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Critique de afriqueah


Oeuvre de jeunesse de Tolstoï, écrit vingt-cinq ans avant la Mort d'Ivan Ilitch, ce récit « Trois mort », fort court, présage de la pensée angoissée que l'auteur a de la mort- lui qui a vu mourir sa mère quand il avait deux ans- avec l'ébauche d'une sorte de résurrection, d'une joie, d'une acceptation lorsqu'elle advient.
Elle advient, et ce ne sont ni les prêtres ni les médecins qui peuvent l'en empêcher, inutile de se mentir, sa survenue est inéluctable.
La mort de Madame, aigrie malgré l'amour de son mari, les attentions nombreuses dont elle fait l'objet, est presque devinée par un détail, le blanc de la raie des cheveux blonds de la malade.
Le paysan Khviodor accepte sa mort, l'on sait combien Tolstoï insiste sur les qualités humaines des paysans russes.
Il donne ses bottes à un cocher, à la condition que celui-ci paye une pierre tombale, ce qu'il ne fait pas : il coupe un arbre pour en faire une croix.

C'est la troisième mort, celle de l'arbre, qui est racontée avec force détails : il fait partie de la nature comme les deux précédents morts qui terminent dans la terre, et lui en est arraché.
« L'arbre trembla de tout son corps, s'inclina pour aussitôt se redresser, oscillant avec effroi sur sa racine. Il y eut un instant de silence, mais de nouveau l'arbre s'inclina, de nouveau un craquement se fit entendre dans son tronc et, cassant ses branches sèches, laissant tomber ses branches feuillues, il s'écroula de toute sa hauteur sur la terre humide. »

La mort dans les trois cas libère ceux qui restent :
Madame était devenue impossible, regrettant ce que son mari n'avait pas voulu qu'elle fasse : le voyage en Italie qui selon elle la guérirait, voyage fantasmé, puisqu'elle est déjà malade;
le paysan libérant l'isba où les habitants dormaient par terre, et se réjouissant d'une certains façon de le faire ; il n'a plus besoin de ses belles bottes neuves , en signe d'abandon des biens de ce monde .
enfin l'arbre, dont la mort est si longuement décrite, laisse l'espace libre pour que les autres arbres puissent se déployer « encore plus allégrement ».

Même Madame, qui s'isole pour mourir ressent tout de même ses péchés et aussi une certaine joie à l'idée de ne plus souffrir, une sorte de délivrance.
Khviodor, lui, sait qu'il fait partie de la grande nature, comme Nikita de Maitre et serviteur ( à qui la mort du maitre, n'ayant peur de rien, possédant tout, paraissait plus injuste que la sienne propre ). Sa mort comme celle des êtres proches de la nature entre dans le cycle normal des choses. Elle est pour lui comme pour ceux qui l'entourent un passage vers un autre monde sans souffrances.

Enfin l'arbre , lui aussi, dont Tolstoï ne nous livre pas les pensées, entre dans le cycle de la nature qui meurt et se régénère sans cesse.
Selon moi, et là encore je ne connais pas suffisamment Tolstoï pour l'affirmer, la mort de l'arbre donne la clef, le sens de deux précédentes morts : que vous soyez puissant ou misérable, inutile de vouloir y échapper comme Madame dans un voyage/fuite en Italie.
Mieux vaut avoir la sagesse paysanne de donner ce qui ne vous servira plus, et d'accepter la loi générale de toutes les espèces y compris végétales.
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