Aurélien Rousseau

Au cours de ma lecture des premières pages, je me suis dit que ce serait difficile mais poignant. Le thème de la maladie, un homme confronté aux limites de son corps, l'univers hospitalier... on sait dans quoi on s'engage. Et puis dans les premiers temps, l'auteur parvient à donner une dimension littéraire à son propos, presque poétique, dans la description de ce corps qui ne lui appartient plus. Là, je me dis que c'est intéressant, dur mais intéressant. Et puis arrivent les hallucinations, l'histoire de Boucle d'or, le parallèle avec l'occupation nazie, le double qu'il s'invente... et là j'avoue que je n'ai rien compris. Intellectuellement je suis restée à la porte du monde que l'auteur tente de nous dépeindre. Et quand on a besoin d'une explication de texte, ça gâche quant même pas mal la lecture.

« Cette chambre d’hôpital est devenu mon point zéro. C’est désormais à partir d’elle que toutes mes distances se mesurent. J’aurais pu y mourir. J’aurais sans doute dû y mourir. J’y ai recomposé des centaines de fois mon faire-part de décès. J’y suis mort en fait. Un moi y est mort. »

Boucle d’or est l’histoire très intimiste de l’expérience de la maladie. Le narrateur souffre du syndrome de Guillain-Barré, une paralysie touchant les membres, et est admis en réanimation. Il frôle la mort, la côtoie et l’imprime dans ses chairs. Sept ans plus tard il est de retour dans le même hôpital car alors que la maladie est vaincue, la douleur elle, comme une fidèle compagne est revenue.

Il a des hallucinations, des visions qui mélangent les gens réels et les gens fictifs, les évènements réels et les évènements fictifs. Il considère que son corps a une histoire et que celle-ci se présente en strates superposées. La maladie en inscrit de nouvelles, donc, même une fois guéri, il ne peut reprendre sa vie là où elle l’était. Il doit composer avec cette nouvelle expérience. Et alors qu’il sait depuis longtemps comment fonctionne son esprit, il va de découvertes en découvertes en observant les réactions de son corps.

L’auteur a semble-t-il voulu coller au plus près de la maladie en en faisant son personnage principal. Mais il m’a manqué quelques repères spatio-temporels pour me situer dans cette histoire très passionnante au demeurant.

Un premier roman assez prometteur qui explore la maladie de façon extrême et confidentielle.

Boucle d'or est le témoignage d'un homme ayant été atteint du syndrome Guillain-Barre. J'ai beaucoup apprécié la description du monde hospitalier et de ses acteurs. Travaillant moi même dans ce milieu, j'ai trouvé cet aspect du livre très réaliste et source de réflexion. Il en va de même des notions abordées de maladie, douleur, "guérison". Les passages focalisés sur ces thématiques sont d'autant plus touchants qu'ils sont rédigés du point de vue du malade comme une plongée dans une autre entité. Je n'ai par contre pas été du tout réceptive aux chapitres centraux qui évoquent des hallucinations, un double du narrateur et une version du conte Boucle d'or. Certains paragraphes me sont restés obscurs et je ne voyais pas ou l'auteur voulait en venir. Donc une lecture en demi teinte...

Directeur de l'Agence Régionale de Santé d'Ile-de-France pendant la crise du covid-19, Aurélien Rousseau revient sur cette période vécue "dans la boîte noire" et essaie d'en tirer des leçons pour le futur, en ce qui concerne la gestion de crise mais aussi plus largement le fonctionnement de l'Etat.

Ca aurait pu être très intéressant - et même, d'une certaine manière, ça l'est - mais c'est malheureusement presque illisible, à moins peut-être de déjà très bien connaître les organisations dont il parle. Haut fonctionnaire passé par les cabinets ministériels (où il officie encore actuellement), Aurélien Rousseau nourrit sans cesse sa réflexion de souvenirs tirés d'autres expériences, et de considérations assez vastes, ce qui rend l'écrit un peu vague, difficile à appréhender. La publication d'un simple journal de bord (même reconstitué par la suite) suivi d'une courte partie sur les leçons tirées eût été tellement plus intéressante à lire.

Peut-être que le livre, d'un intérêt démocratique évident, pourrait être réécrit avec l'aide d'un mémorialiste et/ou d'un spécialiste des sciences sociales.

Dans l'immédiat, malheureusement, il témoigne surtout d'une forme de déconnexion des élites, même quand elles sont bien intentionnées, et pourvues non seulement du sens de l'intérêt général mais aussi de l'exigence démocratique.