Les enfants sont perçus comme fondamentalement inoffensifs, et il est rare que le geai des chênes se replie face à des promeneurs adultes. Mais, quand des chasseurs rappliquent, il fait du raffut et prévient en faisant des cris rauques et perçants. C'est pourquoi cet oiseau coloré continue , hélas, d'être la cible de nombre d'hommes en kaki, alors même que assurant la dispersion des graines d'arbres, il est presque irremplaçable pour la vie des la forêt.
Le refus d’accorder autant d’émotions aux animaux repose toujours, me semble-t-il, sur la crainte de voir l’homme perdre sa position privilégiée…
A l’école on m’a appris que les animaux fonctionnent automatiquement, en fonction de leur programme génétique, comme des robots biologiques sans âme. Mais maintenant je sais que ce n’est pas vrai, les créatures qui partagent notre terre sont faites du même bois que nous. Elles sont heureuses, ont du chagrin, aiment, prennent du bon temps. Pour moi, l’un des plus beaux cadeaux est de pouvoir en être le témoin.
Comparer les animaux aux hommes n’est pas scientifique, c’est agir en rêveur, voire verser dans l’ésotérisme : tel est le reproche que l’on entend souvent. Dans le feu de l’action on en oublie une évidence apprise sur les bancs de l’école : l’homme, dun point de vue purement biologique, est également un animal, et ne saurait s’exclure de la liste.
Les cochons sont visiblement capables d’empathie : ils comprennent ce que les autres ressentent et se laissent gagner par le même ressenti – ce qui est la définition même de la compassion.
Contester que les crustacés puissent ressentir de la douleur au seul motif qu’ils n’ont pas la même anatomie que nous, c’est comme prétendre qu’ils ne peuvent rien voir faute de cortex visuel. De plus agir par reflex n’interdit pas la douleur, comme chacun peut en faire l’expérience au contact d’une cloture électrique.
« Notre chienne Maxi nous a fourni un exemple de sensibilité au nombre, en lien avec la notion du temps qui passe. La nuit, elle dormait comme un loir et se réveillait juste avant six heures et demie. Elle commençait alors à geindre doucement pour que je l’emmène se promener. Pourquoi six heures et demie ? C’était l’heure à laquelle sonnait le réveil chez nous, et où toute la famille se levait pour prendre le petit déjeuner, puis aller à l’école ou au travail. Maxi avait de toute évidence une bonne horloge interne, qui avançait toutefois de cinq minutes, si bien que nous aurions pu faire l’économie d’un réveil. Mais le week-end, c’était différent. Le réveil était éteint, et nous pouvions tous dormir aut ant que nous le voulions. Oui, tous. Car, le samedi et le dimanche, Maxi ne se manifestait pas, et dormait même souvent plus longtemps que nous. Avait-elle compté les jours de la semaine ? On pourrait objecter que l’animal s’adaptait simplement à notre comportement en dormant donc plus longtemps le week-end. Mais ça ne peut pas être aussi simple, puisque, en semaine, elle nous réveillait toujours avant que le réveil sonne, alors que tout le monde sommeillait encore. Dans la même situation, le week-end, elle s’abstenait. Et restait alors dans son panier à faire la grasse matinée, comme nous. Pourquoi ? Nous ne l’avons jamais su. »
Peter WOHLLEBEN : « La vie secrète des animaux »
Soyez sans crainte : je ne suis pas en train de plaider pour la déprime au petit déjeuner et le dégoût au dîner. […] Ce que je souhaite, c’est plutôt que nous devenions un peu plus respectueux du monde animé qui nous entoure, qu’il s’agisse des animaux ou des végétaux. Cela ne signifie pas forcément renoncer à toute utilisation, mais accepter de limiter un peu notre confort, ainsi que notre consommation de biens biologiques.
Si les animaux ne faisaient que suivre un programme génétique figé, tous les individus d’une espèce réagiraient de la même façon dans une situation donnée.
Une certaine quantité d’hormones serait sécrétée, qui provoquerait les comportements instinctifs correspondants. Or ce n’est pas le cas, comme vos animaux domestiques vous l’ont peut-être montré. Il y a des chiens courageux et des chiens peureux, des chats agressifs et des chats tout doux, des chevaux craintifs et des chevaux coriaces. Chaque animal développe son caractère en fonction de ses prédispositions génétiques et, surtout, de l’influence de son environnement, donc de son vécu.
Ce que je souhaite c'est que nous devenions un peu plus respectueux du monde