Dès l'instant où tu leur dis qu'ils vont être inondés de billets de banque, tout se passe bien ! Ils n'écoutent même plus la suite. Et pour que mon business continue de marcher, j'expédie de temps en temps un billet de cent dollars aux mères. Snoop, sans elles, rien n'est possible !
-Cent dollars ? Mais c'est rien, vu c'quelles te rapportent !
- C'est les mères qui m'proposent leurs enfants et qui m'les vendent ! Elles disent entre elles : "ma fille est en Europe, elle m'envoie des sous. Celle qui est à l'école Est-ce qu'elle peut faire la même chose ? Non, et en plus elle coûte de l'argent !"
- Tu l'as payée cher, la gamine ?
- Cinq cents dollars. J'ai fait une affaire. La mère voulait m'en vendre d'autres, mais j'aime pas acheter dans les mêmes familles. J'lui enverrai du cash dans un mois, c'est bien de les faire attendre. Elle remboursera au village la cérémonie du sorcier et aura l'impression d'être riche avec les trois cents restants.
Margaret commençait à ne plus se sentir très bien. Elle aurait voulu être ailleurs, renoncer à tout ce qui l'attendait : la richesse, les bijoux, la maison, un mari, des enfants, un travail intéressant chez les Blancs. Elle hésitait à fuir, se demandant si ses jambes pouvaient encore courir. Elle sentait les mains de la femme qui la serraient avec affection, certainement une trop grande affection, parce que Margaret ne pouvait s'extraire de cette poigne si forte. En réalité elle n'y songeait même plus. Sa mère s'était endettée auprès de la plus grande partie du village pour payer les deux cents dollars de la cérémonie. Si elle s'enfuyait, elle serait bannie et la honte retomberait sur sa famille pendant des générations. Margaret devenait prisonnière de la parole et de la dette de sa mère.
C’est très simple, Ludovic. Tu cherches dans ce que tu connais, dans tes références standardisées, comme tout bon flic qui se respecte. Mais tu es incapable de prendre un chemin de traverse, parce que l’irrationnel est au-dessus de ton entendement. C’est pour ça que le sorcier est tranquille.
Bon, tu me déposes avec ta bagnole de flic? J'ai du taf...enfin encore un peu.[...]
Avec ce temps, les clients ne se bousculent pas.