AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Cannetille


« Il y avait des clans et des combats, racontait Guillaume. Le peuple de la Sorbonne était essentiellement composé de gens d’Église. Ce qui ne les empêchait pas de se battre comme des soudards. Entre les moines réguliers dont je faisais partie et les prêtres séculiers qui nous méprisaient, tout ce petit monde se bénissait d’ecchymoses et de bosses.
Les convictions philosophiques étaient aussi matière à contusions.
Parce que le maître paraissait défendre les thèses des platoniciens, le clan de l’inquisiteur général nous traitait de “Plats”, en prenant des airs de condescendance infinie. Eux n’avaient qu’Aristote à la bouche, un philosophe grec que l’on étudiait depuis moins d’un siècle. On disait qu’on devait aux Arabes d’avoir conservé et traduit ses œuvres. Alors on les appelait les “Sarrazins”. Les échauffourées entre les “Plats” et les “Sarrazins” de la Sorbonne étaient fréquentes et les bottes de paille qui servaient de chaises volaient dans les étages. Souvent, les concierges devaient séparer les novices qui se battaient comme les canailles du quartier. (…)
Les clercs n’étaient pas les seuls à combattre pour des convictions philosophiques d’autant mieux défendues qu’elles étaient moins comprises. Il y avait aussi le clan des laïcs qui nous sommaient de retourner à nos couvents. Ils méprisaient tout ce qui venait de l’Église et prétendaient que l’université écraserait un jour les cathédrales. Pourtant, leurs maîtres étaient tous des clercs. Ils crachaient sur les serviteurs de Dieu mais écoutaient leurs leçons. Comme ces apothicaires qui venaient apprendre leur métier auprès des moines thérapeutes avant d’afficher leur mépris pour ces ignorants sans diplôme à qui ils devaient leur culture.
Rejeter la religion, aux yeux des étudiants laïcs, garantissait une certaine élévation d’esprit. Dieu, dans sa très grande sagesse, n’avait pas cru bon de créer l’intelligence pour ses moines, se satisfaisant de leur foi. Il revenait donc aux laïcs de s’atteler à combler ce manque, ce dont ils se chargeaient en nous accablant d’insultes et de coups.
Commenter  J’apprécie          10





Ont apprécié cette citation (1)voir plus




{* *}