Je ne mens jamais ni ne doute
Je t'aime comme on vient au monde
Comme le ciel éclate et règne
Je suis la lettre initiale
Des mots que tu cherches toujours
La majuscule idéale
Qui te commande de m'aimer
Les jouets et les jeux sont changés en outils
En travaux en objets capitaux en soucis
Il nous faut nous cacher pour simuler l'enfance
Il nous est interdit de rire sans raison
Sur la courbe du jour le soleil de la mort
Tisse un épais vitrail de beautés bien vêtues
Nous n'avons que deux mains nous n'avons qu'une tête
Car nous avons appris à compter à réduire
Nuages de santé brumes de jouissance
A mi-chemin de tout murmure du plaisir
Le printemps diminue l'hiver est supportable
Combien de nuits encore à rêver d'innocence
Nous avons eu huit ans nous avons eu quinze ans
Et nous avons vieilli noirci l'aube et la vie
Les hommes et les femmes que nous n'aimions pas
Nous n'y pensions jamais ils ne faisaient pas d'ombre
Mais nous avons vieilli le gouffre s'est peuplé
Nous avons reproduit un avenir d'adultes
De mort je ne sais rien sauf qu'elle est éphémère
Et je veux chaque soir coucher avec la vie
Et je veux chaque mort coucher avec la vie
L'hiver l'oubli n'annoncent que l'avenir vert
Je ne me suis jamais vu mort les hommes vivent
Matin d’hiver matin d’été
Lèvres fermées et roses mûres
Déchirante étendue où la vue nous entraîne
Où la mer est en fuite où la plage est entière
Soir d’été ramassé dans la voix du tonnerre
La plaine brûle et meurt et renaît dans la nuit
Soir d’hiver aspiré par la glace implacable
La forêt nue est inondée de feuilles mortes
Balance des saisons insensible et vivante
Balance des saisons équilibrée par l’âge
De l'océan à la source
De la montagne à la plaine
Court le fantôme de la vie
L'ombre sordide de la mort
Mais entre nous
Une aube naît de chair ardente
Et bien précise
Qui remet la terre en état
Nous avançons d'un pas tranquille
Et la nature nous salue
Le jour incarne nos couleurs
Le feu nos yeux et la mer notre union
Et tous les vivants nous ressemblent
Tous les vivants que nous aimons
Les autres sont imaginaires
Faux et cernés de leur néant
Mais il nous faut lutter contre eux
Ils vivent à coups de poignard
Ils parlent comme un meuble craque
Leurs lèvres tremblent de plaisir
À l'écho de cloches de plomb
À la mutité d'un or noir
Un cœur seul pas de cœur
Un seul cœur tous les cœurs
Et les corps chaque étoile
Dans un ciel plein d'étoiles
Dans la carrière en mouvement
De la lumière et des regards
Notre poids brillant sur terre
patine de la volupté
Je sais parce que je le dis…
Extrait 3
Je sais parce que je le dis
Que mon désespoir a tort
Il y a partout des ventres tendres
Pour inventer des hommes
Pareils à moi
Mon orgueil n’a pas tort
Le monde ancien ne peut me toucher je suis libre
Je ne suis pas un fils de roi je suis un homme
Debout qu’on a voulu abattre
Je n'ai pas de regrets
Plus noir plus lourd est mon passé
Plus léger et limpide est l'enfant que j'étais
L'enfant que je serai
Et la femme que je protège
La femme dont j'assume
L'éternelle confiance
Je sais que je ne suis pas seul ma fièvre augmente
Je m'élance et je monte et j'affirme mon but
Je suis enfin sorti de mon sommeil je vis
Il ne faut promettre et donner
La vie que pour la perpétuer
Comme on perpétue une rose
En l'encerclant de mains heureuses.