Citations sur Poèmes saturniens (suivi de) Fêtes galantes (26)
NEVERMORE
Souvenir, souvenir, que me veux tu ? L'automne
Faisait voler la grive à travers l'air atone,
Et le soleil dardait un rayon monotone
Sur le bois jaunissant où la bise détone.
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant :
"Quel fut ton plus beau jour ?" fit sa voix d'or vivant,
Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
Un sourire discret lui donna la réplique,
Et je baisai sa main blanche, dévotement.
- Ah ! les premières fleurs, qu'elles sont parfumées !
Et qu'il bruit avec un murmure charmant
Le premier oui qui sort des lèvres bien-aimées !
FÊTES GALANTES - LES COQUILLAGES
Chaque coquillage incrusté
Dans la grotte où nous nous aimâmes
A sa particularité
L’un a la pourpre de nos âmes
Dérobée au sang de nos cœurs
Quand je brûle et que tu t’enflammes ;
Cet autre affecte tes langueurs
Et tes pâleurs alors que, lasse
Tu m’en veux de mes yeux moqueurs ;
Celui-ci contrefait la grâce
De ton oreille, et celui-là
Ta nuque rose, courte et grasse ;
Mais un, entre autres, me troubla.
"Libre à nos Inspirés, cœurs qu'une œillade enflamme,
D'abandonner leur être aux vents comme au bouleau ;
Pauvres gents ! l'art n'est pas d'éparpiller son âme :
Est-elle en marbre, ou non, la Vénus de Milo ?
Nous donc, sculptons avec le ciseau des Pensées
Le bloc vierge du Beau, Paros immaculé,
Et faisons-en surgir sous nos mains empressées
Quelque pure statue au péplos étoilé,
Afin qu'un jour, frappant de rayons gris et roses
Le chef-d'oeuvre serein, comme un nouveau Memnon,
L'Aube-Postérité, fille des temps moroses,
Fasse dans l'air retentir notre nom !"
(Extrait du poème "Épilogue")
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.
Nevermore
Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? L'automne
Faisait voler la grive à travers l'air atone,
Et le soleil dardait un rayon monotone
Sur le bois jaunissant où la bise détone.
Nous étions seul à seule et marchions en rêvant,
Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent.
Soudain, tournant vers moi son regard émouvant
« Quel fut ton plus beau jour? » fit sa voix d'or vivant,
Sa voix douce et sonore, au frais timbre angélique.
Un sourire discret lui donna la réplique,
Et je baisai sa main blanche, dévotement.
- Ah ! les premières fleurs, qu'elles sont parfumées !
Et qu'il bruit avec un murmure charmant
Le premier oui qui sort de lèvres bien-aimées !
LASSITUDE
De la douceur, de la douceur, de la douceur !
Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante.
Même au fort du déduit parfois, vois-tu, l’amante
Doit avoir l’abandon paisible de la sœur.
Sois langoureuse, fais ta caresse endormante,
Bien égaux tes soupirs et ton regard berceur.
Va, l’étreinte jalouse et le spasme obsesseur
Ne valent pas un long baiser, même qui mente!
Mais dans ton cher cœur d’or, me dis-tu, mon enfant,
La fauve passion va sonner L’olifant!!...
Laisse-la trompetter à son aise, la gueuse!
Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main,
Et fais-moi des serments que tu rompras demain,
Et pleurons jusqu’au jour, ô petite fougueuse!
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En sourdine
Calmes dans le demi-jour
Que les branches hautes font,
Pénétrons bien notre amour
De ce silence profond.
Fondons nos âmes, nos cœurs
Et nos sens extasiés,
Parmi les vagues langueurs
Des pins et des arbousiers.
Ferme tes yeux à demi,
Croise tes bras sur ton sein,
Et de ton cœur endormi
Chasse à jamais tout dessein.
Laissons-nous persuader
Au souffle berceur et doux
Qui vient à tes pieds rider
Les ondes de gazon roux.
Et quand, solennel, le soir
Des chênes noirs tombera,
Voix de notre désespoir,
Le rossignol chantera.
Paul Verlaine, Fêtes galantes, 1869
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime,
Et qui n’est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend.
Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main, et fais-moi des serments que tu rompras demain.
( Poèmes saturniens)
Les sanglots longs des violons de l'automne
Blessent mon coeur d'une langueur monotone.
Tout suffocant et blême quand sonne l'heure
Je me souviens des jours anciens et je pleure
Et je m'en vais au vent mauvais qui m'emporte
De çà , de là, pareil à la feuille morte.