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Citations sur Objets de grande utilité (9)

"La Poignée de marmite, le rouet & les coffins"

Quand la marmite suspendue à la crémaillère est au milieu des flammes, son anse métallique devient brûlante : on ne saurait la décrocher sans protéger la main par un chiffon. Les femmes souvent préféraient une sorte de crochet en forme de poignée, ou "main de fer". (...)
Nombre d'objets usuels par quoi l'homme s'entoure (...) portent évidemment la marque, la mesure, de son corps. Ainsi parler de tels objets n'est pas, comme on a pu le croire, choisir l'inanimé, mais parfois chercher la silhouette qu'ils dessinent en creux de l'homme ou de la femme occupés à les faire mouvoir. (p. 87)
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Le Carrosse , le fer à repasser & les grelots

Maintenant je m'en aperçois : je n'ai pas le souvenir d'avoir jamais vu repasser dans une ferme, jadis. On devait se cacher plus ou moins pour une tâche considérée en pays sauvage comme luxueuse. Et peu de linge méritait ce soin, le plus gros étant aplati et plié à la main. (p. 23)
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Tout comme la fermière seule au milieu des joncs (les vaches parfois approchent un mufle baveux des chemises tordues lancées sur le tréteau), chacune des laveuses du bourg était dans son carrosse.

C’est une forte caisse n’ayant que trois côtés et un fond (les mesures en sont variables, mettons 45 cm sur trente et 25 cm de haut). Quatre montants extérieurs forment par leur base dépassante des pattes de 5 cm qui élèvent le carrosse au-dessus de la boue et lui évite une détérioration accélérée. Il faut ajouter que le devant est surmonté d’une petite planche (8 cm de large environ) clouée horizontalement comme une amorce de couvercle, ou plutôt légèrement en pente vers l’avant, et que celle-ci est échancrée en arc de cercle pour que le corps se penchant y puisse avancer. Enfin que les deux planches latérales se terminent vers l’entrée par un arrondi très marqué. Peint à l’extérieur d’un bleu charron qui peu à peu s’efface, le carrosse doit être rempli de foin : on s’y tient à genoux, tout au bord de la planche à frotter du lavoir.
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Le Fléau, le Coq-girouette & la lanterne.


Cette lanterne n'est pas une vessie. Notre patois l'appelle "un falot".C'est en pensant ce vieux nom que des mains autrefois tâtonnèrent dans la nuit pour allumer une lueur et courir à l'étable surveiller la vache prête à vêler.
(...) J'y peux fermer la porte sur mes pas, m'asseoir dans l'odeur de cire, regarder le monde à travers les carreaux de la lanterne. Depuis l'intérieur de l'objet dont je n'ai su décrire toute l'infime organisation, même sans lui prêter plus qu'une présence- que la bougie toutefois anime- je continue à sentir étrange la rencontre, sorte d'amitié, entre le falot de vieille tôle et une existence dont la flamme si tôt charbonne. Sans doute, comme l'écrivait Linay du Pairier en 1676 (...) " ce ne sont pas seulement des objets que je taste, mais mon propre contour que je voudrais connoistre". (p. 109)
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Tandis que l'hiver cerne les murs, il arrive qu'au bord du feu le soufflet, qui régulièrement s'emplit puis expire avec lenteur, par ses cuirs encore grince comme un berceau.
(p. 17)
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Les laveuses titrées de la commune retrouvaient là des femmes venues rincer leur propre buée, et ces langues ensemble savonnaient la vie de quelques absents.
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Tandis que les fermières lavaient presque toujours elles-mêmes, au douet aménagé sur un ruisseau, la plupart des commerçants du bourg faisaient laver au lavoir communal, en contrebas de la route, par une journalière. Ce lavoir est assez vaste, carré, avec un toit de tôle courant sur un périmètre et laissant un vide au milieu : la pluie ainsi peut tomber au centre du bassin, le soleil en réchauffer l’eau. Une fois par semaine on le vidait pour le remplir d’eau claire pendant la nuit au moyen d’une source proche. Les laveuses titrées de la commune retrouvaient là des femmes venues rincer leur propre buée, et ces langues ensemble savonnaient la vie de quelques absents.

Tout comme la fermière seule au milieu des joncs (les vaches parfois approchent un mufle baveux des chemises tordues lancées sur le tréteau), chacune des laveuses du bourg était dans son carrosse.

C’est une forte caisse n’ayant que trois côtés et un fond (les mesures en sont variables, mettons 45 cm sur trente et 25 cm de haut). Quatre montants extérieurs forment par leur base dépassante des pattes de 5 cm qui élèvent le carrosse au-dessus de la boue et lui évite une détérioration accélérée. Il faut ajouter que le devant est surmonté d’une petite planche (8 cm de large environ) clouée horizontalement comme une amorce de couvercle, ou plutôt légèrement en pente vers l’avant, et que celle-ci est échancrée en arc de cercle pour que le corps se penchant y puisse avancer. Enfin que les deux planches latérales se terminent vers l’entrée par un arrondi très marqué. Peint à l’extérieur d’un bleu charron qui peu à peu s’efface, le carrosse doit être rempli de foin : on s’y tient à genoux, tout au bord de la planche à frotter du lavoir.
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Même retirés à la fonction utile, les objets en effet ne sont pas des blocs de matière que leurs contours trop nets pourraient clore, mais l’endroit où se rencontrent de successifs touchers. Plus précisément, il reste sur eux des places qui attirent, en recherche sans doute d’autres gestes, une caresse qui n’est pas finie.
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Faux, faucilles & croissant

C’est un peigne pour les crins, de cuivre jaune, et l’on imagine guère une forme plus sobre. En cela il représente bien les objets utiles, souvent ingénieux, qui formaient l’entourage rural.
Des objets si simples qu’on croit à première vue n’avoir rien à en dire, sinon justement cette simplicité étonnante. À force de toucher pourtant, et sur les traces infimes de sa vie ancienne, une relation se fait jour entre la nudité même de l’objet et les souvenirs ou sensations qu’il éveille.
Sans doute ne parle-t-il pas tout seul : s’il est muet d’abord, le jeu consiste à regarder suffisamment cet objet pour faire peu à peu se déployer l’atmosphère qui le nimbe en secret au-delà de ses mensurations.
Et devant le peigne des chevaux (prononcé «peugne»), cette plaque de laiton taillée à dents — les angles abattus et une oxydation douce — je me réjouis qu’une si petite pièce d’un unique matériau et de proportions parfaites, en même temps que l’image du peigne primitif me soit le témoin encore des écuries, dont l’odeur fit se dilater les narines.
Il est court et va du creux de la main à l’extrémité du pouce car on le prend à pleine paume. Aussi pour en faciliter la tenue (et pour la solidité) le dos est-il presque aussi large que la partie dentée. Cette partie pleine est en son milieu percée d’un grand trou rond par lequel une ficelle, ou un lacet de cuir, peuvent former une boucle qui sert à suspendre le peigne, qui sert également à passer le médius afin d’avoir plus de force pour démêler les crins.
L’entretien des chevaux n’était pas qu’un souci d’esthétique, mais aussi destiné à faciliter la sudation et l’évaporation de la sueur, faute de quoi pour un cheval trop fourni en pelage et en crins, et mouillé par l’effort, il y aurait eu un risque de refroidissement.
Le peigne avait sa place avec étrille, brosse, époussette, près des harnais et des colliers. L’étrille pour enlever la terre en surface, la brosse de chiendent pour pénétrer le pelage, enfin pour chasser la poussière quelques coups d’époussette. Celle-ci faite d’une queue de crins noirs tenus dans une collerette de cuir au bout d’un petit manche de bois. Car on écourtait la queue des pouliches dès qu’elles avaient un peu travaillé, soit disant pour mettre la croupe en valeur et, reste d’un temps ou le maréchal-ferrant faisait seul office de vétérinaire, c’est le forgeron qui venait couper la queue, cautérisant avec un fer rouge. Ce qu’il appelait «surcouer eune pouliche» («escoër» du XIIe au XVIe puis «écouer» pour Littré. Tandis que «accouer» une jument, c’est l’attacher à la queue de celle qui la précède).
Le peigne servait à nettoyer les crins des épines ou graines accrocheuses qui s’y étaient prises. On ne pouvait tondre la crinière que sur la nuque où passe, juste derrière les oreilles, la têtière du bridon. Mais sur le reste de l’encolure une crinière trop longue ou mal rangée pouvait être éclaircie en arrachant des crins.
Les quinze dents du peigne (deux centimètres et demi de long) sont fortes, plates, pointues mais non piquantes. À la base, les entailles de leur espacement sont arrondies. L’œil en est conduit vers le large trou rond au-dessus de la huitième dent, puis aux deux extrémités du dos, arrondies également: bien que métallique et sonnant, l’objet ne montre aucune agressivité. C’est à peine si les dents demeurent un peu tordues dans le sens où, il y a quelques années, elles tiraient sur les crins des chevaux de labour percherons.
(...)
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