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Citations sur Les sirènes noires (34)

Arrivés à un certain niveau, les emmerdements ne s'additionnent plus, ils se multiplient.
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Dès l'instant où tu leur dis qu'ils vont être inondés de billets de banque, tout se passe bien ! Ils n'écoutent même plus la suite. Et pour que mon business continue de marcher, j'expédie de temps en temps un billet de cent dollars aux mères. Snoop, sans elles, rien n'est possible !
-Cent dollars ? Mais c'est rien, vu c'quelles te rapportent !
- C'est les mères qui m'proposent leurs enfants et qui m'les vendent ! Elles disent entre elles : "ma fille est en Europe, elle m'envoie des sous. Celle qui est à l'école Est-ce qu'elle peut faire la même chose ? Non, et en plus elle coûte de l'argent !"
- Tu l'as payée cher, la gamine ?
- Cinq cents dollars. J'ai fait une affaire. La mère voulait m'en vendre d'autres, mais j'aime pas acheter dans les mêmes familles. J'lui enverrai du cash dans un mois, c'est bien de les faire attendre. Elle remboursera au village la cérémonie du sorcier et aura l'impression d'être riche avec les trois cents restants.
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Le policier se jeta à l'eau, conscient du ridicule dans lequel il se trouvait, discutant avec une vieille prostituée qui avait transformé le bureau d'un service de police en fumoir et s'apprêtant à lui parler de surnaturel. Dalmate s'exprima davantage pour lui que pour la femme.
- C'est là que ça devient compliqué... On rentre dans le domaine des sorciers et de la magie. Je sais, c'est fou ce que je vous raconte en ce moment, mais c'est la tournure que prend l'enquête.
- Ah bon ? Comme pour les petites Nigérianes ?
- Qu'Est-ce que vous dites ? s'exclama-t-il, étonné.
- Tiens donc, monsieur le flic balafré qui réagit enfin ! Stella m'a vaguement raconté que toutes les prostituées africaines sont tenues par un serment prononcé devant un sorcier dans leur pays, le "djudju", une sorte de cérémonie vaudoue, quoi ! Si elles parlent, elles deviennent folles, des malheurs s'abattent sur leur famille. Un tas de conneries, mais elles y croient dur comme fer ! C'est pour ça qu'elles causent jamais aux flics. Une prison mentale, si tu veux !.....
Bon, aller, et essaye de tirer d'la ma sirène noire.
- Sirène noire ?
- Ben ouais, j'les appelle comme ça, les p'tites Africaines qui tapinent, parce qu'y en a plein au fond d'la Méditerranée, quand les barcasses qui les transportent coulent à pic. Elle n'ont pas eu d'chance, enfin si on peut parler de chance quand on finit sa vie sur le trottoir !
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Margaret commençait à ne plus se sentir très bien. Elle aurait voulu être ailleurs, renoncer à tout ce qui l'attendait : la richesse, les bijoux, la maison, un mari, des enfants, un travail intéressant chez les Blancs. Elle hésitait à fuir, se demandant si ses jambes pouvaient encore courir. Elle sentait les mains de la femme qui la serraient avec affection, certainement une trop grande affection, parce que Margaret ne pouvait s'extraire de cette poigne si forte. En réalité elle n'y songeait même plus. Sa mère s'était endettée auprès de la plus grande partie du village pour payer les deux cents dollars de la cérémonie. Si elle s'enfuyait, elle serait bannie et la honte retomberait sur sa famille pendant des générations. Margaret devenait prisonnière de la parole et de la dette de sa mère.
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- Tu as lu la presse ?
L'ancien professeur tenait sa tasse à deux mains, comme agrippé à une bouée. Il opina.
- Si tu as lu, tu sais presque tout. Sauf une chose. Lors de l'autopsie, j'ai appris que les corps étaient particuliers. C'étaient ceux de deux....
.... albinos.
- Tu t'en doutais ?
- Non, jusqu'à ce que j'apprenne par la radio qu'il s'agissait d'un couple d'Africains découpés en morceaux. Alors là, je me suis dit...
Le Carme reprenait progressivement vie. La passion de l'Afrique ne l'avait jamais quitté.
- A ma connaissance, il n'y a jamais eu de telles pratiques en France. En Afrique ce processus est très connu, surtout en Tanzanie et au Burundi où les albinos sont plus ou moins massacrés, surtout à l'approche d'élection.
- Hervé, tu mesures ce que tu racontes ?
- Ludovic, tu ne comprendras jamais rien au monde qui t'entoure ! Il faut que tu mesures bien que, dans certains pays d'Afrique, lorsqu'un être blanc naît de deux parents noirs, c'est forcément surnaturel ! Et là, la magie s'en mêle, elle est très puissante, et rien ne l'arrête. Les organes des albinos, utilisés pour des rituels de sorcellerie ou dans la confection de philtres, sont vendus aux sorciers ou aux guérisseurs.
Ludovic hocha la tête et interrompit le professeur.
- Le médecin légiste qui a pratiqué les autopsies m'en a parlé. Albinisme et meurtres rituels, je découvre la chose sans y croire.
Le Carme poursuivait le développement de ses réflexions sans répondre directement à l'interruption de Mistral.
- Ces pauvres albinos sont victimes de superstitions ancestrales qui malheureusement attribuent des vertus magiques à leur corps...

...Silence entre les deux hommes. Le professeur perdu dans la fantasmagorie africaine, Mistral accroché au rationalisme pur et dur d'un Occidental du XXIème siècle. Le Carme se gratta la gorge, avala un peu d'eau et poursuivit.
Même les candidats aux élections, comme je te le disais, désirent s'attirer la victoire avec la magie, quelle qu'elle soit, et le sang des albinos en fait partie. C'est ainsi. Mais tout le monde se rassure en racontant qu'on peut tuer ces pauvres gens parce qu'ils ne meurent jamais. Une sorte d'absolution des meurtres. Le massacre des albinos est devenu un business.
Mistral regardait son ami qui parlait d'une voix claire et grave. Il ne put s'empêcher de l'interrompre.
- Ne me dis pas que toi, esprit éclairé, tu crois à ces pratiques !
- La question n'est pas de croire ou pas. Ca existe !....
.... Mais pour répondre plus précisément à ta question, je pense qu'un sorcier s'est installé depuis quelque temps et qu'il a des commandes venant de très loin. Le type doit avoir une grande réputation pour être en mesure de commanditer des meurtres d'albinos, ici en France ! Il a plusieurs longueurs d'avance sur toi. Sais-tu pourquoi ?
Mistral fit non de la tête.
- C'est très simple, Ludovic. Tu cherches dans ce que tu connais, dans tes références standardisées, comme tout bon flic qui se respecte. Mais tu es incapable de prendre un chemin de traverse, parce que l'irrationnel est au-dessus de ton entendement. C'est pour ça que le sorcier est tranquille...
Tu ne sais pas chercher en dehors de ton système de pensée, ce qui confirme mon analyse te concernant.
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C’est très simple, Ludovic. Tu cherches dans ce que tu connais, dans tes références standardisées, comme tout bon flic qui se respecte. Mais tu es incapable de prendre un chemin de traverse, parce que l’irrationnel est au-dessus de ton entendement. C’est pour ça que le sorcier est tranquille.
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- Pourquoi le sorcier ne serait-il pas content ?
Forest ferma les yeux de stupéfaction à l'évocation du sorcier. Madjid Doucouré esquiva la question.
-J'le connais pas ce sorcier et j'veux pas croiser son chemin, j'suis pas de taille. Il est très puissant pour avoir des types qui.... découpent des gens pour lui. Il a beaucoup de pouvoirs et des clients riches qui achètent ses potions, c'est sûr.
- Il est nouveau ?
- Peut-être. Mais il y a toujours des sorciers ou des guérisseurs chez les Africains ! Chez nous, c'est eux qui nous soignent, qui nous enlèvent le mauvais œil ou qui jettent un sort à nos ennemis. C'est normal, c'est comme ça.... C'est comme le docteur chez toi.
Mistral approuva d'un signe de tête. Forest resta de marbre.
- Où je peux rencontrer un sorcier qui me raconte toutes.... ces pratiques ?
- J'sais pas. Mais c'est pas pour vous. Aucun sorcier vous parlera. J'aime pas qu'on m'pose des questions sur les sorciers. Vous n'y comprenez rien.
Sans le savoir, Doucouré renvoyait Mistral à son échange avec Le Carme, quelques heures plus tôt. Mistral sentit que l'Africain se refermait comme une huître. Il laissa le silence s'installer de nouveau. Forest, témoin privilégié de ces questions-réponses, se garda bien de dire quoi que ce soit. Mistral tenta une dernière question. Jamais, lui non plus, il n'aurait imaginé avoir une telle discussion dans le cadre d'une enquête criminelle. Après tout, pourquoi pas ? se dit-il.
- Qui travaille pour le sorcier ?....
....
Forest raconterait bien plus tard que jamais, en vingt ans de carrière, il n'avait assisté à un dialogue aussi étrange entre un policier et un informateur. Il regretterait de n'avoir pu l'enregistrer pour faire taire les incrédules. Mais ce qui le surprit le plus, c'est que ces questions, aussi dingues soient-elles, n'étonnèrent ni l'Africain ni surtout le chef de la brigade criminelle. Mistral et Ducouré, en phase, s'étaient compris. Forest émettait l'hypothèse que la bascule intellectuelle de Mistral était intervenue à ce moment-là. Les mots : "sorciers", "magie", "massacres des albinos", apparurent progressivement dans le vocabulaire de Mistral. "Même s'il s'en défendait", ajouterait Forest en souriant.
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A une quinzaine de mètres, à proximité d'une station de taxis, il observa par ennui la prostituée blanche. La seule du coin, pensa-t-il. La femme, qui tutoyait la soixantaine avachie, épuisée par quarante ans de trottoir, avait échoué dans un boulevard glauque. Son parcours l'avait conduite des quartiers les plus huppés de la capitale, avec strass et paillettes, à cet endroit qui lui rappelait tous les jours sa déchéance. Chaque dizaine d'années écoulée, elle s'éloignait peu à peu de la lumière et de la fête, reléguée sur un bout de trottoir, loin du centre, où elle passait ses nuits de travail. Fataliste, elle savait qu'après ce boulevard il n'y aurait plus rien pour elle....
..... Stella arriva enfin. Elle s'approcha de la prostituée usée. Les deux femmes n'étaient pas étrangères l'une à l'autre. Les embrassades et quelques mots échangés ponctués de sourires traduisaient l'affection de l'ancienne envers la jeune fille. Le contraste était saisissant entre la jeune Africaine ondoyante et la femme à bout de souffle.....
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Le sorcier attira Margaret dans le cercle blanc et tourna autour d’elle, sa coupelle en main, psalmodiant des phrases incompréhensibles. Le fait d’être seule avec le sorcier dans ce banal cercle tracé à la craie lui donnait l’impression d’être entourée de murailles. La cérémonie, qui la liait à la vie et à la mort, venait de commencer.
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La fille se trouve à l'hosto en observation, rien de grave apparemment. Je me disais qu'on pourrait discuter avec elle, elle bosse à Château-Rouge, c'est une prostituée africaine et....
Mistral ne laissa pas Dalmate terminer sa phrase.
- La sorcellerie, les albinos, la magie africaine, oui je sais. Paul, je commence en avoir assez de ces pistes complètement démentes qui ne nous mènent à rien. Je n'ignore plus que ça existe. Et pour aller jusqu'au bout de ma pensée, je suis convaincu que c'est le puissant moteur d'une communauté. Mais nous sommes étrangers à cette culture. Ce n'est pas en explorant ce que nous ne connaissons pas qu'on y arrivera. Il nous faudrait beaucoup trop de temps pour s'imprégner et comprendre tous ces rituels. Laissez tomber, à mon avis vous perdez votre temps. Concentrons-nous sur notre approche pragmatique des crimes, nous n'avons pas trop le choix. Essayons de faire coïncider les deux.
Dalmate constata le sursaut cartésien de son collègue, teinté de ce léger accent de combat d'arrière-garde. Mistral progressait dans l'irréel, voulait bien l'admettre sans le côtoyer de trop près pour autant, se réfugiant dans la procédure judiciaire.
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