Prenant appui sur la seule pensée
Il n’imagine pas d’objets extérieurs;
Établi sur l’objet d’ainsité
Il dépassera la seule pensée
Il la dépassera dans la non-apparence.
Le yogi qui demeure dans la non-apparence
Voit le grand véhicule,
L’état spontané d’apaisement.
Il est purifié par les prières
Et verra par la non-apparence
Le non-soi de la sublime sagesse fondamentale.
La souffrance du composé a pour nature d’être placée sous l’empire de causes qui ont les actions et les passions pour caractéristiques; elle a pour caractéristique et nature la destruction, instant après instants,et s’étend à toutes les destinées. On voit, en conséquence, que l’ensemble des destinées est plongé dans l’incendie de la souffrance. Songez: « Les autres sont comme moi-même qui ne souhaite pas la souffrance. Hélas, ces êtres chers, tourmentés, comment les libérerais-je du malheur? »
En absorption méditative, en toute activité, m’éditez a tout moment la compassion qui présente l’aspect de souhaiter que tous les êtres- tels que vous-même, éprouvé par le malheur- en soient séparés.
…quant aux animaux, il apparaît qu’ils n’éprouvent que de nombreux tourments : de s’entre-dévorer, de se détester, de se nuire, se tuer, etc. ; ainsi, certains ont les naseaux percés, sont frappés, entravés, attachés ; impuissants, tous sont malheureux et épuisés par les lourds fardeaux dont on les a chargés contre leur volonté. De même, certains qui habitent les solitudes, sans faute de leur part, sont pourchassés et tués. A tout moment leur esprit est troublé par la peur, ils errent et fuient, il apparaît qu’ils ne font qu’éprouver d’innombrables, d’incommensurables souffrances.
Chez les humains aussi existent les souffrances des enfers et autres : les voleurs ont les membres tranchés, sont empalés ou pendus, afflictions qui constituent des tourments infernaux. Les pauvres et les démunis sont tenaillés par la faim et la soif comme les esprits affamés. Le corps des serviteurs est soumis au pouvoir d’autrui ; leurs tourmenteurs les écrasent, ils souffrent d’être enchaînés et battus comme les bêtes ; semblablement, la quête [de satisfaction], les maux qu’ils s’infligent les uns les autres, la séparation d’avec ce qui est plaisant et la rencontre de ce qui est déplaisant : infinis sont leurs malheurs.
Pour ceux qui apparaissent riches et heureux, la fin de leurs possessions est la déchéance, ils sont plongés dans l’abîme de diverses vues mauvaises, accumulant les actions et les passions qui seront les causes de l’expérience des tortures infernales et autres, comme [quelqu’un] se tenant [au bord] d’un précipice ils vivent dans les causes de la douleur. En vérité, ce ne sont que des misérables.
(…)
Ayant ainsi constaté que les destinées sont des lieux cernés par les langues de feu de la souffrance, [le Héros pour l’Éveil] songera que, tout comme lui-même n’aime pas la souffrance, les autres non plus ne l’aiment pas, et il cultivera la compassion vers tous les êtres et leur esprit.
Tout d'abord, il méditera seulement sur les amis, les considérant en proie aux diverses souffrances mentionnées plus haute. Ensuite, avec égalité d'esprit et sans opérer de distinctions, il songera que dans le cycle sans commencement il n'existe aucun être qui n'ait été cent fois son ami, et il méditera sur les êtres qui lui sont indifférents. Dès qu'il aura développé à l'égard des êtres indifférents une compassion égale à celle qu'il éprouve pour ses amis, il méditera de la même façon sur ses ennemis, appliquant sa pensée à l’équanimité, etc
Et, lorsqu'il aura engendré la même égalité envers ses ennemis qu'à l'endroit de ses amis, il la cultivera vis-à-vis de tous les êtres des dix directions. Quand il aura produit pour tous les êtres – semblables à un enfant aimable qui souffre – une compassion naturelle et égale caractérisée par le souhait de les arracher définitivement à la souffrance, elle sera alors parfaite et prendre le nom de « grande compassion ». (pp. 16-19)
Si, méditant avec la pensée : « Je ne considérerai pas les phénomènes, je n’y appliquerai pas l’esprit », vous prétendez cultiver l’absence d’attention et l’absence d’activité mentale vis-à-vis d’eux, ceux-ci seront alors davantage considérés, davantage présents à l’esprit. Si vous affirmez que la simple absence d’attention et d’activité mentale constitue la non-attention et la non-activité mentale, il est alors nécessaire d’examiner sous quel aspect se présente leur double absence. En effet, l’inexistence ne peut être une cause ; comment la non-conceptualité procéderait-elle de l’absence de caractère et de l’absence d’activité mentale ? (p. 141)