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Critique de SerialLecteurNyctalope


INÉDIT

Ernst Wiechert est un auteur saisissant. Je n'avais que bien rarement rencontré une telle écriture porté par l'effluve d'une évocation. Je n'aurais peut-être pas les mots pour la décrire tant ce côté suranné mêlé à l'ode de la nature, parait enchanteur. J'imagine ainsi ce texte déclamé sur une scène de théâtre dans une sorte de monologue ambré. Il y ainsi peu de dialogues dans ce récit où Michael, six ans, est le seul témoin de l'arbre qui vient de s'abattre sur deux hommes. Son père est l'un des deux et jamais je n'ai lu un incipit aussi poignant. Cet enfant démuni qui chasse les mouches autour de son père sans avertir la première personne passante. Cet enfant est différent, déjà très sur de lui et à la marge d'une société qu'il prend avec hauteur devant tant d'absurdité humaine. On sent chez lui une force qui, à la fois le dépasse pour son âge et qu'il contrôle assez aisément. Michael, fils d'une veuve, traversera ainsi les années dans un petit village de la Prusse orientale juste avant la première guerre mondiale, où l'on distinguera son évolution en filigrane de celle de la nature. Il est pauvre, surement le plus pauvre et d'une humanité sans pareille. le berger prendra forme au fil des saisons en y apportant la chaleur et l'amour nécessaire à son troupeau.

Traduit par Sylvaine Duclos, vous serez surement déboussolé au départ par cette histoire qui ne ressemble à aucune autre et encore moins en 1935 date à laquelle Roman d'un berger est écrit. À l'aune d'une guerre destructrice, d'un nazisme déjà prédominant, Ernst Wiechert, né dans une maison dans les bois deviendra enseignant et opposant au régime d'Hitler et interné à Buchenwald en 1938 (ce qu'il racontera dans son livre le bois des morts). Il y a dans ce conte un lyrisme naturel qui se dégage, une lumière de sagesse qui réfléchit sur le papier. Sans jamais être manichéen ou mièvre, ce roman éblouit par sa simplicité dans les faits. Ernst Wiechert a commencé « avec la forêt et la Bible et sans doute en terminerai-je avec elles ». On comprend assez vite que ce roman est celui de sa propre nostalgie mais aussi celui d'une conscience chrétienne. Si tous les personnages comportent des prénoms bibliques, on sent poindre David contre Goliath en permanence dans l'effigie du berger. Certains en feront les frais, d'autres en profiteront pour faire régner leur loi. Vous pouvez ainsi vous balader avec Michael au coeur d'une forêt où l'humanité règne par le truchement de cet enfant. C'est à la fois inédit, tendre et dur, philosophique et universel. Chacun y apposera sa sensibilité mais une chose est sure : il ne peut laisser indifférent.

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