, et toujours sans fioritures. Mais ce sont les témoignages qui veulent cela. Comment imaginer autre chose ?

L'un des moments qui illustrent bien le côté paradoxal de la situation, pour moi, c'est le moment où Asma Lamrabet, directrice du Centre des études féminines en islam, souligne le fait que les marocaines ne veulent plus être considérées comme des bijoux ou des bonbons. Car, si cela peut sembler galant, c'est surtout mis en avant pour justifier de les maintenir dans un carcan, un écrin « protecteur ».

Et les dessins sont à l'avenant : certains présentent les couleurs vives des villes marocaines, d'autres sont plus ternes, pour souligner l'ambiance sombre, d'autres enfin sont plaqués sur un fond blanc, clinique. On a parfois une profusion de détails, parfois quelques lignes seulement. Ce n'est pas forcément le genre de dessin que j'attends pour une bande dessinée, mais dans ce contexte là, cela m'a convenu.

Par dessus tout, l'importance et l'intérêt de ce livre, c'est son message de tolérance et sur l'importance de libérer la parole de toutes ces femmes, écrasées par des maris violents, soumises à une pression religieuse, familiale et sociale absolument terrifiante.
Lien : https://ogrimoire.wordpress...
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Dur, dur de rester de marbre face à ces confidences de femmes marocaines, ou d'hommes. Quand l'acte sexuel est placé sous la coupe de la religion, quelle qu'elle soit, cela ne donne jamais de bons résultats.

Leila Slimani mène l'enquête. de rencontres en interviews se dresse le portrait de la sexualité marocaine, longuement serinée, imposée, martelée dès le plus jeune âge. Cette image de la sexualité qui fait que les garçons couchent mais épousent des vierges. Celle qui fait répudier les filles qui s'assument. Celles qui pratiquent la sodomie pour rester "pures". Ou celles qui optent pour l'homosexualité. Ne parlons même pas de transgenre. L'idée que le sexe est "sale", que l'épanouissement sexuel est perversion... c'est une idée largement imposée par la réligion, peu importe laquelle.

Leila Slimani dicute avec des femmes, mais aussi quelques hommes, et dresse un portrait sans concession d'une société prise en étau entre religion, modernisme, tradition et évolution des moeurs. Dur, dur d'être une femme.

C'est impressionnant, percutant, cela prend aux tripes, laisse un goût amer en bouche, cela donne envie de changer le monde, de se révolter. C'est un peu comme si je n'avais attendu que cet instant pour lire Leila Slimani.
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Il s'agit ici de témoignage sur la sexualité au Maroc, plus particulièrement la sexualité des femmes. Les lois liberticides, la chape de la hchouma, le poids de la religion, la régression depuis le XVe siècle et le souhait de libération de la jeune génération. Ce sont de beaux portraits de femmes qui nous sont proposés ici, vivantes, modernes, assoiffées de liberté.
Leïla Slimani adapte ici son propre texte en bande dessinée. Pour cela elle a voyagé avec Laetitia Coryn, l'illustratrice pour donner visage à ces femmes, recréer l'ambiance. Et c'est plutôt réussi. Pour chaque rencontre, le début est le même : un plan large pour donner le cadre et un zoom en 2/3 vignettes pour rejoindre les protagonistes. Et là on ne quitte plus les femmes qui nous racontent leur histoire.
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Une BD qui nous propose d'explorer notre rapport à la sexualité,
Peut on la vivre sereinement en France et .... au Maroc ?
Une BD c'est à la fois,
un texte, qui traite ce sujet difficile en portant une vraie réflexion,
des dessins, qui illustrent les propos en soulignant leurs pertinences,
des couleurs, qui aident à comprendre.
Un très bel ensemble !
Dans le détail, une BD organisée en chapitres, l'existant, les faits, les solutions, l'espoir !

Pour commencer, il y a l'importance de libérer la parole avec
Un drôle de mot qui n'avait pas encore croisé ma route, hchouma.
Un recours à Me je sais tout : inconduite qui suscite la honte, le scandale. "Avoir un comportement que la communauté qualifie de hchouma consiste à se déconsidérer et à entrainer la désapprobation, le discrédit sur soi.".
Autre exemple : "C'était hchouma de veiller tard le soir avec son fiancé, hchouma de paraître en tenue négligée devant ses beaux parents, hchouma de danser en public…"
Un constat juridique qui montre le fossé entre les mentalités de nos deux pays :
Le code pénal marocain avec son article 490 : "sont punies d'un mois à un an d'emprisonnement toutes personnes de sexes différents qui, n'étant pas unies par les les liens du mariage, ont entre elles des relations sexuelles".

Puis il y a l'exposé des faits qui obligent à réagir, "le fol été 2015", la mise en image des incidents qui ont déclenchés des réactions disproportionnées de certains hommes, mise en scène violente, image violente, texte écrit au cordeau.

On cherche une solution, une piste, une voix pour se sortir de ce bourbier.
Changer le regard de l'autre.
Un mot harām, m'interpelle : illégal, illicite, interdit, inviolable, sacré. Ce vocable a deux sens en arabe et dans le monde musulman. D'un côté il signifie l'interdiction, de l'autre il signifie sacré.
Il faut réfléchir à ce qu'est le regard de l'autre, réfléchir au moyen de le modifier, de le faire évoluer et surtout ne jamais baisser la garde.

Puis il y a ce qui reste à faire.... un long chemin !
Comment mettre des mots sur ce qui est si bien dit et imager
"Nous ne pouvons plus nous permettre d'ignorer égalité sous prétexte qu'elle n'est pas conforme à la religion, à la loi, ou tout simplement à l'image que nous voudrions donner de nous mêmes."
"Notre société est minée par une culture institutionnalisée du mensonge, de l'hypocrisie."
"Il reste à inventer la femme qui ne serait à personne, qui n'aurait à répondre de ses actes qu'en tant que citoyen lambda et pas en fonction de son sexe."

Pour clore le livre, une biographie de ces femmes et de ces hommes qui essaient de faire évoluer la société marocaine.

Et une si belle conclusion :
"Ce pays changera !
Et j'ai vraiment espoir...."
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