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Une frêle fleur des camps à la recherche de racines dans les failles du béton armé de l'Histoire…Bouleversant et instructif. Une lecture nécessaire sans aucun doute. Pour ne pas dire indispensable.

Livre témoignage, livre historique…mais pas que ! Avec « Elle venait de Marioupol », Natascha Wodin combine sa propre recherche généalogique en quête d'identité, l'explication sans pathos de pans entiers de l'histoire slave pour mettre en lumière certains faits peu connus et pourtant terrifiants, mais aussi une structuration qui donnerait presque au récit des allures de thriller tant c'est passionnant.
Ce qui m'a le plus marqué je crois dans cette recherche éperdue fut de comprendre comment ce peuple ukrainien fut broyé par deux dictatures aussi terrifiantes l'une que l'autre, celle de Staline en Ukraine, puis celle de Hitler en Allemagne. Deux extrêmes qui ont utilisé des méthodes différentes pour arriver à la même fin : l'extermination de millions de personnes. L'une l'a fait brutalement, l'autre de manière plus sournoise.

Instructif et passionnant, pourtant le premier chapitre m'a fait un peu peur car nous assistons à la recherche des ancêtres de Natascha Wodin, peuplée de personnes que je finissais par mélanger. L'arbre généalogique se construit peu à peu sous nos yeux à coup de rebondissements, d'imprévus, grâce à l'aide de personnes généreuses et passionnées, de chance aussi, c'est très intéressant mais je suis restée spectatrice un peu déboussolée par cette recherche complexe de racines. Avec tout de même cette trame de fond, obsédante : pourquoi sa mère s'est-elle suicidée à l'âge de 40 ans ? Qu'a vécu cette femme pour en arriver à une telle extrémité alors qu'elle était maman de deux petites filles ? La narratrice sait juste que sa mère a été déportée durant la Seconde Guerre Mondiale à l'âge de 23 ans, avec son père, pour du travail forcé, de Marioupol en Allemagne. Ils deviendront des « Ostarbeiter », des travailleurs de l'Est, des travailleurs forcés. Elle a conscience que sa mère a traversé des années peu quelconques : elle a vécu en effet pendant la guerre civile les purges et les famines en Union Soviétique, puis les années de la Seconde Guerre Mondiale et du national-socialisme où les ukrainiens furent considérés comme une race inférieure, juste au-dessus des Juifs et des Roms. La hiérarchie des races. de quoi ôter tout gout à la vie.

Natascha Wodin se faisait une image complètement fantasmée de sa mère, basée sur quelques brides de souvenirs, des souvenirs d'enfant, « simple écume déposée dans ma mémoire par des décennies de fermentation », il est intéressant de voir comment la lumière se fait peu à peu sur ce personnage énigmatique, au fur et à mesure que cette mère devient, au fil des éléments trouvés, une personne extérieure à la narratrice. Intéressant de ressentir le trouble de Natascha Wodin, de la voir se redresser au fur et à mesure que ses racines grandissent en elle. L'auteure semble se ramifier et gagner en densité.

Les trois autres chapitres sont incroyables. Une fois rentrée dans le livre, avec cet arbre généalogique que je regrettais presque de ne pas avoir noté, intéressée mais légèrement refroidie par la complexité de cette histoire de famille, les trois chapitres se concentrent sur respectivement la tante de Natascha Wodin, soeur de sa mère, déportée en Sibérie car faisant partie d'un mouvement anti-prolétaire, puis sur ses parents et leurs conditions de vie en tant qu'Ostarbeiter en Allemagne sous Hitler, et enfin sur elle, petite fille, petite fleur des camps. Trois chapitres qui se lisent comme un roman historique, trois chapitres durant lesquels nous prenons en pleine face les morsures glaciales de la Sibérie, la pauvreté et la bestialité des camps de travail forcé, la promiscuité qui pousse à la folie, les affres de la famine, la résilience, la survie et les espoirs d'une petite fille. C'est bouleversant. le regard de l'auteure sur sa mère est d'une tendresse infinie…

« Elle a l'air d'un enfant mais l'innocence et la vulnérabilité de son visage se mêlent à un savoir terrifiant. Difficile de croire qu'un être d'une telle fragilité puisse supporter un tel savoir – comme si un poids d'une tonne était suspendu à un fil ».

Notons une plume élégante, sans ton larmoyant pour parler de l'innommable, délicate et poétique pour décrire la beauté de paysages ou de lieux. J'ai aimé ces deux niveaux d'écriture qui apportent beaucoup de charme au récit, beaucoup de force et d'authenticité, malgré le côté parfois insoutenable. Dans le premier chapitre, que j'ai certes un peu critiqué, j'ai remarqué combien la nature enveloppant la narratrice se transforme au fur et à mesure de l'avancée des recherches, notamment ce lac sur lequel donne son balcon. Coloré et radieux lors des premières trouvailles et des espoirs engendrées, il se fera plus brumeux et inquiétant au fur et à mesure de l'avancée des recherches.

« Des levées de soleil comme sur ce lac, je n'en avais encore jamais vu ailleurs. Ils s'annonçaient dès trois heures de matin à l'horizon, d'abord comme un rosissement à peine perceptible du ciel au-dessus de l'eau, qui se transformait progressivement en une orgie lumineuse d'une beauté irréelle. Je m'étonnais que tout le monde soit endormi, que personne à part moi ne semble assister à ce spectacle cosmique. le ciel brûlait de toutes ses couleurs, du vert clair à l'or, du violet au rouge flamboyant, chaque jour différent, chaque jour nouveau : des spectacles de lumière, des tableaux surréalistes que le soleil faisait surgir dans le ciel et dont je suivais la métamorphose minutieuse à partir de mon balcon, comme d'une loge quelque part dans l'univers, étourdie par les cris de panique des oiseaux aquatiques qui semblaient attendre une apocalypse, un événement sans précédent bien au-delà des perceptions humaines. Les couleurs s'épaississaient, explosaient, puis elles commençaient à s'estomper, à s'éteindre doucement, à passer progressivement dans la lumière blanche, éblouissante, qui se répandait peu à peu sur le lac ».

J'ai eu du mal à quitter le livre étonnamment. C'est une lecture paradoxalement éprouvante mais aussi attachante. Natascha Wodin devint peu à peu Natascha pour moi. Je me suis attachée à cette femme, à son passé, à sa recherche, à la façon dont elle nous le transmet. Elle y a mis toute son âme. Il ne s'agit pas seulement, comme elle le craignait, d'une simple biographie fictive basée sur l'historiographie, sur les faits avérés concernant les temps et les lieux où a vécu sa mère, non c'est avant tout un livre généreux, détaillé, fouillé, basé sur des matériaux divers, un témoignage précieux. Et bien entendu sa lecture est très particulière en cette année 2022. Pour comprendre et prendre du recul. Un grand merci à @LambertValérie et à @Dandine pour m'avoir fait découvrir ce livre qui restera longtemps en moi !
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Marioupol, Marioupol, voilà bien une ville qu'une triste actualité nous fait connaître aujourd'hui…
Mais pour Natasha Wodin, Marioupol n'évoquait pas grand chose, sinon une ville de l'est, elle se l'imaginait couverte de neige ; un simple entrefilet de presse sur un match de football entre l'équipe de cette ville et une équipe allemande la pousse à se renseigner, elle découvre une ville au climat remarquablement doux, sur la mer d'Azov.
Marioupol n'était pour elle que la ville de naissance de sa mère, Evguénia Iakovlevna Ivachchenko. Elle ne connaît quasi rien d'elle, sinon le lieu de sa naissance en 1920, son mariage, son départ comme travailleuse de l'Est en Allemagne et enfin son suicide dans les eaux de la Regnitz alors que Natasha n'avait que dix ans.

En 2013, Natasha Wodin se lance à la recherche de l'histoire de sa mère en tapant son nom sur Internet.

Le livre nous permet de découvrir en même temps qu'elle, petit à petit, et en la suivant dans ses moments de joie, de découragement et de tristesse ce que fut la vie brisée de sa mère.

Ce parcours est prenant comme un thriller ! le suspense grandit, des pistes s'ouvrent, d'autres n'aboutissent à rien. L'autrice va de découvertes en découvertes, reçoit une aide impressionnante de Konstantin qui gère le site de généalogie Azov's Greeks, correspond avec des membres éloignés de sa famille dont elle ignorait tout, reçoit des photos et même deux journaux écrits par Lidia, soeur de sa mère.

La vie de sa mère a été brisée, elle a été bousculée par l'Histoire et ses tragédies : la révolution russe, la terreur soviétique, la famine, le travail forcé en Allemagne, la condition de personne déplacée en Allemagne après la guerre, son mariage malheureux, elle ne cessera de répéter à sa fille : “Si tu avais vu ce que j'ai vu”.

Le contexte historique est donc particulièrement intéressant : révolution russe, terreur, les frictions entre ceux qui parlent ukrainien et ceux qui parlent russe, la guerre, l'esclavage des travailleurs forcés en Allemagne, l'hostilité de la population à leur égard après la guerre…
Ce n'est toutefois pas le seul attrait du récit, l'histoire de la famille l'est tout autant, on y côtoie des opposants au régime soviétique comme des partisans, des peines de prison, d'exil ou de goulag, un cousin issu de germain qui tue sa mère, un chanteur d'opéra.
Il y a encore autre chose qui m'a plu : la très belle description du lac Schaal dans le Mecklembourg et l'émerveillement qu'il apporte à l'autrice.
J'ai moins apprécié la comparaison faite des camps de travail forcé avec la Shoah, heureusement légèrement suggérée.

J'ai aimé le récit, un récit sans pathos, qui a pu rester sobre face à des événements qui ne le sont pas.
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J'ai voulu lire ce livre pousse par son titre, portant le nom d'une ville presente ces jours-ci dans tous les ecrans, pour le mauvais et pour le pire.


C'est un travail de recherche qu'a enterpris Wodin sur sa famille, surtout pour essayer de comprendre pourquoi sa mere s'est suicidee quand elle n'avait que dix ans. Elle utilise des livres d'histoire, l'internet, ainsi que des documents d'autres familles pour compenser les pieces manquantes du puzzle qu'elle essaye de completer. Ainsi, malgre un appreciable effort de rigueur historique, “ce qui fut” se mele au “ce qui surement fut”. Et ce, jusqu'aux moments ou elle a quelques souvenirs de son enfance, devenant alors la narratrice du devenir de ses parents jusqu'a la mort de sa mere.


Le livre est divise en quatre parties. Dans la premiere, la quete hesitante du debut, utilisant le web, m'a ete d'une lecture penible. Trop de sites internet visites, trop de noms et de correspondants dans les essais d'echafauder un arbre genealogique ont failli me faire lacher. Mais je suis un lecteur coriace et j'en ai ete recompense par la suite.

La deuxieme partie resume le journal que sa tante Lidia a redige a 80 ans. Les horreurs de la revolution sovietique a Marioupol; l'ostracisme que subit sa famille parce qu'anciens capitalistes; la faim endemique pendant de tres longues annees. “Il ne s'agit que de survie". En 1934 Lidia est jugee comme dissidente et deportee au camp de Medvejia Gora ou elle est lachee dans la nature sachant qu'elle ne peut s'enfuir: il n'y a autour que marais dangereux, forets, ours et loups. La, elle rencontre son futur mari, Youri, qui lui trouve un poste de prof pour des jeunes criminels dans une colonie d'enfants et adolescents entre huit et dix-sept ans. Des gamins des rues, des orphelins, des fils de prisonniers, certains devenus des criminels, des assassins, et parfois dès l'enfance: “Après le cours, Lidia consulte le dossier d'Ivanov 26 qu'elle a désigné comme délégué. Ce jeune de seize ans aux yeux bleus et clairs a déjà tué trois personnes. Il a étouffé sa grand-mère avec un coussin pour lui voler l'argent qu'elle avait épargné pour lui, il a défoncé le crâne d'un homme au marteau lors d'un cambriolage et tué un policier par balle. Il avait douze ans à l'époque.” Sa peine finie elle reste sur place avec son mari Youri et son fils Igor. Quand la guerre eclate, en Octobre 41, ils sont evacues vers le Kazakhstan.

Dans la troisieme partie elle revient a sa mere, Evguenia: elle a travaille pour les allemands a Marioupol et en 43 elle quitte avec les allemands qui evacuent la ville et passe avec son mari six mois a Odessa. “La dernière image de sa ville qui s'offre à ma mère est celle d'une gigantesque destruction. Il est clair depuis longtemps que la guerre est perdue, mais au dernier moment les soldats allemands dévastent ce qui reste encore de Marioupol. Avec une rage aveugle, ils font sauter un bâtiment après l'autre, visent au lance-flammes les fenêtres et les portes des maisons restées intactes, ils détruisent les écoles, les jardins d'enfants, les bibliothèques, les greniers à céréales et les réserves d'eau pour laisser autant de terre brûlée que possible derrière eux.” Mais “le 10 avril 1944, Odessa est reconquis par l'armée rouge – mes parents quittent l'Ukraine au dernier moment.”

Puis vient le sejour de ses parents en Allemagne d'apres des etudes et des archives. A Leipzig, dans l'usine Flick qui produit des avions, comme travailleurs forces, zwangsarbeiters, devant toujours porter l'insigne OST, ostarbeiter, souffrant de faim, de mauvais traitements et toujours de peur. Quand les americains arrivent ils ne sont pas rapatries (par chance. En Russie on les aurait surement juges comme collabos et liquides) et deviennent des DP, "displaced persons", des deplaces, a Nuremberg.

Quatrieme partie: A Nuremberg ils sont heberges (caches) par un allemand et reussissent donc a fuir les camps de DP. le pere reussit a travailler pour les americains dans une chorale de chants russes. Ils essaient de partir en Amerique mais le visa leur est refuse. Puis ils sont transferes au camp de Valka et la commence pour l'auteure l'ecole et la langue allemande. Avec le temps, de DP il deviennent apatrides avec le droit de rester en Allemagne et on leur donne un petit logement a la limite de la ville. En fait ils arrivent a peine a vivre subissant segregation et haine de la part des allemands. le pere voyage avec sa chorale ethnique et reste toujours absent. La mere se laisse de plus en plus aller pour finir par se noyer dans la Regnitz. Elle n'avait qu 40 ans.


Voila pour l'histoire familiale. Qui est beacoup plus que cela parce que le livre touche quelques episodes parmi les plus noirs du XXe. siecle. Certains tres documentes comme le harcelement des bourgeois par les revolutionnaires russes, d'autres qui commencent a l'etre, comme le holodomor, la grande famine provoquee par Staline qui fit des millions de morts en Ukraine, et un qui reste encore dans une certaine obscurite, l'exploitation de millions d'esclaves amenes de l'est par les nazis pour alimenter le capitalisme du Reich et sa machinerie de guerre en quelques milliers de camps de travaux forces.
Les rescapes des camps de la mort ont produit une importante litterature mais les esclaves non juifs qui ont frole l'extermination et y ont echappe grace a leur travail ont ete beaucoup plus silencieux. Ou meme silencies. Car personne n'aurait pu pretendre ne pas etre au courant, ne rien savoir: dans chaque ville allemande, dans chaque ferme autrichienne, ces etrangers etaient presents, soumis, individuellement ou par milliers, a un travail harassant, sinon a des conditions de vie bestiales. Meme le celebre Oskar Schindler avait etaye son entreprise sur le travail des denommes “ostarbeiter", hommes femmes et enfants, polonais ukrainiens ou russes, que les nazis qualifiaient de “materiel humain de derniere categorie”.
Et apres la guerre? Ceux restes en Allemagne ont continue longtemps a etre discrimines, et leurs enfants ont subi l'aversion (jusqu'a la haine) de leurs camarades autochtones. Mais, comme Natascha Wodin, ils ont reussi a transcender, a vaincre tout cela.


En fin de compte, apres un debut trainaillant, Wodin a reussi a ecrire quelque chose d'emouvant. Un travail de recherche tres pousse a fini par devenir une tres excitante litterature. Je suis sorti bouleverse de ce livre. Je n'oublierai pas de sitot sa mere, cette femme qui n'a pu surmonter le poids des abominations qu'elle avait (elle et sa famille) subies. Ce livre de memoire restera dans la mienne.
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En préambule, je voudrais dire à quel point ce livre est bouleversant et sa lecture à mon sens indispensable pour qui s'intéresse à l'histoire de la seconde guerre mondiale, à la vie des gens, et j'ai même envie de dire à l'humanité toute entière.

Elle venait de Marioupol raconte l'histoire peut-être méconnue de ces Ukrainiens en masse qui constitutèrent pendant la deuxième guerre mondiale les"travailleurs de l'Est".
La mère, mais aussi le père de Natasha Wodin en faisaient partie. Déportés d'Ukraine, ils se retrouvent à travailler en Allemagne dans une usine d'armement, ils vivent dans des camps qu'on peut sans peine assimilés à des camps de concentration.
À la fin de la guerre, point de retour possible, Staline liquide tous ceux qui reviennent, L'Allemagne dans sa défaite les hait.
Natasha Wodin, à l'automne de sa vie se met en quête de comprendre qui était sa mère, son identité, cette mère qui se donnera la mort en se noyant, lorsqu'elle aura 11 ans, ses dernières paroles terribles, elle dira à sa petite fille qu'elle est une enfant de Satan.
Natasha Wodin se lance dans la recherche de sa famille en pianotant sur l'Internet russe.
Par un hasard et une chance incroyable, elle finira par retrouver et surtout reconstituer l'histoire de sa famille.
À la lecture de ce livre, on s'interroge comment Natasha Wodin a pu vivre la suite de sa vie, après le décès de sa mère, quelle force elle a du trouver pour trouver une raison de vivre.

Ce livre est à la fois un témoignage, mais aussi L'HISTOIRE de notre monde
Je lui souhaite une longue vie et j'espère beaucoup, beaucoup de futurs lecteurs.
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Née de parents ukrainiens envoyés comme travailleurs forcés en Allemagne en 1944, Natasha Wodin décide de mener l'enquête sur les origines de sa mère, suicidée à 36 ans alors qu'elle n'avait que 11 ans.
Aidée d'un généalogiste amateur qui maîtrise les recherches internet, elle va découvrir une famille dont elle ne soupçonnait ni l'existence, ni les épreuves que chacun d'entre eux a rencontrées, et va de cette manière, comprendre les choix de sa mère et sa plongée dans la folie.
Si tu avais vu ce que j'ai vu», répétait-elle à sa fille.
On découvre alors avec elle le sort d'une famille éclatée par les dictatures : celle de Staline avec les goulags, celle de Hitler avec les camps de travail. Et l'exil, la honte, la misère, la faim, la disparition des êtres chers...

Émouvant certes, mais en tant que témoignage historique.
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Quand j'ai attaqué ce récit autobiographique, je ne savais absolument pas qui était Natascha Wodin, traductrice et auteure allemande, d'origine ukrainienne. Je suis, apparemment, passée au travers de son roman qui pourtant ont tout pour (me) plaire, intitulé La ville de Verre. Ce récit-là, Netgalley m'a par chance accordé l'opportunité de le lire. J'ai passé grâce à lui quelques heures passionnantes à la découverte de la vie de l'auteure, de sa famille et de sa mère, Evguenia Iakovlevna Ivachtchenko, dont le portrait orne la première de couverture. C'est d'abord l'histoire de ses parents, travailleurs ukrainiens déportés en Allemagne de l'Est, le passé de cette mère exilée qui s'est donnée la mort alors que la jeune fille n'avait que onze ans, l'histoire de cette famille, qui est tout sauf ordinaire, qui a fini par s'éparpiller sur tout le territoire soviétique et au-delà. Plus que ces individualités, c'est l'universalité de destins qui ont été broyés à la fois par la révolution bolchevique, par le régime de Staline et par le national-socialisme. Ils sont de ceux à qui la vie n'épargne rien et qui n'en voient que le pire.

Allemande russophone d'origine ukrainienne, l'auteure est tenaillée par la méconnaissance de ses origines, ukrainienne, mais aussi italienne, à travers l'histoire d'un pays et d'une ville, Marioupol. le lecteur de ces lignes vit donc avec elle la découverte d'une vérité bien plus profonde et nébuleuse que celle à laquelle elle s'attendait. Etrange labyrinthe, qui l'emmène bien plus loin qu'elle s'attendait, jusqu'aux confins de la Chine. Complexité à l'image de l'époque et du territoire soviétique, dont elle démêle patiemment les fils, accompagné à chaque découverte de l'étonnement qui est le sien à la découverte que sa mémoire d'enfant a retenu plus de choses qu'elle ne le pensait. Vous le devinez, c'est un récit qui m'a enthousiasmée, une vie, une histoire, des personnalités, une famille que j'ai appris à connaître, avec Natascha Wodin, une page d'histoire empoignante, tragique, qui se dévoile peu à peu sous nos yeux. Avec toute l'émotion d'assister à la décomposition progressive de sa famille. C'est un de ces livres qui donnerait envie d'en parler pendant des pages, ou en tout cas, qui va rester longtemps dans ma mémoire de lectrice.

Natascha Wodin rappelle fort à propos que si le grand livre de la Grande Guerre Patriotique a justement laissé beaucoup de place à la Shoah, il a largement sous-estimé ce que ces travailleurs forcés ont vécu: ces slaves traités ni plus ni moins que comme une main d'oeuvre corvéable à merci, parqués dans des camps, au service d'entreprises allemandes, sous-hommes nourris à coups de quignons de pain rassis. Mais plus que tout, c'est le traumatisme provoqué par cet exil forcé puis par la mort violente, et volontaire, de sa mère. Reconstituer, Comprendre, avancer. Au-delà de son rapport intime que l'auteure a avec le sujet qu'elle traite, c'est un pan de l'histoire traité sous le prisme d'une famille. Ce qu'elle fait admirablement bien.

Au milieu de tout ça, il y a Konstantine, ce curieux personnage, ce passionné de généalogie qui a creusé, pour elle, Internet autant que possible afin de retrouver la trace de ses aïeux oubliés. Un homme étrange à la recherche d'une verité, celles d'autres, une obsession de la mise à jour qui frôle le compulsif.

Planter un décor, Marioupol, une ambiance, le stalinisme, c'est avec une attention constante que la lectrice que j'ai été a découvert à l'unisson avec l'auteur cette partie de l'Ukraine, du temps soviétique, vus et racontés à travers mille témoignages, mais pourtant, encre inconnu, tellement nouveau. Découvrir l'histoire de Marioupol la multiculturelle au bord de la mer d'Azov, cette ville offerte aux grecs sous le règne de la Grande Catherine, Marioypoli. Mais il y a aussi de ces lieux d'horreur qui hantent la mémoire soviétique, qui, peu importe ou l'on pose le regard, sont là, invariablement. Je parle des iles Solovki. Mais pas seulement. le camps de travail soviétiques en Carélie russe la Medvéjia Gora et allemands.

C'est un récit que je pourrais lire plusieurs fois de suite assurément. La somme d'information est telle que l'on peut parfois se perdre dans cet arbre généalogique plutôt alambiqué et il est facile de se perdre parmi les arrières grands-pères, grand-mères, tantes et oncles qui composent cette lignée. Natascha Wodin esquisse-là une belle tentative d'approche pour mieux cerner, comprendre le tableau familial, la hauteur et la densité, parfois les incohérences, de cet arbre généalogique, à travers l'image de ces parents profondément antisoviétiques, dont certains membres ont pourtant travaillé pour le parti. Comprendre une famille, comprendre le mouvement sous-jacents qui l'ont traversée, qui l'ont influencée. Comprendre son héritage. L'auteure a reconstitué avec talent l'histoire familiale, cette fresque qui nous emmène de la révolution à l'Allemagne, c'est non seulement un témoignage unique, précieux, même si l'horreur de ce qu'a vécu sa mère ne peut convenablement pas trouver de qualificatifs appréciatifs. C'est une reconstitution sur une famille que la révolution russe a démoli, dispersé, achevée par le régime Stalinien, sur ces femmes maudites, sur sa mère qui est allée au bout d'elle-même. Natascha Wodin a fini par comprendre l'histoire de sa mère, qu'elle met à l'honneur à travers son récit. Récit qui est, je crois, le plus bel hommage qu'elle pouvait rendre à cette femme, à l'évidence, maltraitée par la vie, son pays et son mari.

Cette lecture a été un véritable coup de coeur pour moi, il brasse tellement de destinées improbables, de pages d'histoire, de lieux presque mythiques, Marioupol, Odessa, etc. de rencontres improbables qui ont donné lieu à toute une famille, elle brasse une telle somme de souffrances, d'injustices, qu'on ne peut lâcher ce récit, et que même la fin survient trop tôt. On en redemande. Et il faut en effet consulter Internet pour savoir ce qu'est devenue après la mort de la mère Natascha Wodin. Magnifique travail de reconstitution par cette fille qui a tenté de retrouver une mère, perdue trop tôt, derrière les dernières images de tristesse et de désespoir qu'elle lui a laissées.
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Attirée par la couverture -un portrait en noir et blanc d'une jeune femme d'un autre temps- et par le sous-titre –A la recherche d'une famille perdue en Union soviétique-, je m'étais empressée de lire la présentation en quatrième et là, une certitude: il me fallait absolument lire ce récit de vie qui s'annonçait aussi instructif du point de vue historique que bouleversant sur le plan humain.

La romancière et traductrice-interprète allemande d'origine ukrainienne Natascha Wodin, née Natalja Nikolajewna Wdowina, a vu le jour en 1945 dans un camp pour personnes déplacées en Bavière après que ses parents ont été déportés en Allemagne en tant que travailleurs forcés l'année précédant sa naissance.
Elle venait de Marioupol.

A la recherche d'une famille perdue en Union soviétique (2020) est un récit autobiographique libérateur, une enquête salvatrice dans les archives enfin ouvertes de l'Union soviétique ainsi qu'un éclairage bouleversant sur le sort de millions de travailleurs forcés non juifs -les deux tiers provenant d'Europe centrale et de l'Est- esclavagisés pendant la Deuxième Guerre mondiale pour maintenir à flot l'économie de guerre allemande.
(...)
Hantée par le souvenir de sa mère qui s'est suicidée en 1956 à l'âge de trente-six ans, Natascha Wodin a au fil des décennies tenté à plusieurs reprises de reconstituer la vie de sa mère avant sa déportation en Allemagne. En vain. Lorsqu'en 2013, à bientôt septante ans, elle tape un peu par jeu « Evguénia Iakovlevna Ivashchenko » dans un moteur de recherches russe, elle n'imaginait pas un instant tout ce qu'elle allait y découvrir.
(...)
Si elle a grandi dans la pauvreté et la promiscuité dans divers ghettos d'après-guerre réservés aux populations déplacées de force en provenance d'Europe centrale et de l'Est, Natascha Wodin a évolué dans un cadre familial traumatisé, marqué par le silence et les non-dits, ignorant pendant longtemps jusqu'à son statut de fille de travailleurs forcés. Dépourvue de racines, d'une identité et d'une histoire familiales, moquée, harcelée et mise à l'écart par les petits Allemands pour lesquels elle n'incarnait rien d'autre que la barbarie russe, elle a grandi avec la honte de ses parents et de son milieu.

Grâce à sa rencontre sur internet avec un généalogiste passionné, un Ukrainien d'origine grecque établi à Marioupol, elle va dès 2013 pouvoir progressivement combler les lacunes et reconstituer son histoire familiale du côté maternel. En quatre parties aussi intéressantes que touchantes, Natascha Wodin raconte avec précision ses démarches, ses difficultés et ses nombreuses -et incroyables- découvertes et nous dévoile le destin aussi extraordinaire que tragique de certains membres de sa famille élargie ainsi que celui de ses parents. Enfin, elle montre comment ces trajectoires de vie étaient étroitement liées à certains événements majeurs qui ont marqué au fer rouge l'Histoire de la première moitié du XXème siècle.

Elle venait de Marioupol est un témoignage humainement et historiquement fort que je vous conseille vivement de lire si vous aimez les récits de vie et l'Histoire.



Lien : https://livrescapades.com
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Un grand merci et cinq coquillages pour Anne-yes qui m'a permis d'aller vers ce livre, c'est une lecture indispensable pour mieux comprendre l'Ukraine d'hier avec les conséquences qu'on connaît aujourd'hui . La mère de Natasha Wodin, l'auteure, est d'origine ukrainienne, elle est née à Marioupol, son père bien qu'Ukrainien est de langue allemande . Ce livre, retraçant le destin douloureux de sa mère, se divise en quatre parties.

– La première est consacrée à la recherche sur Internet de sa mère dont elle ignorait tout, sauf qu'elle venait de Marioupol. Très vite elle obtient une réponse qui lui vient de Russie d'un homme qui sera son ange gardien dans ses recherches. Un certain Konstantine, et à sa grande surprise, elle découvrira que les mensonges qu'elle racontait quand elle était enfant sont en grande partie vraie. Elle s'imaginait princesse et elle découvre que sa famille d'origine italienne était une des plus riche de Marioupol et, qu'effectivement, ils habitaient un palais. Toute l'enfance de l'auteure, en Allemagne, elle s'est sentie paria ( elle dit même « un déchet » en parlant d'elle) car elle, et sa famille faisaient partie des anciens travailleurs de l'est pays qui sont devenus communistes (donc ennemis !) C'est l'aspect de ce livre qui m'a le plus passionnée, car je n'ai jusqu'à présent rien lu sur ce sujet : que savons nous de ces milliers (peut être millions ?) de personnes déplacées pour servir d'esclaves au troisième Reich en manque de main d'oeuvre ? Nous connaissons en tout cas le sort de ceux qui sont retournés sous le joug stalinien : fusillés comme traître ou envoyés directement au goulag.
– Son enquête avance grâce à Konstantine, et elle raconte dans la deuxième partie, le sort de Lydia la soeur de sa mère. Celle ci a écrit ses mémoires et on peut alors découvrir toute l'horreur des débuts du communisme en Ukraine jusqu'à la famine qui sera un des plus grand crime commis contre un peuple. Bien que condamnée au goulag, Lydia a survécu et sa mère qui était venue garder son enfant aussi, elle était arrivée en 1941 quelques jours avant l'invasion allemande et ne pourra plus jamais repartir. Natasha comprend en enfin pourquoi sa mère a été abandonnée par sa propre mère.
– Dans la troisième partie, grâce à ce qu'elle sait maintenant, elle cherche à comprendre pourquoi sa mère est partie en Allemagne à la fin de la guerre. Elle y rencontrera son père lui aussi travailleur déplacé qui l'a beaucoup aidée et lui a permis de survivre.
– Enfin dans la quatrième et dernière partie, on voit cette femme plonger dans une dépression terrible qui fera fuir son mari violent et alcoolique. La petite Natasha s'enfonce dans ses mensonges pour fuir cette chape de malheur qui tue sa mère à petit feu.

Tout l'intérêt de ce livre vient de ce que l'auteure sait nous faire découvrir la vie de sa mère au fur et à mesure de ses propres recherches. Elle n'avait qu'une très vague idée de qui était sa mère, elle lui en voulait d'avoir si peu su lui faire une vie heureuse et d'être éternellement cette femme déprimée. Mais, comme elle, nous sommes bouleversées de voir que son destin aurait pu être moins tragique si elle avait su que sa propre mère et sa soeur avaient survécu au goulag.
Historiquement, le destin de ces travailleurs venus des pays occupés par l'Allemagne Nazie est mal connu et terrible. Mal connu, car il pèse sur eux le jugement de collaboration avec le régime de l'occupant et personne n'a vraiment pris la peine d'analyser leurs souffrances, on sous entend souvent qu'ils avaient le choix de ne pas y aller. Ce qui est loin d'être vrai. En plus si vous aviez le malheur d'être slave alors vous faisiez partie de la race des esclaves et votre sort était plus proche de l'univers concentrationnaire. le pire, pour ces hommes et ces femmes, est qu'aucun pays n'attendait votre retour. En France les anciens du STO sont rentrés sans gloire, certes, mais ils ont retrouvé une vie normale. Les Ukrainiens et les Russes étaient renvoyés chez eux à une mort certaine plus ou moins immédiate.

Un très beau livre, tout en émotion et qui nous fait revivre l'histoire si douloureuse de ce pays.
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Si vous avez ce livre entre les mains, un conseil, munissez vous d'une carte de l'Europe élargie à l'ex URSS, vous allez en avoir besoin !
Il vous faut également du papier, un crayon et votre livre d'histoire du XXeme siècle ; vous allez parcourir ces 100 ans et cocher malheureusement, toutes les catastrophes humanitaires qui se sont déroulées. Les deux guerres mondiales, la révolution russe, la montée du nazisme, l'après guerre en URSS et en Allemagne de l'Est, bref, toutes les horreurs en trois générations.
Si la lecture est éprouvante, impossible d'imaginer ce que fut la vie de ces familles !
L'auteure, vivant en Allemagne seule, sans famille, part à la recherche des racines familiales maternelles dont elle a peu de traces, sauf quelques souvenirs, images ou sons, venus de nulle part, semble -t-il !
Sa mère Evguenia, s'est suicidée alors qu'elle avait 11 ans, en se jetant dans la rivière en bas de chez eux. Suicide longuement préparé et annoncé. La petite fille devenue adulte cherche à en savoir davantage sur sa mère et elle va découvrir une famille aux origines politiquement et financièrement très diverses, mais au destin commun.. éclatée, détruite par les deux guerres.
Grâce à internet qui va la mettre en relation avec Konstantin, généalogiste fanatique, spécialisé dans les recherches des Grecs de Marioupol, l'auteure va découvrir cette ville sur la mer d'Azov, ville italienne, grecque, russe, ukrainienne et cosmopolite s'il en est, puis petit à petit, lentement au gré des recherches administratives, l'arbre généalogique va s'étendre , elle va voir et discuter avec des cousins , retracer le chemin de ses parents de Marioupol à Nuremberg et souffrir avec eux les horreurs du rejet, de la mise de coté des travailleurs forcés ukrainiens par les allemands, par les soviétiques, obligés de rester dans un pays dont ils ne parlent pas la langue ni ne comprennent les usages.
Retracer pour comprendre, comprendre pour pardonner, où en est l'auteure en ce moment ?
Nous, ses lecteurs, avons fait un voyage en enfer, mais nous en sortons grandis par la connaissance de faits méconnus de la majorité d'entre nous.
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Après maints essais infructueux, par habitude, l'autrice pianote sur l'internet russe le nom de sa mère, non pas parce qu'elle en a perdu la trace, mais pour connaître son passé. Là, pour la première fois, elle peut lire « Ivachtchenki, Evguénia Iakovlevna, née en 1920, à Marioupol ». « En cherchant ma mère, je n'avais jamais eu l'idée de me renseigner sur la ville dont elle était originaire, Marioupol » Sa mère est née dans le sud, cela lui paraît surréaliste « Pour la première fois depuis sa mort, ma mère devenait une personne extérieure à moi ». Ainsi, elle avait vécu la vie d'une petite fille de la noblesse locale « Une jeune fille qui n'avait pas grandi dans l'endroit le plus froid et le plus sombre du monde mais près de la Crimée, au bord d'une mer chaude du Sud…. Rien ne me semblait plus inconciliable que ma mère et le Sud, ma mère et le soleil et la mer ».
« L'inconnu ancien s'était transformé en un inconnu nouveau ».
Konstantine, qui anime le site « Azov's Greeks, va l'aider en fouillant dans les archives de Marioupol et ailleurs, tenter de retrouver des traces de sa famille.

Natascha Wodin raconte ses recherches, la découverte de cousins et, surtout, la photo de son arrière-grand-mère « je me suis reconnue sur une photo de Marioupol qui avait plus de cent ans. Je ressemblais comme deux gouttes d'eau à mon arrière-grand-mère, même sa façon d'appuyer un coude sur le dossier du canapé et de tenir l'autre sur les genoux, je la connaissais chez moi ».
Elle découvre la vie de ses ancêtres et en tombe des nues. Elle vient d'une famille très aisée, noble, des italiens venus s'installer à Marioupol pour y faire fortune. Cette dynastie est totalement anéantie par l'arrivée du communisme, puis de Staline.
La seconde guerre n'est pas plus clémente. Les nazis occupent la ville et déportent des milliers de bras ukrainiens pour faire marcher l'économie de guerre allemande. Sa mère fait partie de ces personnes et découvre l'enfer des camps. La seule différence avec les camps réservés aux juifs, tziganes, homosexuels, c'est qu'il n'y avait pas de chambre à gaz.
« Dans les camps, le typhus et la dysenterie font rage. Les ouvriers qui tombent malades sont envoyés dans le baraquement bondé des malades, où ils reçoivent une aide médicale minimale. Au début, on renvoyait encore les malades dans leurs pays d'origine, maintenant on ne se donne plus cette peine. Si les malades ne guérissent pas suffisamment vite, ils risquent l'attestation d'incapacité permanente de travail presque toujours une condamnation à mort. le patient n'est plus soigné, cela priverait le peuple allemand de trop de médicaments dont il a un besoin urgent. Il est abandonné à lui-même, ne reçoit que de soi-disant aliments diététiques et il meurt très vite la plupart du temps. »
Une fois la guerre terminée, les ukrainiens n'ont jamais pu retourner en Ukraine car ils étaient considérés, par Staline, comme traites à leur patrie. Oui, eux que l'on a considéré pire que des animaux, traités comme des serfs sont traîtres à l'URSS, ils auraient dû mourir. Beaucoup se sont vus refusés le visa pour les USA et sont restés en Allemagne, Nuremberg, pour la famille de Natascha, c'est d'ailleurs là qu'elle est née.
N'allez pas croire que le bonheur arrive, non, pas de place pour eux, sous-race, ils sont rejetés et la famille trouve un abri dans un entrepôt, qu'un allemand leur laisse occuper.
Dénoncés, ils ont intégré une sorte de quartier-ghetto où sont ceux qui ne peuvent plus repartir chez eux. Natascha connaît, au sein de son école, le racisme ordinaire des laissez-pour-compte, même de la part des enseignants.
Le livre raconte l'éclatement de la famille en plusieurs points de l'URSS et, derrière la vitrine lisse de l'union soviétique, les drames politiques et humains qui ont découlé du totalitarisme.
Certaines personnes ne connaissent que le malheur, le rejet, aucun rayon de soleil pour réchauffer leur pauvre vie. Dans ces conditions, pas facile d'être une bonne mère, une bonne épouse, d'aimer la vie. La mère de Natascha s'est jetée dans le fleuve alors que la gamine n'avait que 11 ans, lassée de cette vie.

Avec l'aide précieuse de Konstantine, Natascha va découvrir des survivants, des cousins ou petits-cousins, une famille à laquelle elle ne pensait pas
A travers ce qu'ont vécu sa mère et sa famille, l'autrice montre les dévastes causés par la folie humaine, la soif de pouvoir absolu, l'idéalisme poussé à son paroxysme.
Une lecture prenante, âpre, quelque fois dure, le soleil n'entre jamais dans les mots. Si elle a pu reconstituer la vie de sa tante, de sa grand-mère, elle n'a pu qu'imaginer, avec les souvenirs qui reviennent (elle ne pensait pas en avoir autant), les récits qu'elle a pu glaner sur Internet, le trajet de sa mère
Un bel hommage à une mère “broyée par deux dictatures”

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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