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Critique de karmax211


Ce roman de Slocombe est riche et dense.
Pour ceux qui connaissent l'écrivain, cette phrase d'introduction doit résonner.
Si j'ajoute qu'il s'inscrit dans son projet d'écrire " un grand roman national ", que le narratif se situe en juillet et août 44 à Paris, que ledit roman nous offre 700 pages mêlant Histoire et fiction, ça doit résonner davantage encore.

Aussi vais-je m'efforcer d'éviter le piège dans lequel une telle somme invite un bavard comme moi à tomber...et me limiter pour une fois à l'essentiel.

Ce projet d'écriture est à ce jour composé de huit romans dont - dans un ordre qui correspond à ma perception chronologique ou tout au moins à l'ordre dans lequel j'aurais aimé les lire... ordre que je vous recommande - - La débâcle - ( beaucoup aimé ), avant d'entamer la saga Sadorsky, je lirais - Monsieur le commandant - ( excellent ! ), puis j'irais vers la saga avec - L'affaire Léon Sadorsky - ( apprécié ) ), - L'étoile jaune de l'inspecteur Sadorsky - ( pas mal du tout ), - Sadorsky et l'ange du péché - ( bon aussi ), - La Gestapo Sadorsky - ( du bon également ), - L'inspecteur Sadorsky libère Paris - ( je vais vous donner mon avis ) et - J'étais le collabo Sadorsky - ( que j'ai chez moi mais que je n'ai pas encore lu ).
Romain Slocombe utilise dans six de ces huit romans un petit bonhomme tout ce qu'il y a de plus abject, de plus veule, pour se donner la possibilité de raconter cette France qui va de la débâcle de juin 40 à la libération puis à " l'épuration ".
Ce petit être infect, c'est Léon Sadorsky, IPA ( inspecteur principal adjoint ) à la PP ( préfecture de police ) de Paris où il a pour tâche de ramener des " crânes " et des " becs crochus " ( nulle explication n'est ici nécessaire...).
Ce pétainiste de la première heure, cet antisémite acharné, est une image mosaïque de quelques bas instincts qui ont pu sévir durant cette période sombre de notre histoire.

Comme je me suis promis d'être bref, je ne vais pas révéler aux prochains lecteurs de Slocombe ce qui les attend dans les romans précédemment mentionnés.
Au moment où débute ce volet de la saga Sadorsky, l'IPA vient de passer huit mois entre les mains brutales de la Gestapo et les geôles de la pénitentiaire parisienne.
Son affaire et son jugement traînent.
Sadorsky se lamente sur son sort, pleure, implore et propose les marchandages les plus infâmes pour s'attirer les bonnes grâces de ses bourreaux...
Une opportunité va s'offrir à lui.
Le deal pour retrouver liberté et " virginité " va consister à se faire passer pour un gestapiste ( d'ascendance alsacienne, il parle un allemand correct ) et intégrer l'escorte qui doit transférer " le juif Mandel " ( Georges Mandel, ex-ministre de l'Intérieur du gouvernement Paul Reynaud ) de sa prison parisienne à Vichy.
Ce transfert intervient peu après l'assassinat de Philippe Henriot, figure de la collaboration et propagandiste de Laval, par la Résistance française.
Sadorsky, grâce à son flair, craint le coup monté... mais entre croupir en prison et tenter de retrouver ses " deux amours " que sont Yvette, sa femme, Julie, la jeune juive qu'il cache depuis la Rafle du Vel' d'Hiv le 16 juillet 42 et le petit Bernard, le fils que lui a donné la pauvre gamine après des rapports qu'on qualifierait de nos jours " d'abusifs ", elle qui n'a en 44 que 17 ans..., il n'hésite pas.
Nous sommes le 7 juillet 1944, les Alliés sont aux portes de Caen...la libération approche...

Autant parmi tous les titres que j'ai cités comme faisant partie du " grand roman national " voulu par son auteur, tous à l'exception du dernier que je n'ai pas encore lu, donnaient la part belle à l'action, laquelle s'insérait parfaitement dans L Histoire, autant - L'inspecteur Sadorsky libère Paris - trébuche cette fois sur la volonté de Slocombe de tout raconter de cette libération de la capitale...allant piocher dans une documentation fournie une foultitude de détails qui oblige Slocombe-Sadorsky à être partout à la fois...
Sadorsky est, sans mauvais jeu de mots, sur tous les fronts... de l'embuscade tendue par la milice à Georges Mandel à Fontainebleau, à l'antenne gestapiste de la rue de la Pompe, dirigée par le sinistre Friedrich Berger, en passant par la bronzette et les baignades sur les quais de la Seine en ce mois d'août caniculaire, à ses pédalades effrénées dans Paris qui se libère...et où Slocombe le fait passer dans chaque quartier, chaque boulevard, chaque rue... s'il n'y passe pas, il voit tous les évènements marquants... de loin ou des témoins les lui racontent.
Cerise sur le carrot cake, le plum pudding ou le Strudel, il a le temps d'enfiler le brassard des FFI, de voir sa femme tondue et embarquée avant de se retrouver lui-même aux mains de ses ex-collègues pour péché de collaboration...
Bref, Slocombe a cédé à la tentation du trop-vouloir-bien-faire, privilégiant l'historique au romanesque.
Slocombe a trop exigé de Sadorsky qui devient homme à tout faire, à tout voir, à tout savoir ( normal pour un flic, me direz-vous )... à trop faire et à trop voir ; la crédibilité en prend un coup...

Cela étant, lorsqu'on est arrivé à ce moment de la saga, même si - L'inspecteur Sadorsky libère Paris - en est le volet faible de mon point de vue, sa lecture un peu " too much " ne dissuade pas de poursuivre l'aventure avec un romancier qui jusque-là a fait ses preuves dans le domaine du polar historique.
Une leçon d'Histoire... ce qui n'est jamais à dédaigner...Slocombe excelle dans l'art de nous restituer par le menu ce Paris des années 40.
Comme pour chacun de ses romans, il réussit à mettre le lecteur en immersion, devenant spectateur d'évènements qui ont marqué et dont les échos se répercutent aujourd'hui encore dans la France et dans l'Europe de 2023.
Mon bémol, je l'ai dit, c'est que trop d'Histoire nuit à l'histoire...
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