Voir Maître Noro enseigner et démontrer une technique me fit comprendre que l'art martial qu'est l'aïkido évoquait la musique et la danse. Il s'évanouissait en s'accomplissant, tirait toute sa grandeur de l'improbable de cette chorégraphie à deux qui, comme par miracle, ne semblaient plus former qu'un. L'expression suprême de l'art n'était plus dialogue mais fusion relationnelle où, dans l'échange, l'un et l'autre n'ont plus qu'une visée : réaliser le mouvement parfait.
Sans le savoir encore, je venais de découvrir l'essence et les prémices du Kinomichi.
Malheureusement, comme cela arrive souvent, s'ouvrit une longue parenthèse où les contraintes et aléas de la vie professionnelle et familiale m'éloignèrent du dojo. Intervenant et formateur en relations humaines dans toute la France et même à l'étranger, je dus, après avoir enseigné l'aïkido dans une ville de province, abandonner les tatamis. L'occasion me fut donnée d'exercer l'équitation, en amateur naturellement. Bien que piètre cavalier, le contact avec cet extraordinaire partenaire qu'est le cheval, me permit d'enrichir mon sens pédagogique, mes qualités relationnelles, renforçant le respect dévolu à l'autre.
«Ça fait plus de quarante ans qu'il m'embête !» Une formule lapidaire, dont il a le secret, fut lancée récemment sur le tatami par Maître Noro pour résumer notre relation, si particulière. Il est vrai qu'un lien noué avec une personne depuis plus de quatre décennies crée une solide amitié, mais l'intransigeance réciproque du maître et du disciple la nimbe quelquefois d'ombres passagères.
En guise d'introduction et au-delà de tout didactisme, c'est cette histoire singulière et édifiante que je souhaite partager avec vous, lecteurs, avant de vous entraîner dans les arcanes des techniques du Kinomichi, que son fondateur, Maître Noro, nomme lui-même «l'art du xxie siècle».
J'espère ainsi vous faire connaître, ou mieux apprécier, Masamichi Noro Sensei, cet homme passionnant parce que passionné, ce qu'il représente pour moi, tant je le considère comme la première personnalité représentative de l'héritage de Maître Ueshiba, créateur de l'aïkido.
Plus qu'une découverte, le premier cours fut un éblouissement. Ce que je vivais n'était pas que de l'aïkido, c'était celui de Maître Noro.
Mes années de pratique antérieures m'avaient permis de connaître et d'observer d'excellents techniciens de différents arts martiaux, voire des maîtres qui appliquaient leurs techniques moulées dans la rigueur. J'avais vu triompher des moyens durs et radicaux sur des partenaires, ou des adversaires, canalisant et contrôlant l'énergie. Mais le plus souvent, c'était au détriment de l'aisance, du brillant et de la finesse, en un mot, de la beauté.
Nos représentations
L’une des prémisses est que la « réalité », loin d’exister indépendamment de nous, est le produit de nos propres perceptions. Cette « réalité » n’est que « notre réalité » et dépend d’une façon importante de la structure du langage que nous utilisons. Notre vocabulaire, les mots que nous utilisons, prédéterminent nos perceptions, nos raisonnement, nos émotions, nos sentiments et, également nos rapports avec autrui.
Le monde n’existe que comme nous le percevons. La représentation que nous nous en faisons est notre représentation.
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En prenant l’homme-comme un tout-vivant-dans-son-environnement, la Sémantique Générale nous aide à devenir plus lucides, plus harmonieux, plus cohérents dans nos prises de décisions. En nous proposant de questionner nos modèles et d’en intégrer de nouveaux, elle permet une réflexion approfondie, non-aristotélicienne, sur nos « sentiments », autant et en même temps que sur nos « raisonnements », notre « intuition » et nos « logiques ».
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J'ai rencontré Maître Noro en septembre 1967. Une déchirure musculaire sérieuse m'avait contraint à interrompre des années de pratique du karaté. Avec regret, l'aïkido me semblant alors le seul art martial susceptible de me permettre de continuer mon chemin sur la voie, je rejoignis le dojo de Maître Noro dont la réputation n'était déjà plus à faire. Les circonstances me furent favorables puisque le dojo se trouvait pratiquement à ma porte.
Les mots ne sont que des symboles. C’est de nous-mêmes qu’en émerge le sens. Les mots changent de signification selon le contexte dans lequel ils sont entendu. Et chacun de nous a sa propre perception du contexte.
C’est l’ensemble attitude-croyance-valeur-prémisses, etc. qui donne une signification au mot.
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Rappelons-nous que l’homme est indivisible. Nos pensées, nos sentiments, nos émotions, nos ressentis, etc., ne sont qu’un même et unique ensemble qui détermine une orientation globale.
Communiquer c’est tenir compte de cet ensemble, tant pour soi que pour l’autre.
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