Soudain, le seau parut à Cosette beaucoup moins lourd. En même temps, elle sentit sur l'anse une forte main près des siennes.
Elle leva les yeux et distingua un homme à côté d'elle. Cosette n'eut pas peur. Elle entendit une voix grave lui dire :
— Mon enfant, ce seau est bien lourd.
— Oui, monsieur.
— Donne-le-moi, je vais le porter.
Elle lâcha l'anse et se mit à marcher à côté de l'inconnu.
— Quel est ton nom, petite ?
— Cosette, monsieur
Cosette ne riait jamais. Elle avait tant pleuré que plus aucune larme ne coulait de ses grands yeux tristes.
Cette fois, le roi lui-même n'est pas mieux loti! Je ne suis pas près de retourner chez moi! Pour que ma vieille me tape dessus?
Bernique! Gavroche P.22
Au fond, songea-t-il , on a besoin de bien peu de choses pour être heureux. Un toit, un jardin, quelques poules, cela suffit à assurer la subsistance. Pourquoi éprouvons nous toujours le besoin de ce que nous ne possédons pas, et dont nous nous passons fort bien cependant ? p 104
Avec l’automne et la chute des feuilles, on peut, dans un moment de désarroi, croire à une fin possible. Une partie de vous-même meurt chaque année lorsque les branches perdent leur parure et grelottent au vent. Mais avec le retour du printemps, quand les arbres reverdissent et que les pétales éclosent, on a le sentiment que rien ne meurt et que tout dure ou doit renaître.
Les serres, les peupliers, rien n'avait résisté. La terre est une maîtresse exigeante, qui prend tout de vous, mais il n'y a pas plus ingrate. Une coquette qui sait se parer de toutes les grâces, vous aguiche, vous fait saliver, se donne à peine, et puis vous laisse en plan. Les écologistes naïfs qui croient et soutiennent que la nature est généreuse se fourrent le doigt dans l'oeil.
p 178
Le pain, décidément, est lié à la terre. A la terre où naît et croît le blé; au ciel qui la réchauffe et fait mûrir l'épi; au bois, issu du sol, qui permet la cuisson. Pas étonnant qu'on ait salué le pain, aussi longtemps qu'a duré l'antique société paysanne, du signe de la croix.
Quand on ne comprend plus rien au monde, il vaut mieux s’en aller.
Le destin avait été prompt à l’exaucer.
Effectivement, Ismaël avait eu du mal à comprendre ce monde nouveau, cette société si différente de celle d’avant. Ce n’est pas à soixante ans qu’on se refait.
Un rayon puissant, jailli par les interstices des volets clos, réveilla subitement Jean Caramel. Du bruit aussi. Peut-être même un coup de tonnerre. D’instinct, il regarda sa montre. Sur le cadran, la phosphorescence des chiffres se dessina dans l’ombre : 3 heures du matin. Au moment où il s’était couché, le ciel était noir, menaçant. Un souci quand on est paysan et qu’on approche des vendanges. De gros nuages qui courent, c’est la pluie assurée, avec la boue dans les rangs de vigne, les bottes qui s’enfoncent, la peine multipliée pour les boeufs et les hommes.
Je veux en avoir le coeur net ! …
Il se leva, ouvrit la fenêtre, poussa le volet. C’était une magnifique nuit de septembre. Le vent avait soufflé, dispersant jusqu’au plus petit mouchoir de nuage. » … « En baissant les yeux, Jean crut voir une silhouette qui traversait la cour. Une illusion, forcément, car il somnole encore. Et puis la ferme de Lourmian est isolée sur sa colline : à trois cents mètres du village de Saint-Clair, lui-même juché sur un coteau, et au ras de la forêt. On accède à Lourmian par une allée pendue bordée d’ormes séculaires au feuillage tirant curieusement sur le rouge. Tout autour, des vignes, et encore des vignes.
La route carrossable ne déroule ses virages qu’une centaine de mètres plus bas. Les malins connaissent ce raccourci tranquille : quoique pentu et sinueux, l’itinéraire permet d’éviter la nationale Bordeaux-Toulouse, souvent encombrée et ralentie par les traversées de villes. Toutefois, à 3 heures du matin, il y a peu de chances que quelqu’un s’aventure par ici.
Même l’avenir, ça ne rapporte plus autant. Ce qui paie, c’est d’annoncer de bonnes nouvelles, un bel avenir. La preuve, c’est qu’on nous appelle « les diseuses de bonne aventure » et pas « de mauvaises aventures » ! Alors, avec la guerre, les Prussiens, le siège de Paris, la moitié de la capitale qui a brûlé, enfin quoi, tout ce qu’on a connu depuis deux ans, les nouvelles réconfortantes, faut vraiment voir l’avenir très loin pour tenter de les deviner… En France, on pleure l’Alsace et la Lorraine, ici on pleure la France, tout ça ne vaut rien pour nos affaires !