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Critique de afriqueah



Durant deux siècles, Genève, héritière sans recul d'un Calvin puritain, froid et inflexible, ne produira ni artiste, ni musicien ni écrivain de réputation mondiale, nous dit Zweig.
Calvin, émigré français, comme Sébastien Castellion, ont, par leur appartenance au protestantisme, réussi à fuir l'Inquisition papale. Cependant l'un, Calvin, tranche et décide de ce que les autres, tous les autres, doivent penser, sous peine de mort,-« il faut ou le combattre ou se soumettre à lui- » l'autre, Castellion, pense, a le courage de dire ce qu'il pense, sait parfaitement combien il est dangereux de penser, ne prétend pas que les autres pensent obligatoirement comme lui.

Ce sont les pires ennemis de l'intelligence, dit Zweig- qui toujours compare les faits à leur modèle universel, et s'appuie sur l'intolérance de Calvin pour analyser le sectarisme-ceux qui voudraient que des hommes libres soient dénoncés comme criminels. Leur crime ? Penser, différemment de Calvin.
Calvin, comme Robespierre, ascètes l'un comme l'autre, incorruptibles, irréprochables, insensibles au plaisir, forment le terreau du dictateur.
Calvin prend possession des âmes de la ville de Genève, ne tolère ni couleur, sauf le noir, ni musique, ni danse, ni divertissement, au nom d'un Dieu qui doit être craint, respecté, pas fêté, car même les fêtes pieuses sont trop.
La Terreur règne à Genève, avec l'assentiment du Consistoire : elle règne dans les coeurs et dans les maisons, que Calvin fait fouiller avec méthode : friandises, confiture, images saintes, ce sont des crimes, l'obligation d'assister à la messe dans des églises épurées, grises, où rien ne vient distraire le croyant obligé, est vérifiée par espions.
Gestapo des moeurs, naissance des dénonciations.
« Qu'on ne se fasse pas d'illusions, la terreur paralyse. La violence est une force redoutable », que Calvin, avec hypocrisie, férocité, lâcheté et mensonges utilisera à son profit : son profit, c'est que tout le monde pense comme lui.
Hypocrite, impitoyable et féroce, lorsqu'il essaie de livrer à l'Inquisition catholique, ce Michel Servet, protestant espagnol qui ne pense pas comme lui, (il refuse le concept de la Trinité, je suis toute confuse de vous livrer une telle aberration ), lorsqu'il fabrique de fausses preuves contre cet innocent.
Servet, prisonnier sans procès, sans fautes à se reprocher, Servet est torturé, abandonné dans un cachot, présenté dans ses hardes souillées, et condamné à être le lendemain brulé vif sur la place du Marché de Champel de Genève.

Castellion, lui, professeur à l'Université de Bâle, est persuadé que, d'abord, tuer c'est tuer, il n'existe pas de crime « pour des idées ».
Il est persuadé, aussi, même s'il a conscience qu'il est un moucheron face à un éléphant, qu'il peut dialoguer avec Calvin, qu'il peut non pas le convaincre, mais radoucir son intransigeance.
Zweig aimerait bien conclure que la liberté spirituelle ne peut être détruite par aucune violence, que celui qui l'exerce n'a jamais convaincu personne ; sauf que la montée du nazisme le fait douter de ce qu'il affirme. de plus les idées du calvinisme avec son puritanisme, son obéissance au dogme, sa sobriété s'est implanté, a fructifié dans des pays comme la Hollande ou l'Angleterre, et a favorisé le capitalisme aux Etats Unis en particulier.
Lueur d'espoir cependant : le protestantisme a, aussi, par la plus étrange des métamorphoses, enfanté l'idée de la liberté politique. C'est en Hollande que Spinoza et Descartes trouvent refuge.
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