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Citations sur Chants du désespéré (1914-1920) (11)

Chant du désespéré (1er poème du recueil)

Au long des jours et des ans,
Je chante, je chante.
 
La chanson que je me chante
Elle est triste et gaie :
La vieille peine y sourit
Et la joie y pleure
 
C’est la joie ivre et navrée
Des rameaux coupés,
Des rameaux en feuilles neuves
Qui ont chu dans l’eau ;
 
C’est la danse du flocon
Qui tournoie et tombe,
Remonte, rêve et s’abîme
Au désert de neige ;
 
C’est, dans un jardin d’été,
Le rire en pleurs d’un aveugle
Qui titube dans les fleurs ;
 
C’est une rumeur de fête
Ou des jeux d’enfants
Qu’on entend du cimetière,
C’est la chanson pour toujours,
Poignante et légère,
Qu’étreint mais n’étrangle pas
L’âpre loi du monde ;
 
C’est la détresse éternelle,
C’est la volupté
D’aller comme un pèlerin
Plein de mort et plein d’amour !
 
Plein de mort et plein d’amour
Je chante, je chante !
 
C’est ma chance et ma richesse
D’avoir dans mon coeur
Toujours brûlant et fidèle
Et prêt à jaillir,
 
Ce blanc rayon qui poudroie
Sur toute souffrance ;
Ce cri de miséricorde
Sur chaque bonheur.
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SI L'ON GARDAIT...

Si l’on gardait, depuis des temps, des temps,
Si l’on gardait, souples et odorants,
Tous les cheveux des femmes qui sont mortes,
Tous les cheveux blonds, tous les cheveux blancs,
Crinières de nuit, toisons de safran,
Et les cheveux couleur de feuilles mortes,
Si on gardait depuis bien longtemps,
Noués bout à bout pour tisser les voiles
Qui vont sur la mer,

Il y aurait tant et tant sur la mer,
Tant de cheveux roux, tant de cheveux clairs,
Et tant de cheveux de nuit sans étoiles,
Il y aurait tant de soyeuses voiles
Luisant au soleil, bombant sous le vent,
Que les oiseaux gris qui vont sur la mer,
Que les grands oiseaux sentiraient souvent
Se poser sur eux,
Les baisers partis de tous ces cheveux,
Baisers qu’on sema sur tous ces cheveux,
Et puis en allés parmi le grand vent…

*

Si l’on gardait, depuis des temps, des temps,
Si l’on gardait, souples et odorants,
Tous les cheveux des femmes qui sont mortes,
Tous les cheveux blonds, tous les cheveux blancs,
Crinières de nuit, toisons de safran,
Et les cheveux couleur de feuilles mortes,
Si on gardait depuis bien longtemps,
Noués bout à bout pour tordre des cordes
Afin d’attacher
A de gros anneaux tous les prisonniers
Et qu’on leur permît de se promener
Au bout de leur corde,

Les liens des cheveux seraient longs, si longs,
Qu’en les déroulant du seuil des prisons,
Tous les prisonniers, tous les prisonniers
Pourraient s’en aller
Jusqu’à leur maison…
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Amitié, amitié de tous mes amis,
Innombrable amitié de mes camarades,
Je tournerai mes veux seulement vers ton
visage :
Il avait, dans l'âpre aventure
La tendresse de l'arc-en-ciel
Et déployait comme lui son sourire
Sur un ciel mauvais et plombé d'orage.

Je me délivrerai, amitié, en te chantant;
Vivace amitié toujours retrouvée
Dans tous les remous et à tous les vents !

Ah ! de quoi nos coeurs, dans ce long exil
Auraient-ils pu vivre, amitié, sans toi?
Et sur quoi de certain, sinon sur toi
Pourrions-nous fonder aujourd'hui la joie.
L'inquiète joie, la fragile joie?
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Pose donc un peu ta charge
Et sans la quitter
Détends-toi, soupir et chante
Sens toi jeune.
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La pomme et l'escargot

Il y avait une pomme
A la cime d'un pommier;
Un grand coup de vent d'automne
La fit tomber sur le pré !

Pomme, pomme,
T'es-tu fait mal ?
J'ai le menton en marmelade
Le nez fendu
Et l'oeil poché !

Elle tomba, quel dommage,
Sur un petit escargot
Qui s'en allait au village
Sa demeure sur le dos

Ah ! stupide créature
Gémit l'animal cornu
T'as défoncé ma toiture
Et me voici faible et nu.

Dans la pomme à demi blette
L'escargot, comme un gros ver
Rongea, creusa sa chambrette
Afin d'y passer l'hiver.

Ah ! mange-moi, dit la pomme,
puisque c'est là mon destin;
par testament je te nomme
héritier de mes pépins.

Tu les mettras dans la terre
Vers le mois de février,
Il en sortira, j'espère,
De jolis petits pommiers.
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SOUVENIRS
Souvenirs, ô souvenirs
Le présent pèse sur vous
Comme l'eau sur des jardins
Submergés depuis trois ans !

La guerre sur vous s'augmente
Et ajoute à votre foule
D'autres souvenirs noyés.

Je voudrais m'en aller seul
Sur un haut plateau;
Je ne verrais que le ciel,
Le ciel de toujours

Et les tribus d'herbes frêles
Qui tremblent et rêvent.

J'établirais mon abri
Dans les cailloux millénaires
Fidèles du vieux soleil.

C'est là qu'après trois années
Enlisées dans les désastres,
Je retrouverais
Ce silence où les pensées
Font leur bruit violent.

O souvenirs de la guerre,
C'est là que je connaîtrais
Vraiment vos voix redoutables;

Et c'est là qu'enfin mon cœur
Pourrait délivrer
Sa colère et sa douleur.
Sa honte et ses larmes.
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Ah ! que je vous regarde …
À Berthold Mahn


Extrait 2

Qu’en toi je m’agenouille et que je cache en toi,
Herbe, ma face d’homme qui fait fuir les bêtes !
Que je sois confondu à ta taille ; et ta loi,
Que je la réapprenne et qu’elle me relève !

Brins verts contre ma bouche et que mon souffle fait trembler,
Je vous confie la détresse de l’homme
Et la honte où il est d’avoir encore abandonné
Le soin de son royaume au rebut des âmes.

Herbe que rajeunit et lave chaque aurore,
Je convie en ton cœur les cœurs toujours aimants ;
Je convie en ton cœur ces peuples vieux qui pleurent,
Repliés sous un joug sanglant !
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Ah ! que je vous regarde …
À Berthold Mahn


Extrait 1

Ah ! que je vous regarde avec des yeux fervents,
Arbres grandis ici et là sans contrainte,
Mes frères qu’on n’a pas comptés et mis en rangs
Et qui mêlez doucement vos bras et vos têtes !

Que je ne te force pas à tomber avant l’heure,
Petite feuille d’or qui rêves en te berçant ;
Tu naquis pour danser dans l’air et la lumière,
Reste jusqu’à la fin de ta danse et de ton sang !

Ah ! et toi, gazon vif, herbe populeuse, heureux peuple
Que font jouer les vents et l’ombre des nuages ;
Clémence de la terre ! Espérance invincible
Qui renaît de la cendre et qui perce la neige !
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Chant du désespéré


Au long des jours et des ans,
Je chante, je chante.

La chanson que je me chante
Elle est triste et gaie :
La vieille peine y sourit
Et la joie y pleure

C’est la joie ivre et navrée
Des rameaux coupés,
Des rameaux en feuilles neuves
Qui ont chu dans l’eau ;

C’est la danse du flocon
Qui tournoie et tombe,
Remonte, rêve et s’abîme
Au désert de neige ;

C’est, dans un jardin d’été,
Le rire en pleurs d’un aveugle
Qui titube dans les fleurs ;

C’est une rumeur de fête
Ou des jeux d’enfants
Qu’on entend du cimetière,
C’est la chanson pour toujours,
Poignante et légère,
Qu’étreint mais n’étrangle pas
L’âpre loi du monde ;

C’est la détresse éternelle,
C’est la volupté
D’aller comme un pèlerin
Plein de mort et plein d’amour !

Plein de mort et plein d’amour
Je chante, je chante !

C’est ma chance et ma richesse
D’avoir dans mon cœur
Toujours brûlant et fidèle
Et prêt à jaillir,

Ce blanc rayon qui poudroie
Sur toute souffrance ;
Ce cri de miséricorde
Sur chaque bonheur.

(p.9)
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I

Toi qui rêvais d'accorder dans ta voix
L'allégresse d'aimer
Et ce sanglot voilé, toujours fidèle,
Appel de l'infini dans l'ombre de la joie,
Ce beau sanglot du cœur avide et débordé
Devant notre impuissance, hélas, à tout étreindre,

Toi qui aimais chanter même la chanson triste,
Mais où l'espoir sourit
Comme un éveil du vent ou l'envol d'un oiseau
Dans un feuillage inerte accablé de midi,
Toi qui voulais chanter aux hommes leur fortune
La plus certaine et la plus délaissée,
Dis, sauras-tu chanter encore ?

(p.65)
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