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4.5/5 (sur 3 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Carmen L a vu le jour sur un blog, il y a quelques années et a largement profité de ce succès inattendu.

Elle a écrit et publié deux recueils de nouvelles, "Icônes" (2020) et "Lessiv story" (2018).

Source : amazon
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Citations et extraits (7) Ajouter une citation
Il y a des gens sans émotion, des familles où l'on ne s'aime pas trop, c'est ce qu'il se dit. Des familles à histoires, on ne s'insulte pas mais on finit par régler ses comptes. Et il ajoute putain dans sa tête, c'est un mot pour se calmer à cause de cette pensée qui tout à coup le ravage, putain si elle les voyait ces deux-là, qui déménagent ses affaires tandis que l'enquête piétine. Une razzia en douce pendant que les autres dorment dans le quartier.
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Les fleurs furent installées dans la chambre, le vase était trop grand et les roses s’écartèrent les unes des autres, les branches des graminées s’inclinèrent, le bouquet sembla vaciller. Quand la nuit vint, les deux femmes allèrent dîner ensemble sur la terrasse de l’hôtel. La soirée était brûlante, le soleil couchant dessinait des lignes parfaites. Esma picorait dans son assiette et jouait avec quelques miettes de pain, qu’elle faisait rouler sous ses doigts.

—Vos doigts vous trompent, il n’y a qu’une boule de pain et vous jureriez qu’elles sont deux… La vie vous trompe aussi, quand elle veut. Les mots eux-mêmes vous égarent. Les concepts. La dignité, tout cela. Quand ils pèsent sur vos épaules, vous ne vous en sortez plus.

Typhaine se dit à plusieurs reprises, au cours de leurs conversations, que cette femme pouvait se perdre dans de grandes banalités, mais qu’elle les rendait merveilleuses. Elle l’écoutait, acquiesçait. Riait aussi, avec elle.

—Un jour, mon mari a disparu, plouf, plus personne. Plus de rasoir dans la salle de bains, plus de brosse à dents électrique, rien. Juste son odeur sur l’oreiller et une chemise dans un placard, c’était peu de chose. Des reliques. J’ai enfoui ma tête dans l’oreiller, j’ai reniflé la chemise, ça ne l’a pas fait revenir. Gardez bien votre chéri et surveillez-le, les hommes ont vite fait de s’envoler par la fenêtre. Fermez les portes, tirez les volets, faites attention.

—J’étais à ce moment-là dans la nécessité de tuer, essayez de comprendre, même si c’est difficile. Mon mari lui, l’a fait. Ou alors condamnez-moi si vous le voulez, vous n’êtes pas à ma place. Qui est à ma place ?

— Les innocents ? Des femmes, des enfants, des représentants de commerce, un employé de mairie, un épicier dans sa chemise en nylon du Dimanche, deux soldats en permission… tant pis pour eux s’ils se trouvaient là. La loterie de la guerre, voyez-vous, une table sur une terrasse, une glace au citron dans une coupe parce qu’il fait chaud, que c’est un régal et hop, votre vie s’en va, vous n’y pouvez rien. Mais reprenez de ces pâtes, elles sont délicieuses et elles vont refroidir. Chez moi on en mange rarement, c’est dommage.
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Elle expliquait que sa révolte était juste, que toutes les ré-voltes étaient justes et violentes et nécessaires, qu’il ne fallait pas avoir inventé la poudre pour comprendre cela, la nécessité de tuer pour s’en sortir. La vieille histoire des causes justes, c’est ce qu’elle expliquerait plus tard à ceux qu’elle allait côtoyer dans les dîners parisiens où on l’invitait avec son mari. Et lui, se contenterait de sourire et de vider son verre.
On l’avait arrêtée avec les autres, et torturée et menacée. Au jeune juge, dans une salle glacée et sombre qui sentait le salpêtre, elle parla d’une mascarade -le mot résonna dans le prétoire improvisé et alla se heurter aux murs, sur lesquels il laissa quelques vilaines taches. Elle faillit être condamnée.
—Dans un roman que j’ai lu, lui dit un jour celui qui était devenu son mari, un homme tient sa bombe dans sa main comme on promène une bouteille de lait. Et toi ?
—Moi, elle me brûlait les doigts. Et ne me pose plus jamais ce genre de question, s’il te plaît. Ne me parle plus jamais de ce que j’ai fait. Rends-moi heureuse et fais-moi des enfants. De beaux bébés à qui nous donnerons des prénoms ensoleillés.
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Sur l’une des photos, quelqu’un l’avait pris couché sur un canapé en toile foncée. Il portait un pantalon blanc, une chemise bleue, il avait enlevé ses chaussures. Entre cette image et ce que je vois aujourd’hui, il n’y a plus que les cheveux, noirs et frisés, pour faire le lien. C’est la seule chose que je
peux reconnaître et c’est tant mieux, car personnellement c’est l’homme d’aujourd’hui que j’aime. L’autre n’aurait pas voulu de moi, il ne m’aurait même pas regardée et si je m’étais trouvée sur son chemin, il m’aurait repoussée comme on chasse un chat sur un trottoir. L’autre sur son canapé devait manger des légumes grillés et boire du thé à la menthe, peut-être buvait-il aussi du vin en cachette, quand la nuit venait effacer les formes, les objets. Moi je préfère celui qui se met de la graisse de viande sur la bouche, parce qu’il avale trop vite. Et qui fait du bruit quand il respire, un bruit de soufflerie qui est devenu mon son à moi. La petite musique de ma vie auprès de lui.
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Il déplaça le chevalet, l’approcha autant qu’il le put de la porte du frigidaire. Il savait qu’il ne pourrait plus ouvrir celle-ci jusqu’à ce qu’il ait fini son travail, cela lui parut sans importance.
Il prépara sa toile du mieux qu’il put -blanc de Meudon et liant acrylique, colle de peau de lapin, huile de lin cuite, couteau et papier de verre à grain fin. Il s’appliqua. Puis il attendit.
Il attendit deux jours, durant lesquels il se garda d’entrer dans sa cuisine, de peur de déranger le
parfait ordonnancement des choses -chevalet à cinquante centimètres du frigidaire, légèrement déplacé vers la gauche, fenêtre fermée, magnet nettoyé à l’eau et au vinaigre afin qu’il pût en saisir chaque détail. Il se fit livrer ses repas par un traiteur italien itinérant, se gava de raviolis et de fettucini, ses plats préférés.
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N’empêche qu’il ne descendait pas, je veux dire dans la vie, il montait puisqu’il est passé peu à peu des beaux quartiers de la ville jusqu’en haut de la citadelle. Il est tombé vers le haut, c’est ce que je peux conclure pour résumer ce qui lui est arrivé. Il s’est cassé la figure jusqu’en haut des escaliers, là où nous n’avons plus qu’un carré de ciel bleu pour vouloir de nous.
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Il n’avait pas compris. Elle avait claqué les portes, s’était enfermée dans la salle de bains, avait dis-paru des journées entières et il était resté là, à l’attendre. Ensuite, après son départ définitif, il n’avait plus peint durant une année entière et ses tubes de gouache mal refermés étaient devenus durs comme la pierre et ses toiles étaient restées à
la cave, où elles s’abimaient lentement. Certains jours il n’ouvrait pas ses volets et restait assis sur l’un de ses fauteuils, toujours le même. Les mains posées à plat sur les cuisses, le dos droit, il semblait attendre en silence le retour impossible de Marta.
A la fin, il s’était résolu à partir, lui aussi. Il avait choisi le village au hasard, peut-être parce qu’il lui avait paru silencieux et vide, la première fois. Puis un jour, il avait reçu l’appel du prêtre.
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