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Citation de Livretoi


Je décidai de m’endetter par amour, en achetant une petite embarcation à voiles, à moteur et à tout ce qui serait nécessaire : je me mourais pour Inès et il m’était absolument indispensable de la maintenir dans son état de bouleversement sur le littoral de Lima. Il était inutile d’emprunter de l’argent à la banque où travaillait mon père. Sa terreur du népotisme, qu’on puisse le croire népotiste, était si grande qu’il n’aurait pour rien au monde lâché un centime à ses enfants. Si bien que je me rabattis sur une autre banque, où j’expliquai au directeur, l’inoubliable don Carlos Ayala y Ayala, qui j’étais, de quoi il s’agissait et par qui j’étais recommandé. Ce monsieur était trahi par ses boutons de manchettes. Trop d’or pour qu’il s’agisse de boutons de manchettes en or. Le reste, il l’avait assez bien appris, sans aucun doute, bien que, depuis le début, le petit sourire nerveux avec lequel il me reçut dénonçât quelque chose du même style que ses boutons de manchettes. Ayala y Ayala fut ému par l’histoire du jeune étudiant en droit qui n’en pouvait plus d’impatience de naviguer avec sa fiancée, couvert de dettes, le long du littoral de Lima. Et l’amabilité dont il faisait montre augmentait à mesure qu’il me racontait comment lui-même, au même âge que moi, étudiant en droit comme moi, avait eu besoin d’un prêt. Bien sûr, sa situation était différente alors, son père venait de mourir, il était le seul enfant majeur, le soutien de sa mère et de ses sœurs. Bref, ou bien on l’aidait économiquement ou il devrait abandonner ses études et se mettre à travailler. Il était allé trouver mon grand-père, qui lui aussi était banquier.
Moi, j’étais déjà en train de naviguer avec Inès. J’avais commencé à naviguer dès qu’Ayala y Ayala m’avait raconté que mon grand-père l’avait accueilli avec la même amabilité dont il désirait faire preuve à mon endroit. J’étais pratiquement en haute mer et il poursuivait son histoire, assis face à mon grand-père, un gentleman comme il n’en existe plus, un homme inoubliable, M. Romana. Ce fut en naviguant avec Inès que j’appris comment mon grand-père lui avait demandé s’il était le fils d’untel, le petit-fils de tel autre : ce fut en naviguant que je sus que parce qu’il était le fils d’untel et le petit-fils de tel autre, don Carlos Ayala y Ayala n’avait besoin de présenter nulle garantie pour obtenir un prêt, son nom suffisait, il recevrait l’argent et pourrait continuer ses études et aider sa mère veuve. Il rembourserait avec le temps. Après m’avoir raconté qu’il avait remboursé jusqu’au dernier centime, avec le temps, et que c’était grâce à mon grand-père qu’il en était là où il en était, don Carlos Ayala y Ayala finit par ruisseler de sueur et me refusa la prêt.
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