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Critique de ppette007


Saul Karoo alias « Doc Karoo », le narrateur principal de ce roman, est spécialiste dans l'art de retoucher les scénarios qu'on lui soumet afin que ceux-ci correspondent au moule hollywoodien. Grâce à cela, il s'est enrichi dans le monde du cinéma mais il s'avère incapable d'être un véritable écrivain. Et ce n'est pas là son plus gros problème. Car en plus de ses nombreux défauts (il est imbu de sa personne, cynique, égoïste, lâche), notre homme est atteint de névroses et de maladies étranges telles que l'impossibilité d'être ivre malgré des quantités énormes d'alcool ingurgitées ou encore son incapacité à être seul dans une pièce avec son fils, sa femme, sa mère ou encore son unique ami. Il a tout pour être un anti héros américain, détestable à souhait. Et pourtant, le lecteur passera par bien des sentiments à son égard tout au long du roman. Car ce personnage devient émouvant lorsqu'il se trouve enfermé dans un rôle social (celui d'un alcoolique alors qu'il reste désespérément sobre) ou bien lorsqu'il entreprend finalement de racheter ses mauvaises actions. de plus, Karoo est doté d'une lucidité incroyable sur les autres et sur lui-même qui lui permet souvent de prévoir les événements à venir. Cela ne l'empêche pas de laisser faire quand bien même il sait qu'il devrait agir. Par son côté autodestructeur, Karoo se révèle profondément humain et attachant.
A travers le récit de la vie de Karoo, un cynique en quête de rédemption, l'auteur nous offre une farce féroce bourrée de scènes d'une incroyable drôlerie telles les joutes de Karoo avec son ex-femme dans lesquelles ceux-ci rejouent régulièrement leur divorce dans le même restaurant, la fuite de sa visite médicale dont les résultats ne lui donnaient pas satisfaction (il ne pouvait admettre qu'il avait rapetissé et grossi). Grâce au style de Steve Tesich, des moments banals (une conversation téléphonique par exemple) deviennent réjouissants.
Progressivement, le ton se durcit et le roman prend finalement le chemin de la tragédie. Car l'auteur entend critiquer le monde du show business, incapable de défendre des vrais chefs d'oeuvre pour leur préférer des projets formatés aux prétendus goûts du consommateur. Plus largement, son livre est une critique sans concession de l'Amérique consumériste des années qui suivirent l'effondrement de l'URSS dans laquelle notre personnage est tellement riche qu'il peut se payer le luxe de ne pas avoir d'assurance médicale.
Ce roman, d'une grande noirceur, est un pur bijou ! Merci à l'opération Masse Critique et aux éditions Monsieur Toussaint Louverture de m'avoir permis de le découvrir.
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