Citations de Wylia A. (37)
Son sourire et ses rires. Sa façon de nous taquiner. Son nez plissé quand elle se moque. Bref, j’ai la sensation qu’Haïvy avait disparu de ma vie sans que je m’en rende compte pour revenir en un claquement de doigts dans mon esprit. Je culpabilise d’avoir eu l’idée de la mettre dans mon lit, mais à aucun moment je n’aurais pu croire qu’il s’agissait de la petite sœur de Tristan.
Ce n’est pas parce qu’une grande différence d’âge nous sépare que nous n’avions pas une amitié sincère. Je l’ai rejetée, car de tous, elle arrivait à me faire sourire et je ne voulais plus en avoir l’occasion si mon père n’était plus avec moi pour le faire également. J’ai mis un peu de temps pour me remonter la pente de mon deuil, mais si je suis là, c’est bien grâce à eux, leurs parents et ma mère. Qui a dit que notre entourage devait être nombreux pour être heureux ?
Une femme… Putain oui, c’est ce qu’elle est devenue. Il aurait certainement fallu qu’on se réveille avant. Pourtant, ni mon meilleur ami ni moi ne parvenons à nous faire à l’idée. Sauf que lui n’a pas Haïvy qui vient hanter ses pensées sexuelles… Sept ans que je ne l’ai pas vu et il n’aura même pas fallu vingt-quatre heures pour qu’elle envoie valser en un tas de poussières mon innocence envers elle.
Je l’imagine en train de se cajoler les seins, mais aussi de se toucher l’entrejambe le regard vissé sur le mien. Il me plaît de croire qu’elle balancerait son visage en arrière pour autoriser ses gémissements à passer la barrière de ses lèvres. Je parviens même à visualiser ses fesses rebondies contre mon sexe avant d’entrer dans son intimité. Bordel, je divague complètement ! Je me secoue pour oublier ce que je viens d’entendre, mais aussi pour évaporer toutes ses idées insensées.
J’ai toujours adoré leurs embrouilles. Ils sont tous les deux aussi têtus l’un que l’autre et ça donne la plupart du temps un feu d’artifice de répartie.
Je sais que ce qui me perturbe c’est de constater la femme qu’elle est devenue. Elle n’est plus cette enfant que je prenais sur mes épaules dans la piscine ni celle que j’allais chercher à l’école quand son frère ne pouvait pas y aller. Encore moins la jeune fille sans formes que je ne pouvais pas désirer. C’est un phénomène que je peine à expliquer. Mon esprit, ma tête et mon cœur sont conscients de ces sept années d’écart et de l’ancienne fillette innocente d’autrefois, mais mon corps et mes yeux eux n’observent qu’une adulte libre et attrayante.
Je suis dans la merde jusqu’au cou. Il déteste faire la plonge et moi aussi, si je ne me présente pas à cette connerie de réunion, je sais qu’il mettra ses menaces à exécution. Mon oreille accroche tout de même sur le fait qu’il n’est pas rentré cette nuit. Depuis le temps qu’on habite à deux, c’est rarement arrivé et encore moins ces derniers temps. J’ai bon espoir qu’il ait enfin réussi avec sa collègue.
En général, notre moitié l’accepte quelque temps, mais ça vole vite en éclat une fois que c’est vraiment sérieux. Je sais ce que j’avance, puisque c’est ce que m’a fait Shanna, mon ex. Elle s’investissait tellement dans notre relation qu’elle m’a demandé de vivre avec elle, ce que j’ai accepté, car cette fille, je l’avais dans la peau.
Le cerveau est si habitué à une image que lorsqu’elle change, il faut un temps d’acclimatation. C’est ça mon problème, je ne suis pas encore adapté à ces nouveautés.
Je culpabilise d’avoir eu l’idée de la mettre dans mon lit, mais à aucun moment je n’aurais pu croire qu’il s’agissait de la petite sœur de Tristan. Tout ce qu’elle était s’est transformé et je l’ai remarqué, observé et analysé à mon grand désarroi. Je peux affirmer sans l’ombre d’un doute qu’aucun trait juvénile n’a perduré sur son corps.
D’aussi loin que je m’en souvienne, il aime ce qui sort de l’ordinaire, une façon de se démarquer des autres et pour le coup, c’est assurément le cas. Adriel est déjà sur le perron lorsque je m’extirpe de l’habitacle.
C’est dingue comme l’esprit parvient à se créer un monde parallèle. Un monde où la douleur et tout le reste peuvent être mis de côté, un monde où le conscient et le subconscient peuvent devenir une parfaite harmonie afin de gérer les souvenirs et les sensations. C’est d’ailleurs ce que je veux mettre en place pour mon certificat de fin d’études avec l’aide de la musique.
Les médecins, chirurgiens et chefs en tout genre, n’ont pas le temps de voir ces corps comme de vrais malades, avec des sensations et des droits. Ils les considèrent simplement comme des dollars qui roulent sous leurs paupières une fois étendus dans leur lit à la nuit tombée. Pour moi, chaque vie est importante et a la même valeur que celle de son voisin, ce qui est oublié par beaucoup.
Jenny c’est ma bécane, je lui ai donné ce petit nom pour la rendre plus humaine. À mes yeux, elle est un membre à part entière de ma vie et de ma famille. Elle est la seule à pouvoir me faire oublier les atrocités que nous impose le quotidien comme un fléau auquel nous n’avons pas de solution. Elle me permet de m’évader et d’accepter ce qui se passe dans mon hôpital.
Les gens me regardent, mais je m’en contrefous, j’ai besoin de laisser exploser ma colère avant de me faire interner dans un hôpital psychiatrique. Le soignant soigné, ce n’est pas pour moi.
La perte fait partie de la vie, il faut l’accepter, ce n’est pas facile, seulement c’est ce qui fait que chaque jour mérite d’être vécu avec joie et passion.
Alors, je me fissure et me craquelle en un million de morceaux. Ma résistance n’est plus. Mon envie est à son maximum. L’interdit est à portée de main. Je perds mes moyens. Mes retenues s’effritent au fur et à mesure que je l’admire.
— Fais-moi voir les étoiles… murmure-t-elle.
Mes barrières se pulvérisent. Elles volent en éclat. Elles brisent mes certitudes, écrasent mes convictions. C’est à peine si je me souviens de mon prénom. Mes lèvres se plaquent contre les siennes. Ce n’est pas tendre, c’est passionné. C’est avide et affamé.