Arlene Heyman: Scary Old Sex
Elle avait d'autres griefs, parfois mineurs. Elle adorait les fleurs, mais il ne lui en offrait jamais. " Je t'achète des cartouches d'imprimante, disait-il. Et des clés USB."
Marianne revenait juste d'un brunch agité avec son fils Billy dans un café de Madison Avenue, et n'avait pas encore retiré son manteau. Le jeune homme était bouleversé parce que sa femme demandait le divorce. En sa qualité d'ex-assistante sociale, Marianne avait toujours considéré sa bru comme une personnalité borderline - d'un point de vue humain, c'était une vraie garce. Elle se serait réjouie de leur divorce si son fils n'avait pas été aussi désespéré. Elle s'était efforcée de le réconforter tout en l'encourageant à ne pas céder aux exigences scandaleuses de son épouse : Lyria voulait l'appartement, la maison de campagne et la moitié du chiffre d'affaires de Billy. «Seulement la moitié ?» avait-elle demandé, mais il était resté sourd à son sarcasme. Il buvait une Grey Goose après l'autre pendant que les oeufs pochés qu'il avait commandés se figeaient, pareils à des yeux jaunes, il se raclait sans cesse la gorge, respirait avec difficulté, comme autrefois pendant ses accès d'anxiété ; elle ne se souvenait pas de l'avoir vu dans cet état depuis un quart de siècle. Elle buvait rarement, mais avait commandé une Grey Goose pour l'accompagner, s'efforçant de chasser sa propre nervosité, et elle était encore un peu ivre. Marianne avait envie d'aller à la salle de sport pour éliminer, ou de prendre un rendez-vous de dernière minute chez le coiffeur pour se faire dorloter. Elle en avait bien besoin.
Tu as envie de faire l'amour ?» lança Stu à Marianne lorsqu'elle entra dans leur appartement. Elle se dirigea vers son bureau. C'était un samedi, vers le milieu de l'après-midi, mais Stu, assis devant son ordinateur, une tasse de café sur sa table encombrée, portait encore son pyjama violet. Une petite tache marron encore humide souillait les poils de sa barbe, ses cheveux gris clairsemés se dressaient autour de sa large calvitie. Il la regarda timidement un moment, puis se tourna à nouveau vers l'écran. La pièce donnait sur le hall d'entrée, le plancher en feuillu brillant jonché de piles de papiers et de revues - elle repéra Dissent, MIT Technology Review, le Hightower Lowdown. Des sacs en toile pleins à craquer, un blanc avec l'inscription SCHLEPPEN en lettres noires, un bleu vif parsemé de fleurs multicolores au-dessus des mots GREENPEACE RAINBOW WARRIOR. Des photos sans cadre d'enfants et de petits-enfants étaient éparpillées sur la tablette de radiateur en marbre.
Mais elle savait combien cela coûtait à son mari de lui demander ce genre de faveur, même après trois épouses ; Marianne était la quatrième. Pourquoi était-ce aussi difficile ? La seule explication qu'avait trouvé Stu était la peur d'être rejeté. Elle ne comprenait pas - si on n'avait pas envie un jour, ce serait peut-être différent le lendemain. Mais il hésitait même à demander toute la cuisse au comptoir de plats à emporter Chirping Chicken, ou encore il avait tendance à acheter le premier article que lui proposait une vendeuse. Sa timidité agaçait Marianne. Il se croyait facile à vivre, agréable. Coopératif. La plupart des gens le pensaient aussi.