recherche, retour sur le passé, en notations précises (et mystère qui se dissipe peu à peu) à travers lesquelles passe le calme de ces endroits cossus, dans la Suisse du bord du Léman, en passant sans cesse du je au il.
Toujours le lac, et la crainte de l'ancien petit garçon, homme marié, professeur, venu éclaircir son passé, et le drame auquel il a assisté sans y entrer - et les femmes toujours, celles qu'il rencontre, avec lesquelles une histoire s'amorce en rêve, la grand mère, celle qui s'est promenée au bord du lac avec les enfants, au moment du drame, et la petite fille qu'elle fut, la mère, et sa mort attendue pendant ce séjour d'autrefois, l'ancienne amante qui fut peut être aimée, et l'épouse qui donne des nouvelles de la famille, et puis la soeur qui a provoqué cette visite.
Un tissage des plans et des époques, et le lac qui se dit en poèmes.
Commenter  J’apprécie         00
Sous le ciel plombé, le lac pareil à une étroite plaque grise menacée par la ville, ses maisons, ses immeubles qui se bousculent sur les rives. À l’arrière-plan, les Alpes, enneigées sur leur tiers supérieur, le dominent.
Le lac n’existe plus
Juste la ville et les montagnes
entre lesquelles il parvient tant bien que mal à se glisser,
à se frayer un chemin.
Je n’écrirai pas ce livre, cette fiction dont le séjour ici devait constituer un point de départ, devait me servir à repérer les lieux, à organiser une subtile alliance entre réalité et fiction, avec couple illégitime, amante perturbée (Lucie ? Élise ?) qui aurait été le double de la mère, mystérieuse disparition aux abords du lac, recherches vaines, fragiles péripéties, minces rebondissements à la clé et pointe d’humour cynique. Je n’écrirai pas ce livre tombé à l’eau du lac. Projet devenu dérisoire, avalé par ce creux, ce vide. Subsiste une page vierge toujours à remplir.
cette image superficielle du bonheur familial, malgré la menace qui y était inscrite en filigrane, celle d’une vie promise qu’on allait prématurément abattre. Ce cliché-là avait sans doute contribué à fixer en moi l’idée de destin, de fatum, qui s’accordait tellement bien avec les préceptes inculqués par la religion catholique dont le dieu régnait sur nos existences, riend’autre à faire qu’espérer et subir puisque tout était déjà inscrit,
Ce moment espéré, souhaité, ce retour aux sources, comme une impossibilité enfin exorcisée, un tabou brisé, allait s’achever. Ne parvenait pas à se lever, à s’arracher du banc sur lequel il était encore assis face à l’eau plate du lac, comme éternellement plate. Narcisse se mirant dans l’eau avant d’y sombrer.
Était-ce terminé ?
Avais cherché le lieu du drame comme l’extrémité du fil dans l’écheveau emmêlé, un fil capable de me faire remonter le temps, de remonter jusqu’à elle.
À la recherche d’indices, avait ensuite arpenté les rues de la ville, dans un sens, puis dans l’autre, les deux rues de la ville parallèles aux rives du lac, et pleines de monde ce samedi car occupées par un petit marché qui leur donnait des airs de fête, animation inaccoutumée dans une ville ordinairement assoupie, lieu de villégiatures pour retraités fortunés, calme et sans surprise, protégé des fracas du monde. Et pourtant le lieu du crime.