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Citation de michelekastner


Nous le savons bien, Terradillos. Ecrire est une manière de garder le silence, de ne pas parler, d'empêcher les mots de prendre leur envol, comme disait Vallejo, de les enraciner dans la page. Ecrire est une manière de proférer une menace sans la formuler à voix haute, en s'arrangeant pour que l'ombre des lettres nous tourmente ente les lignes. Je suis trop amatrice de littérature latino-américaine pour ne pas être habituée à l'aphonie, à la réticence, au silence. Me permets-tu un apparté de lectrice ? Depuis le début, sous couvert de décrire de grands espaces et de relater de grandes épopées, les chroniqueurs d'Amérique du Sud n'ont fait que suggérer certaines clés, laisser des traces. ils bâtissent d'énormes drames, c'est vrai, un gros roman après l'autre, mais au bout du compte l'argument principal se résume à quelques mots enfouis sous le fatras d'un paragraphe impétueux que nous lisons à peine, distraits par tant de pages. Ceux-ci sont parfois dissimulés dans un dialogue, dans une note, parfois même dans le titre. Le reste serait de trop s'il ne servait à cacher l'impérissable. Comme le pensent les érudits anglo-saxons, c'est sans doute une littérature de la violence, mais moins politique que métaphysique, moins charnelle qu'intellectuelle. Il ne s'agit pas tant de la violence évidente de l'autre, délibérée, insidieuse. La brutalité derrière le coup, l'offense sous l'insulte, le masque sous un autre masque, celui que tous reconnaissent. Crois-moi, le mensonge : voilà le grand thème des lettres, là-bas.
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