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Critique de Jooh


Jooh
10 septembre 2014
Cela faisait longtemps déjà que je voulais découvrir Anaïs Nin, que je ne connaissais qu'en tant que symbole de femme libre et décomplexée, et évidemment pour sa sulfureuse aventure (tant physique qu'intellectuelle) avec l'écrivain Henry Miller. C'est donc sans hésitation et avec une grande envie de rassasier ma curiosité que j'ai jeté mon dévolu sur cet ouvrage lors d'une opération masse critique ! Merci à Babelio et aux éditions chèvre-feuille étoilée pour m'avoir offert cette belle opportunité !

En refermant la dernière page de ce livre, un constat s'impose immédiatement à moi : Anaïs Nin est bien une artiste hors du commun !

Ce qui me frappe le plus dans cette biographie, c'est de voir à quel point tout son être est multiple : à la fois par ses origines, mais aussi par les différentes langues qu'elle maîtrise, les personnalités qui la composent – et notamment ce combat permanent entre la Femme et l'Artiste en elle –, mais aussi ses talents. En effet, les domaines dans lesquels elle s'essaie sont nombreux : écriture, peinture, danse, créations de mode, arts décoratifs, psychanalyse ; et il n'est donc pas exagéré de dire qu'elle est une artiste touche-à-tout. Sophie Taam met pertinemment en lumière la multiplicité de l'esprit d'Anaïs : d'un côté, la soif de connaissance et de savoir, avec une volonté d'enrichissement intellectuel permanent et un besoin insatiable d'échanger avec autrui sur ses découvertes culturelles ; de l'autre, son monde onirique, imaginaire dont elle se nourrit à longueur de journée, ainsi que sa quête continue d'un éveil de tous les sens. Une dualité omniprésente donc, entre ses deux mondes, celui de la connaissance universelle de l'être et de toutes choses, opposé à celui des sens, de la subjectivité et de l'introspection.
On comprend donc qu'une telle artiste ne peut avoir qu'une seule vie : il y a la vie mondaine, celle qu'elle mène aux yeux de tous donc, mais il y a aussi celle qu'elle se construit petit à petit avec sa gloire à venir, celle qu'elle veut oublier – un passé malheureux, la laideur et la pauvreté de son enfance – et enfin la vie qu'elle imagine et invente dans ses longs moments de rêverie.

Que j'admire sa soif d'autonomie ! En effet, elle n'hésite pas à travailler et surtout à créer pour subvenir à ses besoins, même si cela est bien souvent vain : elle ne sera d'ailleurs indépendante financièrement qu'à la fin de sa vie. Elle est également un véritable symbole de la femme émancipée : elle conduit, elle fume, mais surtout elle réfléchit, écrit et pense tout haut, bref, elle bouscule clairement tous les carcans de la condition féminine de l'époque, qui n'avaient pour but que de fabriquer de bonnes mères et de bonnes épouses ; elle, n'hésite pas un seul instant à donner la priorité à sa vie de création, sa vie d'artiste, ce qui en fait aujourd'hui une figure de proue du féminisme.

Anaïs Nin représente également un être en perpétuelle évolution, elle se métamorphose sans cesse – tel un fruit qui nécessite temps et engrais (dans son cas, tout ce qui touche à la culture) pour s'épanouir, mûrir et devenir tout à fait prête pour s'adonner enfin à la Création – remettant en question ses goûts et ses certitudes : elle qui abhorre à ses débuts Proust et Freud, elle en fait par la suite ses deux auteurs de prédilection qu'elle vénère autant qu'elle chérit.

L'auteure a parfaitement su retranscrire les pensées et les sentiments d'Anaïs Nin tout au long de cette biographie, ce qui nous permet au mieux de cerner la personnalité complexe et ô combien à part de cette dernière; mon attention a notamment été retenue par l'incroyable capacité de déguisement et de dissimulation d'Anaïs, un concept créé dans son enfance porte d'ailleurs le nom de « Mensonge-Nin » (comme si les deux étaient intrinsèquement liés et indissociables), et repose ainsi sur le fait que le mensonge est ici perçu comme vital : la vérité universellement recherchée perd alors son caractère sacré, elle n'est plus absolue ni même nécessaire. Une idée qui brille par son originalité et que je rencontre pour la première fois !

Bref, j'ai beaucoup apprécié cette lecture d'« Anaïs Nin, Genèse et Jeunesse » qui me donne envie d'aller encore plus loin, et c'est un grand plaisir pour moi d'avoir pu comprendre un peu mieux le phénomène Nin.
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