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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le thème m'a de suite fait penser à une pièce de Jean Anouilh, "Le Voyageur sans bagage", dans laquelle le personnage phare, Gaston, devenu amnésique à la fin de la première guerre mondiale, est réclamé par la famille Renaud. Ici, Peter n'est bien évidemment pas touché par des pertes de mémoire. Cependant, il se retrouve dans une famille qu'il ne connaît pas mais qui ne dit rien. Pourtant, bien qu'aveugle, la mère de celui-ci découvre qu'il ne s'agit pas de son fils dès la première rencontre. Les cousines garderont également le secret. Pourquoi ? Cet homme est un imposteur qui a pris l'identité de leur Alexandre et personne ne le dénonce aux autorités ? Je n'en dis pas plus…

J'ai apprécié ce roman qui non seulement est bien écrit mais qui nous tient en éveil de bout en bout. Oui, en éveil. Car on se prend presque de compassion pour Peter et, comme lui, on craint la délation. Frédéric Verger a su rendre l'atmosphère angoissante qui devait régner en ce temps-là et a fait en sorte que son histoire soit crédible. Vie de fugitifs, émotions exacerbées, tout y est !

Je vous recommande ce livre et je vais suivre cet auteur car son style m'a vraiment plu. J'ai vu qu'il avait écrit un autre roman, intitulé Arden, que je vais me procurer.

Je remercie Babelio ainsi que les éditions Gallimard qui m'ont permis de découvrir ce roman et son auteur.
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Peter sait qu'en tant que juif, il risque la mort dans le Reich, alors, lors du dernier combat, il vole la plaque d'un soldat français mort sur le champ de bataille. Il devient ainsi Alexandre d'Anderlange. de retour à la vie « normale », il s'habitue tant bien que mal, jusqu'au moment où on l'informe que la mère mourante de celui-ci le réclame à son chevet.

Contrairement à toute attente, la mère, exilée russe, presque aveugle, fait semblant de le reconnaître et il va devoir entrer progressivement dans le rôle.

La construction de son personnage, un mélange de Peter et d'Alexandre, est très intéressante car Peter s'inspire des écrits d'Alexandre, se les approprie, les exprime lors des conversations. (cf P 131 et suivantes). Il puise aussi dans la garde-robe familiale pour créer son propre style.

« Il aperçut son reflet dans le miroir. le personnage, les mains dans les poches, le fixant d'un air amical, insolent, semblait le mettre au défi de faire quelque chose de lui. » P 132

Le destin de Peter-Alexandre est loin d'être simple, et on assiste à une série d'actions-réactions en chaine, un effet papillon, qui le l'emmène d'aventures délicates en aventures difficiles et beaucoup de souffrance.

Les autres personnages sont tous bien caractéristiques, et font l'objet de descriptions assez savoureuses : Sofia la deuxième épouse du père d' Alexandre, dont l'accent russe pimente les dialogues, les cousines Joséphine la rousse et Hélène la brunette, qui cherchent à trouver un mari pour retrouver leur splendeur passée, car la famille est ruinée, avec des histoires d'héritage hautes en couleur, sans oublier le majordome Emmanuel très stylé, vestige de l'ancien temps et bien-sûr Blanche, complice du vrai Alexandre, qui a été internée.

Sans oublier le commandant qui parcourt la campagne à la rechercher d'un vin qu'il a beaucoup aimé lorsqu'il était plus jeune et rêve de retrouver, recherchant un paradis perdu.

Frédéric Verger nous propose la petite histoire dans la grande Histoire, avec des détails sur les conditions de vie des prisonniers, les exécutions sommaires, les charniers…

Dans ce roman, on trouve toute une déclinaison autour du rêve: la rêverie, l'affabulation, onirisme, le délire, la folie, mais aussi l'ivresse de la musique, de la danse… Tout s'intrique, s'imbrique à merveille.

On sait très bien que le récit est construit sur des faits et une région, Blay, qui n'existent pas mais on se prend à y croire, et si le récit démarre très lentement, le rythme s'accélère, s'enrichit, un peu comme « le boléro » de Ravel et, de rebondissement en rebondissement, on ne lâche plus le roman.

Tout m'a plu dans ce roman, même les longueurs, car le style de l'auteur rappelle les feuilletonistes du XIXe que j'aime tant. La langue est très belle, de même que les descriptions de paysages inventés par l'auteur et qu'on visualise sans problèmes comme s'ils existaient vraiment.

Cette lecture m'a convaincue de lire le premier roman de Frédéric Verger: « Arden » pour lequel il a reçu le prix Goncourt du premier roman en 2014.
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Une usurpation d'identité avec l'intention de commettre une action crapuleuse est un délit. Quand cette appropriation frauduleuse se fait au détriment d'un mort, pour sauver sa peau, est-ce effectivement un crime ? Ne serait-ce pas, tout simplement un devoir de survie ?
Ici, c'est une des substances originelles qui fécondent un roman précellent.
Peter Siderman, juif allemand, natif de la Sarre, est un tout jeune homme qui s'est engagé dans une unité ordinaire de l'armée française. Après la débâcle, pressentant qu'il allait être fait prisonnier et fusillé, sans autre forme de procès compte tenu de sa judaïcité et de son enrôlement dans les rangs ennemis, il s'approprie la plaque militaire et quelques lettres prélevées sur un soldat français, victime d'une crise cardiaque : Alexandre d'Anderlange.
Quelque temps après, il est libéré et reconduit en Lorraine, annexée, par le III e Reich, en pays de Bray, berceau natal présumé. Là, réside sa belle- mère, mourante, Madame veuve d'Anderlange née Sofia Eveseivna, venue de Russie.
Dès le premier contact, cette vieille femme aveugle qui simule sa fin prochaine, décèle la supercherie mais Peter n'est pas dénoncé et, bientôt, il fait partie de cette famille composite qui essaie de se recomposer pour affronter, ensemble, une misère noire et tenter de survivre : il y a le fidèle et dévoué majordome Emmanuel , les deux cousines Weissman , la brune Hélène, Joséphine la rousse , toutes deux, en quête d'un riche parti , il y a aussi Victor van Versterhagen le vieux commandant allemand, bancroche, à la recherche de son eldorado, une propriété viticole où il fut hébergé quand il faisait ses classes , il y a plus de cinquante ans.
La vie s'égrène, petitement, une vie de survie, de sursis, de famine, de joies anodines aussi, qu'il faut savoir capter et savourer parce qu'il n'y a pas grand-chose d'autre à se mettre sous la dent.
Et puis il y a ces mystérieux courriers émanant de la cousine Blanche d'Etrigny-Weissman, qui appelle Alexandre à son secours, enfermée dans ce couvent où furent, jadis, cloitrées d'excentriques moniales qui rêvaient et racontaient à haute voix leurs songes : prophéties, inepties, affabulations, tromperies ? Légende enrôleuse, sans doute, et explication plus concrète à la page 188 concernant le titre de ce livre.
Peter-Alexandre va tenter de retrouver Blanche, et là les rebondissements se multiplient, les situations rocambolesques s'enchaînent, les déboires s'aggravent, les épreuves terribles redoublent, s'amplifient, s'accélèrent, et cela me fait penser à Cunégonde dans « Candide », qui cabossée, souillée, mutilée, étripée reste en vie malgré les terrifiantes épreuves auxquelles elle a été confrontée.



J'ai apprécié la maîtrise du style , l'écriture faconde et ondoyante de Verger, son vocabulaire généreux, ses comparaisons et métaphores foisonnantes, savoureuses, originales et , bien sûr ce récit singulier et tragique, quelque peu mystique , qui s'enrichit, au fil des pages, de multiples anecdotes, bâti avec deux matériaux : le concret : l'Histoire et ses atrocités en toile de fond et le fictif forgé par son imaginaire luxuriant : le décor omniprésent qu'il peint , celui du froid plateau mosellan , qu'on croit reconnaitre mais qui se travestit et s'estompe dans le givre hivernal au profit d'un cadre réimaginé, et ce mythe de nonnes rêveuses , qui subsiste et persiste grâce notamment à cette vaisselle « parlante »(1) en faïence rose, quelque peu ébréchée, qui raconte leur étrange histoire et ces vieux microsillons étiquetés « Les Rêveuses » - oratorio de Sémiroff,(2) (l'initiale du prénom étant quelque peu effacée, est- ce un A factice comme « Alexandre » ou un P authentique, celui de « Paul » qu'il faut tenter de déchiffrer ?) Antiquités, qu'on pourrait, qui sait, peut- être, dénicher sur l'étal de quelques brocanteurs perspicaces ou malhonnêtes, trouvailles fortuites qui accréditeraient cette histoire !
Un grand MERCI aux Editions Gallimard Blanche et à Babelio de m'avoir permis de savourer ce livre en avant- première de la Rentrée littéraire de 2017.
Après cette lecture j'ai découvert « Arden » avec le même plaisir.
1 - Assiettes parlantes : dites encore illustrés, historiées, animées…, type de vaisselle en faïence appréciées au XIXe siècle dont le bassin ou le marli est orné de motifs très variés : scènes animées avec des personnages ou des animaux, offrant des thèmes multiples : historique, militaire, politique, religieux, commémoratif, ou proposant des rébus, des devinettes, charades ...
2- Paul Semiroff : Elève de Ravel, secrétaire de Stravinski, compositeur de musique de chambre, d'une symphonie, d'un concerto pour harpe et hautbois. Mais il est surtout connu pour son oratorio Cinq rêves d'Ourthières (Soprano et choeur de femmes (d'après Villa Europa n° 7/ 2016 Frédéric Verger – Sur un plateau de Moselle)
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Passé à deux doigts – ou plutôt à deux voix – du Goncourt en 2013 avec Arden, Frédéric Verger devrait à coup sûr figurer à nouveau en belle position des prix littéraires cet automne. Et avec davantage de succès souhaitons-le, car Les rêveuses est un beau livre ; un grand livre.

Comme tant d'autres jeunes gens de son âge, Peter Siderman s'est engagé dans l'armée française au début de la Seconde Guerre mondiale. Sauf que Peter est Allemand. Et juif. Alors au coeur de la débâcle, quand les armées du Reich se rapprochent et qu'un soldat mort donne l'occasion à Peter de changer d'identité, il n'hésite pas une seconde et devient Alexandre d'Anderlange.

Rejoignant rapidement sa « nouvelle » famille, Peter va partager le quotidien de ces aristocrates mosellans désargentés, regroupés dans les quasi-ruines de leur demeure autour de Sofia la grande tante et d'Hélène et Joséphine, les cousines délurées en quête de maris. Outre le souvenir marquant d'Alex, Peter découvre l'ombre planante de Blanche, l'autre cousine, héritière putative de la fortune familiale mais désormais cloîtrée pour mieux lui faire y renoncer. Blanche, si éprise d'Alex. Blanche, dont la voix était si douce et belle. Blanche, qui n'avait pas son pareil pour retranscrire et compiler les songes des rêveuses du couvent d'Ourthières, autrefois célèbres pour la beauté et la poésie de leurs visions.

En plein coeur d'un terrible hiver et dans ce territoire de l'Est de la France où l'occupant allemand surveille prisonniers et populations, Peter va se lancer dans la dangereuse quête de Blanche.

Frédéric Verger réussit la prouesse de nous entraîner dans une grande fresque héroïque où il mêle l'histoire – la petite comme la grande -, l'amour, la passion mais aussi une certaine forme de cruauté, tout en le faisant avec une incroyable maîtrise de son écriture. Dans un livre dense (444 pages) et volontairement avare de dialogues, il réussit à installer un rythme alternatif, pouvant accélérer brutalement son action en un simple paragraphe, puis laisser trainer sa plume en longueur pendant de nombreuses pages sans que le lecteur n'y trouve matière à ennui. Un délice…

Mais surtout, Verger est un virtuose des mots, des styles, des métaphores, des caractères, des dialogues, des descriptions, des digressions… Bref, en bon prof de lettres qu'il est, il connaît l'incroyable richesse qu'offre la langue française à qui sait s'en servir, et ne se prive pas de le faire avec brio. En d'autres mots, il fait de la littérature, quand tant d'autres ne se contentent que de faire des livres.

Un dernier mot enfin : en grand amateur de littérature américaine en général et de nature writing en particulier, je me suis régalé des paysages de ce pays de Bray montagneux, forestier, froid, dur, mais rendu attachant par les descriptions de Verger, installant le livre dès son début dans une atmosphère particulière qui « tient » l'intrigue – et le lecteur – jusqu'à la fin.

Un grand livre je vous dis… Et un grand merci à Gallimard et Babelio pour cette belle découverte en avant-première.
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