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Citation de santorin


La colère s'était apaisée au bout de quelques semaines. Et avec elle, on aurait dit que la couche protectrice, la gangue de plomb qui, les premiers temps, avait amorti le choc et la douleur, avait sauté. J'étais sans défense.
Et cessant de haïr ma mère, je commençais à me faire horreur.
Mon coeur n'était toujours pas prêt à accueillir la souffrance de ma mère, sa solitude, l'asphyxie qui l'empêchait de respirer, le cri de désespoir qu'elle avait poussé les dernières nuits de sa vie. Je vivais toujours mon drame, pas le sien. Mais je ne lui en voulait plus, au contraire, je culpabilisais : si j'avais été un meilleur fils, plus dévoué, qui ne jetait pas ses vêtements par terre, ne la tourmentait pas, ne la contrariait pas, préparait ses devoirs à temps, sortait la poubelle le soir sans se faire prier, ne lui gâchait pas la vie... Si j'avais été plus attentif à ses migraines. Ou si, au moins, je m'étais efforcé de lui faire plaisir...
Si ma mère m'avait quitté de cette façon, sans un regard en arrière, c'était la preuve qu'elle ne m'avait jamais aimé : quand on aime, m'avait-elle appris, on pardonne tout sauf la trahison. On excuse même les contrariétés, le bonnet perdu, les courgettes laissées dans l'assiette.
Abandonner c'est trahir. Et c'est ce qu'elle avait fait avec nous deux papa et moi. Moi, je ne l'aurais jamais quittée comme ça, malgré ses migraines, même si, je le savais maintenant elle ne nous avait jamais aimés, je ne l'aurais jamais quittée de ma vie, malgré ses longs silences, ses sautes d'humeur et même si elle s'enfermait dans sa chambre, dans le noir. Je me serais fâché quelques fois, je ne lui aurais peut-être pas parlé un jour ou deux, mais je ne l'aurais jamais quittée pour toujours. Jamais de la vie....
Si ma mère m'avait laissé en plan, c'était la preuve que je n'étais pas digne d'être aimé..... Quelque chose de si épouvantable que même ma mère, une femme pourtant tendre et sensible, prête à donner son amour à un oiseau, un mendiant dans la rue, un petit chien perdu, incapable de me supporter, avait été forcée de mettre la plus grande distance possible entre elle et moi. Il y a un proverbe arabe qui dit : " Koul gird be'ein emo razal" , au yeux de sa mère, un singe est comme un faon. Sauf moi.
Si j'avais été mignon, au moins un tout petit peu, comme tous les enfants du monde le sont pour leur mère...... si j'avais été comme tout le monde, j'aurais pu avoir une maman moi aussi...
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