Une guerre grondait au loin et risquait d'emporter avec elle les restes de notre pauvre humanité. Détracteurs, insurgés, hommes femmes, il n'y avait jamais de gagnants dans ce genre de conflits. La liberté ne se payait qu'au prix du sang.
Je n'ai jamais été proche de ma sœur. En fait, je n'ai jamais été proche de qui que ce soit. Les gens, leurs sentiments, leurs opinions, leurs jugements, ça me terrifie. Je me sens vulnérable.
Néanmoins, il s'en est fallu de peu pour qu'elle me démasque et renverse ce petit jeu malsain auquel nous nous livrons. On pourrait facilement assimiler celui- ci à la roulette russe. Le doigt sur la détente, l'arme sur notre tempe, nous appuyons encore et encore, jour après jour, l'adrénaline coulant à flots dans notre sang, jusqu'à ce que la seule et unique balle jaillisse et nous atomise le cerveau.
En fait, je n'ai jamais été proche de qui que ce soit. Les gens, leurs sentiments, leurs opinions, leurs jugements, ça me terrifie. Je me sens vulnérable. Je ne les comprends pas et ils ne me comprennent pas non plus, comme si nous n'appartenions pas à la même planète.
Face à l'entrée, à un pas des ténèbres, je songeai à ma famille. Elle seule pouvait me donner la force d'avancer. Abandonner serait revenu à signer notre arrêt de mort, alors quand Isaac me tira en avant, je laissai ma fierté de côté et le suivis sans broncher.
Isaac et moi avions été réunis par le destin, nous avions évolué ensemble et franchi des limites qui nous paraissaient infranchissables. Fallait- il pour autant nous considérer autrement que comme deux géniteurs conçus pour la reproduction ?
Il faut que je m'arrête avant de tomber en chute libre. Personne ne me rattrapera. Je vais m'écraser en beauté pour avoir désiré l'impossible, pour avoir bravé les interdits et aimé celui qui ne m'est pas permis.
A sucer son pouce comme il le faisait d'un air si charmeur, on aurait pu s'y méprendre, mais il ne s'agissait pas d'un ange, loin de là. J'avais la créature du diable tout contre moi.
J'hésitai de longues secondes. Un dilemme se jouait dans mon esprit, et dans mon cœur. Je n'oubliais pas qui était Isaac et ce qui nous séparait. Lui accorder confiance relevait de l'impossible, mais, et si l'impossible s'avérait possible ? Quelle était la vérité ? Quel était le mensonge ?
Le karma, le hasard, la fatalité, la mauvaise fortune ; peu importe le nom qu’on lui donne, le résultat est le même : deux orphelins.
Grand-mère a fait du mieux qu’elle a pu, malheureusement, elle a perdu la bataille contre le cancer, comme des millions de gens avant elle. Nous lui avons dit adieu après les fêtes. Elle venait à peine d’être enterrée que les services sociaux ont débarqué chez nous. Matt avait atteint la majorité, il a donc signé un tas de paperasses afin de les renvoyer le plus vite possible. Depuis, la loi le considère comme mon tuteur légal. Au début, je m’amusais à l’appeler « papa », mais ça m’a vite lassée, et puis Matt n’est pas très commode.