QueenSelena

Je ne suis jamais allée à l'école, mais j'ai reçu l'éducation la plus pointue qui soit. Je n'ai jamais eu de camarades de classe, mais j'ai appris aux côtés des plus grands agents du vingt-et-unième siècle, en plus d'avoir eu un professeur particulier qui ne se consacrait qu'à mon enseignement et à mon éducation personnelle. On ne m'a pas appris les mêmes principes et valeurs qu'on enseigne aux autres enfants et adolescents de la société, à savoir la solidarité, la paix, et l'égalité. J'ai vécu entourée de violence, de haine, de crimes, d'esprits malsains et de vendetta. J'ai grandi dans un environnement où la vie humaine est aussi futile qu'une petite poussière, où arracher l'âme est tellement prosaïque qu'on le fait sans même cligner des yeux. Au bout d'un certain temps, on prend conscience qu'on a arrêté de compter le nombre de vies auxquelles on a mis fin, tellement le décompte est long.
 

Michelo Lyncy. Un homme politicien corrompu par la mafia russe. Depuis plusieurs mois, il leur transmet des informations confidentielles concernant les positions militaires américaines. Si on le laisse faire, il nuira très certainement à notre nation. Ma mission est de l'éliminer, en toute discrétion. Les preuves de sa trahison sont plus ou moins en notre possession, mais il ne peut pas être poursuivi en justice. Il tient les juges les plus réputés des États-Unis par le bout du nez et même si on décidait de le confronter devant un tribunal indépendant et impartial, Michelo est un homme influent qui a beaucoup de ressources. Il trouvera un moyen de se mettre les juges dans la poche. Soit par le biais de la corruption, soit en menaçant la sécurité de leurs proches. 

Les citoyens ne font que travailler, dormir, manger, aller aux toilettes, pleurer. Travailler, dormir, manger, aller aux toilettes, pleurer. Et rebelote. C'est un cercle vicieux. Une interminable routine. Dieu seul sait que j'aurais déjà mis fin à mon existence si j'avais eu à vivre un calvaire pareil. J'aime ma vie d'espionne et pour rien au monde je ne l'échangerais.
Je raffole de toutes ces sensations que me procure mon quotidien. Les pulsions d'adrénaline, le devoir constant d'être sur ses gardes, l'immense fierté que l'on ressent après avoir réussi une mission, la sensation d'être important aux yeux de la nation américaine, d'être une véritable patriote flinguée et entraînée jusqu'aux os.

" Un bon disciple doit conserver un sang-froid à toute épreuve. C'est une qualité primordiale. Elle te permettra d'arracher des vies, de torturer, d'avoir le courage de faire des sacrifices sans montrer aucune émotion. Tu apparaîtras comme un monstre et ça, c'est une excellente chose. Plus tes adversaires auront peur de toi, plus ils seront inaptes à te battre. Refoule tes pensées, refoule tes sentiments, refoule ta conscience, ta culpabilité, refoule ce que te dicte ton cœur. Deviens un robot. Il n'y a que de cette façon que tu survivras."

Ce n'est pas mon ami. Je n'ai pas d'amis.
Clair, net et précis. Je n'ai jamais eu d'amis. Sentimentalement parlant, je ne sais pas ce que signifie le terme Amitié. Maître Silasse m'a enseigné à ne me fier qu'à mon instinct et à moi-même. Il m'a strictement interdit d'avoir une quelconque relation sentimentale, de quelque type qu'elle soit, avec n'importe qui, sous prétexte que ça nuit à mes capacités, car cela m'empêcherait d'avoir les idées claires et de penser correctement.

Ne pas avoir d'amour et de sentiments me donne souvent la sensation d'être creuse à l'intérieur, comme s'il y avait un trou béant à l'endroit même où mon organe vital est censé reposer. Mais ressentir ce vide intérieur vaut mieux que de finir avec une balle dans la tête parce qu'on a voulu s'offrir le privilège des émotions. Les sentiments sont un luxe que je ne peux pas me permettre. Je peux avoir des alliés, des ennemis, mais pas d'amis.

Je dois œuvrer pour mettre mes instincts primaires de côté et ne garder que ceux qui me serviront pour cette mission : l'efficacité, la rapidité et la discrétion.

Dans une société où la valeur de la femme est rabaissée, il est peu commun de rencontrer un agent secret féminin. C'est même plutôt rarissime. Par conséquent, je tire avantage de cette discrimination à l'égard des femmes. Cela me permet de prendre par surprise mes ennemis qui ne se doutent pas un seul instant que du haut de mon mètre soixante-cinq et de mon petit corps de cinquante-six kilos, je suis là pour les éliminer.

Je me suis toujours posé beaucoup de questions au sujet de "L'autre monde" comme j'aime l'appeler. Mais je n'ai jamais creusé plus profondément. Je n'ai jamais cherché à trouver réponse à mes questions. Je me contente de savoir que le monde dans lequel je vis est bien plus attractif et mouvementé que celui du commun des mortels, qui est affreusement barbant et fastidieux.

L'instinct des enfants est surprenant. On devrait les écouter plus souvent au lieu de les négliger.