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Critique de StCyr


A l'occasion du trentième anniversaire d'entrée dans le professorat, un homme âgé reçoit, en manière d'hommage, une sorte de bibliographie le concernant. Ce livre qu'il feuillette, malgré que tout semble y être, pêche par l'essentiel : il y manque le noyau irréductible et véritable de l'être, l'impulsion créatrice d'où jaillit tout le reste. C'est ainsi qu'il fait un retour sur lui-même, sur sa rencontre avec l'homme qui décida de son destin en façonnant son esprit.

Fils de proviseur, sa personnalité d'adolescent s'affirme dans l'opposition à son père, sa répulsion pour le didactisme et la paperasse d'un savoir mort. La poussée de l'adolescence se déploie dans un seul but : l'enivrement de la liberté, la recherche des plaisirs faciles et nouveaux. Mais l'arrivée inopinée du père dans sa chambre d'étudiant est l'occasion du seul réel entretien entre ces deux êtres dans un jaillissement spontané de sentiments en tumulte; il entraîne l'effondrement de tout l'échafaudage fallacieux de vanités du jeune âge, et marque un retour, en manière de pénitence, à la quête acharnée du savoir. Exilé dans une université de province, il est immédiatement subjugué par son directeur d'étude, professeur de philologie anglaise; la force, l'impétuosité fascinante et le magnétisme de sa parole conquiert littéralement le jeune homme à l'émotivité inflammable; Il éprouve un émoi psychique et corporel à subir l'ascendant irrésistible du verbe du maître. Cette figure tutélaire prend très vite une importance extraordinaire pour l'adolescent enthousiaste : idéalisation du professeur dans sa vénération dévote et puérile, jalousie exclusive de cette parole partagée par ses camarades, adhésion inconditionnelle, mimétisme, volupté de l'effusion, notre protagoniste est soulevé par une houle de sentiments confus dont l'enivrant déferlement lui sera plus utile que toutes les années passées dans le giron familial. A la faveur d'un voisinage immédiat il rentre dans l'intimité du professeur et de sa femme. Il ressent à mesure, dans le visage creusé de rides du vieil homme, une douleur sourde et secrète, qui se manifeste par une taciturnité et une solitude excessive. La parole froide et ironique à dessein du maître quand la discussion se fait plus intime, le geste brusque coupant court à toute investigation, le trouble mesquin des gens de la ville à son nom évoqué, ses brusques escapades solitaires et la personnalité dissemblables des époux qui paraissent si étrangers l'un à l'autre posent question, mais le jeune homme semble porter des oeillères...

Freud considérait ce livre, au même titre que Vingt-quatre heures de la vie d'une femme, comme un chef-d'oeuvre accompli. J'ai particulièrement apprécié les passages enflammés ayant trait au théâtre élisabéthain .
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