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Critique de P____


Il est temps de réparer une injustice. Non le grand Boris n'est pas seulement l'auteur de l'Écume des Jours. Non, Vian ne se résume pas uniquement au sulfureux J'irai cracher sur vos tombes, roman de commande, rédigé suite à un pari.
Que penserait-il de ce catalogage en règle, lui, l'homme multiple ? Ingénieur, journaliste, musicien, chanteur, fêtard, inventeur, poète, écrivain, parolier, dramaturge, trublion, empêcheur de tourner en rond, traducteur, zazou, rêveur, pataphysicien, la liste est longue.
Il serait cruel de résumer ce boulimique d'expériences à quelques scandales et succès (posthumes) de librairie.
Car Boris Vian est avant tout l'auteur d'une oeuvre riche et protéiforme. Au premier rang de laquelle figure l'Automne à Pékin.
Point de feuilles mortes, point de chinoiseries dans cet ovni là. Dès les premières pages le ton est donné : burlesque, absurde, féroce. le roman relate la construction d'une ligne de chemin de fer au beau milieu du désert d'Exopotamie. Inutile me direz-vous ? Il en faut plus pour arrêter nos protagonistes pour qui la voie ferrée devra absolument traverser l'unique bâtiment existant.
Car ces personnages ne sont pas comme les autres, jugez plutôt : un médecin obnubilé par l'aéromodélisme, un archéologue qui brise les vases qu'il met à jour afin de les faire entrer dans des boîtes, un ermite à la religion étrange et dont l'acte saint consiste à forniquer ad vitam aeternam, une femme à la peau cuivrée, un héros avec « un nom de chien », une chaise malade, un avion qui mord, un contremaître fumiste, des homos revendiqués ( en 1946!), un interne sadique…
Mais au milieu de tout ce rien, de ces personnages creux au verbiage incessant et de cette entreprise assez (complètement) vaine, Vian parvient à nous parler des relations, d'amour, d'incompréhension surtout. Sous couvert de l'humour et de l'absurde, il règle aussi ses comptes avec l'administration, la religion, le monde du travail, les discriminations…
On y retrouve la patte de l'auteur, les jeux de mots en pagaille, les énumérations, les prises au pied de la lettre, l'inventivité, l'humour et la fantaisie permanente. le drame aussi, et le dénouement cataclysmique, comme souvent. Car si l'on rit beaucoup, le constat n'en reste pas moins très sombre. Derrière l'amuseur, l'image d'éternel adolescent, on sent poindre le regard acéré et les désillusions.
Mais on parle toujours mal de ce que l'on aime. J'aurais souhaité écrire une critique plus en adéquation avec ce roman. Plus drôle, plus originale, plus décalé. Plus, plus…Mais je n'ai pas un dixième du talent de ce type là.
Lisez Boris Vian, tout Boris Vian. Mais spécialement, celui-ci.
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