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Critique de Rebka


Rebka
21 février 2017
Comme d'habitude David Vann nous propose une balade printanière - légère et fleurie - sur une île paradisiaque qui respire la joie de vivre… ♫♪ Quand te reverrais-je, pays merveilleux ? ♫
Maaaaaais noOoon je rigole ! Amateurs de petits lapins, fleurs bleues et autres mignonneries, passez votre chemin car ici, le titre n'est pas menteur. Oui, il fallait bien (à minima) mettre le mot Désolations au pluriel pour donner un aperçu de ce qui s'ensuit.
Et ce qui s'ensuit, mama mia, c'est du lourd ! Après avoir réglé d'une certaine manière ses comptes avec son père (Sukkwan Island), virtuellement tué sa mère (Impurs), David Vann nous apprend cette fois comment construire un échec, rondin après rondin, sans se presser, en 25 ou 30 ans, tranquille peinard à son rythme. Ben ouais quoi, après tout pourquoi se mettre la pression ? Inutile de précipiter la chute. Construire une cabane pour déconstruire sa vie. Un concept sympa non ? Lancez-vous, vous verrez, l'essayer c'est l'adopter.
Commençons par le décor, on se l'imagine blanc, gris, boueux, neigeux et froid, tout pour plaire déjà. Ça se passe en Alaska près d'un lac glaciaire. On y trouve un îlot qui porte le nom rigolo de Caribou Island. Mais stop, je vous arrête tout de suite, c'est juste le nom qui est rigolo, n'allez pas vous imaginer des trucs surtout. On est à des années lumière de tous les clichés et de la carte postale typique style “Greetings from alaska”. Il s'agit bien d'un trou perdu au milieu d'une nature infinie, certe belle, mais sans pitié. Plus que sans pitié d'ailleurs, il faudrait dire sans état d'âme, c'est plus juste. Parce que la nature s'en fiche en réalité, elle est totalement indifférente aux petites histoires ou aux grands drames humains, c'est nous - et notre incorrigible anthropocentrisme - qui avons la fâcheuse habitude de vouloir appliquer des sentiments humains à un peu près tout autour de nous, les animaux, les paysages, les éléments etc. Bref, ce n'est pas comme ça que ça marche. Et dans ce petit bout d'Alaska en particulier, la nature, c'est juste une galère de plus. Une désolation de plus. Une déception de plus aussi pour certains des personnages car justement leur rêve de “vie sauvage” en harmonie avec la nature vient se casser les dents sur la réalité dans toute la splendeur de sa nudité. Je pense à Gary notamment qui s'installe sur ce territoire vierge pour essayer de se trouver, pour démarrer une nouvelle vie et enfin réussir quelque chose. Bon évidemment c'est raté. Je ne dis pas ça pour faire du spoil, de toutes manières avec David Vann à quoi s'attendre d'autre ?
Au fil des pages, nous faisons la connaissance de Gary et Irène, de leurs enfants aussi, leur fille Rhoda notamment avec son compagnon Jim (le Jim de Sukkwan Island) et c'est l'occasion pour l'auteur de dresser une belle galerie de portraits : looser de père en fils et de mère en fille. Chacun porte sa croix, chacun se prend ses murs dans la face, chacun doit en finir avec ses illusions à un moment ou à un autre et se poser la question cruciale, le fameux “et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ?”. Et c'est là que ça commence à sévèrement mal tourner car au final il n'y a pas tant de solutions que ça, et aucune de vraiment réjouissante.
Je ne vais pas trop en dire mais sachez que Désolations est une jolie petite bombe à retardement peuplée d'antihéros aux existences ratées et aux rêves brisés et sachez également qu'à aucun moment n'apparaît la petite fée avec sa baguette magique qui change la vie en rose (vous l'aurez compris, le happy end c'est pas ici que ça se passe). C'est noir, pessimiste, magnifique et désolant à la fois, et c'est là tout le talent de cet auteur que j'adore... On n'échappe pas aux romans de David Vann.
Lien : http://tracesdelire.blogspot..
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