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Critique de ElGatoMalo


Oui, étonnant bouquin qui commence non pas par un prologue mais deux. Aussi frustrant l'un que l'autre, ça appate fort le client ! Et puis on continue par le premier chapitre qui titre 'L'Appel'. Comme il est question d'universitaire et d'école, on suppose que la superbe brune que l'on imagine facilement comme une Kate Beckinsale avec des cheveux longs et bouclés (bouclés, pas sûr que ça aille à Kate, peu importe quand c'est une brune canon, c'est Kate que j'imagine ; mais je m'égare...), on suppose donc que ce professeur va faire l'appel. Ce qui se fait dans les établissements publics d'enseignement, non ? Alors voilà qu'en plus, juste après ce titre, on nous annonce qu'il est telle heure et qu'il va se passer quelque chose de terrible dans 6 minutes 13 secondes. Là, franchement, j'ai un peu décroché. J'ai toujours considéré le langage comme un outil de communication, donc, quelque part, je m'attends à ce qu'une information, si elle est donnée, soit en relation de cause à effet avec le reste de ce qui apparaît dans le chapitre. Ce que que je veux dire, c'est que l'auteur ne donne aucune raison de commencer à cet instant-là et d'instaurer un délai. Avec précisément cette durée. A quoi sert-elle ? Est-ce qu'il faut lire le livre en temps réel ? Il nous est donné officiellement 6 minutes 13 secondes pour avaler à très grande vitesse les pages qui nous séparent de l'évènement annoncé mais pas défini quoique qualifié ? Dans ce cas-là, il faut être plus explicite. Par exemple, qu'est-ce qui se passe si on traine un peu dans la lecture et que l'on dépasse le temps imparti ? On doit sauter des pages pour être pile poil au rendez-vous ? Et même ! Combien de pages ? Et puis personne n'a dit qu'il fallait s'armer d'un chronomètre pour lire ce bouquin... enfin bon, c'est du grand n'importe quoi ! Dans le genre pisse copie, je préfère encore Guy des Cars... Me voila donc devant cette heure arbitraire au degré zéro de l'information et je suis déjà en train de me dire que ce bouquin pourrait facilement perdre quelques pages si tout le reste suit le même modèle. Et puis je comprends : c'est juste un effet. Même pas un effet de style. Juste un effet. Comme au cinéma quand les héros sont dans une voiture avec un chat et une bombe à retardement dans un parking en sous-sol. le réalisateur se débrouille pour que l'on voit le chronomètre et que les chiffres défilent à toute vitesse. Est-ce qu'il faut couper le fil bleu ou le fil rouge ? C'est une forme de manipulation : cette annonce installe un chronomètre sur mon écran intérieur perso celui où je me projette le film de l'histoire que me raconte le romancier. Pour que l'adrénaline monte en flèche ! Sauf que moi, ça ne me fait pas monter l'adrénaline : ça me stresse !! Parce que ça me brouille la comprenette cette histoire de timing ! ça me laisse pas tranquille !! Pourquoi 6 minutes 13 exactement ? Pourquoi pas 7 ? ou 5 ? ou 20 ? ou n'importe quoi ?! Non mais ... et 13 secondes... en plus ! Je n'ai pas envie de savoir ce qui va se passer plus loin, j'ai besoin de savoir pourquoi il faut commencer là, précisément à 11h12. Pourquoi ce repère dans le temps est-il important ? ou alors il ne l'est pas... outre la manipulation mentale, il y a peut-être une connotation à envisager. L'auteur me dit indirectement " mon p'tit gars, j'écris sur la physique et, donc, je vais être rigoureux comme doit l'être un scientifique - et je sais que tu as déjà pris connaissance du postscriptum où je remercie un certain nombre de physiciens d'avoir relu mon texte pour vérifier que je ne disais pas trop de bêtises - alors sors le caméscope JVC, Marty, et enregistre ce qui se passe. Il est 11h12 précisément et ceci est une expérience temporelle...
Moi (en Mickael Fox, je laisse un moment ma fourrure de chat pour celle du renard) :
- Mais Doc, pourquoi 11h12, précisément ?
Le Doc (en fait, Somoza en doc Braun) :
- Aucune importance, Marty ! C'est le hasard ! ça ne s'explique pas. Comme les constantes de l'univers, peu importe que ce soit 11h12 ou 11h13, c'est un fait précis, un évènement correctement situé dans le temps. Comme les limites d'un référentiel. C'est objectif ! Pas d'interprétation possibles, pas de poésie, pas de métaphore ou d'allégorie. Des jalons qui marquent un cadre de référence où se déploie notre réalité."
Moi (en Mickael Fox... pas convaincu mais diplomate) :
- C'est vous le doc, Doc. C'est vous qui savez."
Je me colle le caméscope sur l'épaule et je commence à filmer - en clair, je lis la suite. Et voilà le doc, sous les traits de cette charmante doctoresse qui me fait la leçon sur les dimensions imbriquées ou supplémentaires. Il y a même un dessin, vraiment dans les pages du livre. Plusieurs. La pédagogie ça fonctionne mieux avec des images. Je filme sans piper mot mais bon, c'est quand même le retour de Mal Dessiné ou de Patafil... en plus, c'est même pas cohérent : il est question d'un exemple où un bonhomme en 2D gagne des euros en 3D. Mieux, ce petit personnage, met ses économies sous clé. Déjà, si on accepte les données de base d'un univers qui n'aurait vraiment que deux dimensions, bravo ! pour plusieurs raisons : premièrement, c'est une sorte de génie ou de mutant capable de manipuler un objet qui n'appartient pas à son univers. Faut être logique car soit on a seulement deux dimensions et notre monnaie est aussi en deux dimensions, soit on est déjà conscient de l'existence d'une autre dimension supplémentaire, voire même d'un autre univers avec trois dimensions celui-là, puisqu'on y fait frapper monnaie (seconde raison de saluer l'exploit : le petit bonhomme en fil de fer 2D a quand même réussi à organiser une transaction commerciale entre deux univers). Autre question à laquelle il faudrait apporter une réponse : combien d'épaisseur d'univers en 2D faut-il empiler pour obtenir l'épaisseur dans la troisième dimension d'une pièce d'un euro ? Je conjecture une infinité ce qui me paraît quand même beaucoup (l'équation à poser serait du type combien de fois faut-il que j'ajoute zéro pour obtenir quelque chose ? Pour un mathématicien, ça n'a pas de sens, pour Raymond Devos, c'est une autre histoire sachant qu'avec une fois rien, on a rien avec deux fois rien on a toujours rien mais avec trois fois rien on peut faire quelque chose !!) et rend totalement délirant le prix de revient de fabrication d'une telle pièce... et puis surtout comment, un personnage en deux dimensions aurait-il pu empiler ces épaisseurs (qui n'existe pas soit dit encore en passant) dans cette dimension supplémentaire dont il ignore tout. Bon, hum.... comme exemple de cours de ce qui est présenté comme une héroïne qui serait en quelque sorte la fille cachée d'Albert Einstein et de Stephan Hawkins, je trouve que c'est un peu faiblard... Mais faut pas trop s'étonner, ça sent l'improvisation à plein nez ! D'ailleurs, elle se met à lire le journal pendant le cours ! Voilà qui signe son manque de sérieux et donne encore une image peu reluisante du corps enseignant.

Jusque là - vingt pages - je ne suis pas enthousiaste sur la qualité du bouquin. Pourtant des livres avec des contenus pédagogiques intéressants, j'en ai eu sous la main. Par exemple, j'ai appris à faire de la trigonométrie appliquée avec l'île Mystérieuse, à résoudre un labyrinthe sans erreur possible dans le Nom de la Rose et ça marche vraiment (un agrégé de math a donné cette solution ultime dans l'émission On n'est Pas que des Cobayes il y a quelques temps). A programmer en basic - il y a plus d'un quart de siècle quand j'ai commencé l'informatique - un logiciel d'anagramme dans le Pendule de Foucault. Mais là, je dois avouer que je suis un peu déçu et que plutôt que d'avancer dans la découverte du livre, j'ai plutôt eu envie de faire partager mon ressenti à ce sujet.

Post Scriptum

Sans rien révéler de l'intrigue, le reste du livre ressemble aux vingt premières pages : le paradoxe des dimensions imbriquées les unes dans les autres - ce qui pourrait se concevoir si la plus petite se trouve dans la plus grande - ne semble pas trop gêner l'auteur qui développe une théorie des cordes où une corde unique et indivisible pourrait contenir à volonté un ensemble de cordes infiniment plus grand. Mais si elle est indivisible comment peut-elle contenir toutes les autres ? Il ne faut trop espérer de la cohérence dans tout cela. On est plutôt dans du fantastique moyennement horrifique quoique le suspense soit peu soutenu par une écriture poussive qui conduit à un dénouement encore moins crédible que l'argument scientifique. Il y avait peut-être de quoi faire une nouvelle mais l'étirer sur six cents pages, quelle drôle d'idée ? Vraiment pas le bouquin que j'emmènerais sur une ile déserte ...
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