Merci à Babelio pour cette nouvelle découverte.
J'avais demandé à recevoir ce livre car son sujet m'intéressait beaucoup. Ne connaissant rien de l'oeuvre d'
Alain Paraillous, je m'engageais donc sans a priori. Je le reçois, je regarde sa forme et là, boum, je me transporte en pensée dans une scène déjà maintes fois vécue : je suis en vacances, je franchis la porte de la Maison de la Presse locale en quête de 3 cartes postales et d'autant de timbres et mon regard, en attendant que mon tour de payer vienne dans la file d'attente interminable, entre têtes grises venues chercher leur canard et ados venus acheter leurs clopes, se perd dans les rayonnages de livres qui s'étalent sous mes yeux. Dommage que je ne puisse parier, je sais déjà ce que mes yeux vont découvrir : gazette de la fédération régionale de chasse au gros gibier, le mémo des vides-greniers et brocantes de l'année en cours et les chroniques paysannes inévitables et là, tenant "
La vie religieuse des campagnes d'autrefois" dans les mains, je comprends, dans une illumination, que sa place est justement là, parmi les livres de chroniques paysannes... J'ouvre le livre, police 16, ça confirme tous mes soupçons. Je feuillette les pages pour arriver aux illustrations, paf, vieilles photos et cartes postales d'antan, images d'Epinal et prises de vue de la chorale de l'église en plein concert...
Je soupire. Je comprends que je ne trouverai aucune érudition dans cet ouvrage que j'avais cru, à tort, spécialisé. L'historienne qui est en moi est d'ores et déjà frustrée, d'autant plus que la lecture des premiers chapitres confirme ma pensée...
Avec tout le respect que je vous dois Mr Paraillous, je m'interdis de louer votre style quand à peu près n'importe qui maîtrisant un temps soit peu l'expression écrite peut faire le travail que vous avez fait : collecter des informations, dont beaucoup sont issues de votre répertoire familial personnel, pour développer un thème qui plaira à un lectorat de retraités nostalgiques.
Dans l'épilogue (Ah, oui, attention, spoiler !), vous vous justifiez d'ailleurs très bien, anticipant les critiques telles que la mienne qui ne sauraient manquer de venir quelque peu ternir votre labeur de rat de bibliothèque. Ainsi, vous écrivez : "De sourcilleux exégètes décèleront sans doute, ça et là, quelque erreur théologique au fil de ces pages ; pis encore, les adeptes d'une modernité à tous crins pourront accuser tel ou tel chapitre d'un excès de nostalgie. Par avance, j'en demande pardon, et promets de m'amender. En guise de pénitence, je réciterai chaque jour la Prière pour aller au paradis avec les ânes [...]". Et bien, Mr Paraillous, j'espère que vous la récitez votre pénitence ; je veux bien aller avec vous au Paradis si c'est vous qui faites l'âne ! Je n'incrimine pas "tel ou tel chapitre" de paraître trop "nostalgique", j'accuse votre écrit tout entier d'être un réquisitoire passéiste catégorisant les gens en deux catégories : les croyants et les impies. Je suis historienne de formation mais j'ai toujours prôné la vulgarisation. Cependant, point trop n'en faut. Et je ne suis pas une "adepte de la modernité à tous crins" mais je suis assez intelligente pour savoir et comprendre que dans nos campagnes, il n'y a pas encore si longtemps, la religion se teintait trop souvent de superstition et que tout ce qui sortait de la bouche de Mr. le curé n'était pas parole d'Évangile comme vous semblez le penser.
Votre style est, selon vous, "nostalgique" ? Oh, si peu. Extrait page 94 : "Ces gravures du XIXème siècle, témoins d'un passé bien révolu, vantent les bienfaits de la Vierge Marie. Mais en même temps, elles sont très révélatrices de moeurs... d'une toute autre époque." Et c'est comme ça tout au long des 218 pages de votre livre.
Mais, amis lecteurs, peut-être me jugerez-vous trop sévère ? Bien sûr, il est toujours intéressant de s'intéresser à son patrimoine social et culturel, d'en apprendre un peu plus sur les us et coutumes qui font notre identité d'aujourd'hui même s'ils nous paraissent bien loin. Mais je plaide coupable, Mr. Paraillous m'a irritée dès la page 25 divisant les peuples tel Moïse la Mer Rouge entre, d'un côté, les aînés bien-pensants, et de l'autre, les jeunes irréversiblement irrévérencieux. Je cite : "Un rapide coup d'oeil sur les moeurs d'aujourd'hui suffit pour mesurer ce qu'a été, en quelques années, le basculement. Si quelques jeunes s'avisent de lire ses pages, il va de soi qu'elle relèveront pour eux de l'histoire ancienne, sinon de la paléontologie". Quelle maladresse (volontaire ?) dans les termes choisis ! "S'aviser", quel verbe, comme si vous rejetiez d'emblée le jeune public avec la pleine conscience que votre livre n'a été acheté que par des vieux ! Énorme. Presque menaçant...
Mr. Paraillous, pour votre information, la spiritualité n'a pas totalement déserté tous les coeurs, ni des vieux ni des jeunes. Peut-être qu'il n'y a plus personne sur les bancs de votre église paroissiale du Lot-et-Garonne mais si vous sortiez un peu de chez vous plutôt que vous y cloîtrer pour compulser quelques archives trouvées au grenier ou en sacristie, vous verriez qu'encore bien des gens, jeunes ou moins jeunes, se sentent concernés par la religion, catholique ou autre.
Votre dédain m'a paru proche du mépris et pour ne pas qu'il y ait de confusion, je tiens à préciser que j'ai vécu dans votre département, que je vis actuellement dans un village de 130 habitants en pleine campagne, que j'ai 33 ans et qu'enfin, j'ai le double vice d'être croyante ET pratiquante. Vous m'excuserez donc si je n'ai goûté votre livre ni dans son fond ni dans sa forme.