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Critique de LauBlue


Voilà je referme Désolations et comme avec Sukkwan Island, le précédent roman de David Vann, il perdure comme un flottement, un temps où il faut s'arrimer à nouveau à notre réalité. Une nouvelle fois sous le choc des mots, de l'atmosphère particulière qui émane des grands livres, j'aspire l'air et le silence qui suivent les bouleversements.

J'y ai retrouvé les mêmes interrogations, les mêmes attentes, les mêmes souffrances que dans Sukkwan Island. Cette désespérance inéluctable qui crée un vide que rien ne vient combler. Certes, on peut dire que l'écriture est un formidable exutoire pour beaucoup d'écrivains, qu'elle permet une certaine libération de soi mais cela ne donne qu'un aperçu de la maîtrise avec laquelle David Vann livre ses mots. C'est tout à tour dérangeant et incroyablement additif, âpre et réjouissant. Parce qu'au-delà de l'histoire de Gary et Irène, de ce besoin de se couper du monde et des autres, dans cette volonté d'aller au bout d'un projet, — il y est question de la construction d'une cabane en bois pour y vivre sur une île inhabitée —, j'entends d'autres désolations qui vibrent fort, à l'image de cet état américain rude et intransigeant qu'est l'Alaska. — Les descriptions de la nature y sont fortes, omniprésentes et la solitude qui en émane y est même étrangement palpable. Sans jugement, sans misérabilisme, l'auteur lâche certaines vérités, de celles que l'on ne s'avoue que rarement à soi-même. Sur le fil de la souffrance intime, de l'auto apitoiement et même dans l'égoïsme, les personnages vivent à côté d'eux-mêmes. Tout à coup l'Alaska m'a semblé une région moins farouche que je ne l'imagine habituellement. La désolation dans laquelle flotte les protagonistes fait écho aux métropoles anonymes où il est difficile de trouver sa place. C'est comme une quête de soi impossible à vivre, reflet de nos solitudes intérieures. Même la notion de mariage qui revient avec régularité dans cette histoire sous le regard de Rhoda avec cette espérance enfantine des grands rêves, n'est que l'écho d'une forme de séparation, voire une mascarade amère. « le mariage n'était qu'une autre forme de solitude » constate Gary.
Sans cesse à la lisière de la folie, des pensées assassines qui hantent ceux qui souffrent d'un manque, Désolations est un grand roman noir à l'empreinte persistante.
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