Fil et aiguille
Sans fin donner naissance
A des passions sans corps
A des étoiles mortes
Qui endeuillent la vue.
FEMME PORTATIVE
D'un effet solennel dans la solitude
Terrestre dérision la femme
Quand son cœur est ailleurs
Si ce que j'aime m'est accordé
Je suis sauvé
Si ce que j'aime se retranche
S'anéantit
Je suis perdu
Je n'aime pas mes rêves mais je les raconte
Et j'aime ceux des autres quand on me les montre.
AU BAL TABARIN
Des mesures nouvelles
Et fausses
De poids de temps de couleurs de distances
Ne font qu'accroître un ordre invraisemblable
La source jaillit de la mer
La lumière du rideau noir
Et toi d'un rythme sans fin
As-tu fleurs et fruits en tête
Ou n'es-tu que leur reflet
Anémones mandarines
Lys pêches boutons d'or
Vêtue de pluie
Chaussée de terre
Coiffée de nuit
Garderais-tu cet éclat
Qui te bâillonne.
L'APPARITION
Après une apostrophe et un galop pour rire
Le cavalier brisé perd conscience
Mille engins pleins de vie
Commencent une chanson
Étonnante
Au premier pas dehors
Tempête de lilas
Et la maison s'écroule
Pyramide d'un cri
L'écho détruit
Pour se bâtir un soleil
Un corps des flammes persistantes
Il n'a pas tout son cœur
j'ai si souvent senti que j'étais partagé
Femme habillée et mâle dépouillé
Que je ne sais si j'aime ou si je suis aimé.
DES NUAGES DANS LES MAINS
Ce désespoir confus
Source impalpable nuit de pluie
Loin des feuilles naissantes
Loin des larmes salubres
Ce dédain de l'orient
Ce paradis livide
Cette marche en arrière
Incrédule exténuée
Vers quelques souvenirs
Le remède miracle accord cadeau confiance.
HISTOIRE DE LA SCIENCE
Tu redoutes les hommes
Méfie-toi du feu
Tu renaîtras à l'horizon
Que tes mains te délient
Ton œil s'arrête sur les choses
Ton cœur s'arrête avec toutes les montres
Invente perpétuellement le feu
L'air la terre et l'eau
Sont des enfants.
PLANTE-AUX-OISEAUX
Le vent ne te fait pas peur
Garde le mouvement secret
De la chute impérieuse au moment du déclin
Et ta première plume du premier jour clair
Toi-même voix menue tu rirais de t'entendre
Siffler les brins d'herbe cueillir
L'élan de la graine de force
L'élan de l'arbre muet qui tient tête à la terre.
BELLE MAIN
Ce soleil qui gémit dans mon passé
N'a pas franchi le seuil
De ma main de tes mains campagne
Où renaissaient toujours
L'herbe les fleurs des promenades
Les yeux toutes leurs heures
On s'est promis des paradis et des tempêtes
Notre image a gardé nos songes
Ce soleil qui supporte la jeunesse ancienne
Ne vieillit pas il est intolérable
Il me masque l'azur profond comme un tombeau
Qu'il me faut inventer
Passionnément
Avec des mots.
POUVOIR
Il la saisit au vol
L'empoigne par le milieu du corps
La ceinturant de ses doigts robustes
Il la réduit à l'impuissance
Vertige la main dominante
Couvre toutes les distances
Sans plus bouger que sa proie.
NU
Prends garde on va te prendre ton manteau
Ton lit le tuteur de tes nuits
Ton manteau et ton lit
Tes prairies blondes et la lueur
Des lèvres que tu aimes
On va t'enlever cette assurance ces ressources
Qui te donnent des ailes
Immobiles
Même tes belles larmes.
Au pays des figures humaines
On s'apprête à briser ta statue ridicule.