Lui et moi avions tous deux affronté ce moment où la mort est la seule issue, où la vie n’est plus qu’une question de durée.
Parfois, à trop réfléchir, on se met soi-même des bâtons dans les roues.
- Non, a t-elle rectifié, mais pas sur le ton d'une dénégation indignée, simplement comme si j'avais choisi le mauvais terme. Pas un parasite. Un asticot.
A la fois surpris et dégoûté, je me suis écarté.
- Un parasite s'accroche à un hôte vivant, comme une puce qui suce le sang d'un chien, a t-elle expliqué. L'asticot se repaît sur les cadavres. Moi, Andy ici présent, Adare... on est tous des asticots. Le monde est mort il y a vingt ans, Stones. On ne fait qu'en grignoter la carcasse.
D'après moi, elle appréciait simplement le fait de pouvoir, dans le cadre de son travail, brûler et piller des villes. Un asticot sur le cadavre du monde - elle l'avait elle-même admis devant moi.
J'avais consacré toute mon énergie à trouver un moyen d'améliorer la vie de ces gens, au point d'éventuellement me sacrifier pour les libérer des horreurs du camp. Curieusement, mourir en apothéose est assez facile; mais continuer à vivre après un moment de triomphe, ça, c'est autrement plus compliqué.
- Le roseau ploie, mais il survit à la tempête. Le chêne se dresse fièrement, mais il rompt.
J'ai de nouveau eu cette impression qu'elle citait un dicton qu'elle avait mémorisé, des mots qui ne lui appartenaient pas.
Tu te mets à penser que tu es intouchable, ou que tu as été choisi pour un but supérieur. Une erreur fatale. Ce monde n'aime rien tant qu'un homme qui se croit immortel - et il adore lui prouver qu'il se trompe. Si tu es malin, tu n'hésites pas à te rabaisser de temps à autre. Histoire de ne pas oublier pourquoi tu dois rester vigilant.
Maintenant, imagine : un jour, un type se pointe en chemise violette; on pousse des oh! et des ah!, on pense que c'est vraiment trop cool. Mais le lendemain, le gars revient, et il se rend compte que tout le monde porte la même chemise. Il ne sort plus du lot. Alors, il a besoin d'un joli chapeau pour se distinguer. C'est sans fin.
Les gens se déchirent entre eux quand ils se sentent en sécurité. Ils se chamaillent, se disputent et se bagarrent. Mais devant un ennemi commun, une menace extérieure, ils se serrent les coudes, et rien ne peut les séparer.
Juste avant la catastrophe, l’obésité était un véritable fléau dans ce pays. Tout le monde s’inquiétait de devenir trop gros, de trop manger au point de se ruiner la santé. (…)
Alors comme ça, l’apocalypse zombie n’aura été qu’un régime minceur ?