Les derniers jours de l'été tout le monde était triste, à tel point que Raquel n'avait pas l'impression qu'ils rentraient mais plutôt qu'ils abandonnaient les lieux, s'exilaient des bougainvillées et des lauriers-roses, des orangers et des oliviers, de l'odeur de la mer et des bateaux du port, des palissades et des maisons blanchies à la chaux, des fenêtres fleuries et de l'ombre des treilles, de l'or de l'huile, de l'argent des sardines, des subtils mystères du safran et de la cannelle, de leur propre langue et de la couleur, du soleil, de la lumière, du bleu. Pour eux, rentrer n'était pas revenir à la maison, car on ne pouvait rentrer qu'en Espagne, même si personne n'osait jamais prononcer ce mot.