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Critique de Melisende


J'ai eu envie de profiter du Pumpkin Autumn Challenge pour relire un titre découvert lorsque j'étais collégienne. Je n'en gardais aucun souvenir, ni bon ni mauvais, si ce n'est ma non-appréciation des illustrations (signées Georges Lemoine)… et je n'ai pas changé d'avis à ce sujet !

Clairement destiné à la jeunesse, Vendredi ou la Vie sauvage n'est pas pour autant une version appauvrie du Vendredi ou les Limbes du Pacifique, également écrit par Michel Tournier. L'auteur souhaitait avant tout offrir une version du mythe de Robinson Crusoé (de Daniel Defoe) adaptée aux plus jeunes lecteurs. On y retrouve donc la figure du naufragé solitaire sur son île déserte et plus encore, les thématiques de la civilisation et du bon sauvage.

Le navire de Robinson coule alors qu'il fait route vers le Chili en 1759. Avec le chien Tenn, ils sont les seuls survivants de la catastrophe. Bien vite le héros s'approprie l'île qu'il baptise Speranza et la dompte en la modifiant, en reconstituant la civilisation occidentale qu'il a toujours connue : une habitation carrée, l'élevage, l'agriculture et des règles strictes. Tout doit être à sa place. le monde sauvage est maîtrisé, le voilà rassuré.
On peut d'ailleurs s'étonner de la rapidité et de la facilité avec lesquelles Robinson fait face aux événements. Tout semble couler de source sans aucune difficulté majeure. Je veux bien que les êtres humains du XVIIIe siècle avaient plus de capacités d'adaptation et des gênes d'aventuriers mais tout de même. C'est vraiment trop simple. J'aurais aimé que l'aspect « survie » soit plus développé, que les difficultés soient plus nombreuses, que l'on ressente plus intensément la peur, le doute, la solitude… bref, que Robinson galère un peu plus au quotidien !

Après l'installation et l'appropriation de l'île – ce qui dure tout de même quelques années malgré la brièveté du texte – Robinson sauve un sauvage que son clan s'apprêtait à sacrifier (ils avaient accosté sur l'île grâce à des pirogues). Comme il lui faut un nom, le garçon est baptisé Vendredi et notre héros, en bon occidental supérieur, se met en tête de le civiliser en le prenant comme apprenti (pour ne pas dire esclave).
Vendredi semble s'accommoder de la situation et obéit sans trop de problèmes. Il accepte de porter les vêtements proposés, suit les règles imposées, apprend la langue et les coutumes mais quelques-unes de ses habitudes sauvages demeurent, ce qui met Robinson hors de lui.
Alors qui de Robinson ou Vendredi a « raison » ? La civilisation occidentale apporte-t-elle forcément bonheur et prospérité ? Des deux personnages, le maître (l'apprenant) est-il vraiment celui que l'on croit ?

La narration se veut abordable pour les plus jeunes lecteurs mais pas simpliste. L'écriture est soignée, les descriptions imagées et efficaces. Mais, et c'est là ma plus grosse réserve, l'émotion est absente de la lecture. Impossible de s'attacher à ces deux personnages qui n'ont pas grand chose d'humains tant ils incarnent des rôles-types précis. Ils sont là pour servir l'histoire, pour faire passer idées et messages ; ils manquent donc cruellement de crédibilité et de consistance.

Publié en 1971 pour la première fois, Vendredi ou la Vie sauvage a pourtant tout d'un texte du XVIIIe siècle. Michel Tournier nous propose un petit roman pour la jeunesse qui peut s'apparenter à un conte philosophique à la Voltaire avec la thématique très « siècle des Lumières » du Bon Sauvage (cf Rousseau dans son Discours sur l'origine de l'inégalité parmi les hommes). J'apprécie donc les questions soulevées mais regrette la distance instaurée envers les personnages, l'absence d'empathie pour eux et plus généralement l'absence d'émotions.
Lien : http://bazardelalitterature...
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